CONCLUSION DU CHAPITRE II
Le contrôle de performance dont il était question
dans ce chapitre revêt une importance cruciale pour assurer une gestion
financière efficace et transparente dans les CTD. Ce processus vise
à garantir que les ressources publiques sont utilisées de
manière optimale pour répondre aux besoins des citoyens et
promouvoir le développement local durable. À travers des
mécanismes tels que les audits réguliers, le reporting financier
détaillé et l'évaluation de la performance, les
autorités locales peuvent surveiller l'exécution
budgétaire, détecter les irrégularités et
améliorer la responsabilité des gestionnaires publics.
La performance possède autant de facettes qu'il y a
d'observateurs d'une CTD et de rationalités présentes dans ladite
CTD. On peut ainsi identifier une performance financière, mais aussi
sociale, environnementale, opérationnelle, etc. De ce fait, la
performance ne peut être définie d'un seul point de vue
(opérationnel, social, financier, etc.), mais comme un dosage de toutes
ces dimensions. La difficulté majeure tient au fait que les champs de la
performance ne se recoupent pas forcément et qu'il peut même y
avoir des antagonismes entre ces différentes facettes.
111
Le contrôle de l'exécution du budget des
Collectivités Territoriales Décentralisées au
Cameroun
CONCLUSION DE LA SECONDE PARTIE
Au terme de cette seconde partie de notre devoir qui, portait
sur un contrôle matériellement aménagé, le
contrôle de l'exécution du budget des CTD au Cameroun
présente à la fois des avantages substantiels et des défis
significatifs. Ce type de contrôle favorise la transparence et la
responsabilité dans la gestion des finances publiques locales, en
permettant une vérification détaillée des dépenses
et des recettes. De plus, il offre la possibilité de détecter
précocement des irrégularités financières, ce qui
est essentiel pour prévenir la corruption, les détournements de
derniers publics, la concussion, bref, la mauvaise gestion financière au
niveau local.
Cependant, les défis persistent, notamment en termes de
ressources humaines et
financières limitées pour assurer un
contrôle uniforme et efficace au niveau local. Le contrôle
matériellement aménagé du budget des CTD au Cameroun doit
être ancré dans le respect rigoureux des principes et
règles en vigueur pour assurer une gestion financière
transparente, responsable et équitable. Cela nécessitera des
efforts concertés pour surmonter les défis existants et pour
promouvoir une gouvernance financière durable et efficace,
répondant ainsi aux attentes des citoyens au niveau local. On peut
retenir d'une manière générale que la finalité du
contrôle de l'exécution du budget des CTD au Cameroun se
caractérise d'une part, par la régularité380,
et d'autre part, on assiste à l'introduction de la
performance381.
380 HASSANA (Barnabas), « L'évolution des
finalités du contrôle de la dépense publique au regard des
nouvelles
réformes de finances publiques camerounaises »,
op.cit., p. 1238.
381 Ibid.
CONCLUSION GÉNÉRALE
112
Le contrôle de l'exécution du budget des
Collectivités Territoriales Décentralisées au
Cameroun
113
Le contrôle de l'exécution du budget des
Collectivités Territoriales Décentralisées au
Cameroun
La gestion et le contrôle de l'exécution du
budget des collectivités territoriales décentralisées au
Cameroun représente un défi majeur dans le cadre de la
décentralisation administrative et financière. Ce travail explore
en profondeur les mécanismes et les effets du contrôle de
l'exécution du budget des CTD.
La décentralisation budgétaire est essentielle
pour renforcer la gouvernance locale et promouvoir la démocratie
participative. Au Cameroun, elle vise à autonomiser les CTD en leur
donnant la responsabilité de gérer leurs propres affaires,
notamment à travers la planification, l'élaboration et
l'exécution de leurs budgets. Cette approche est
considérée comme un levier potentiel pour stimuler le
développement local en permettant une meilleure adaptation des
politiques publiques aux réalités locales.
Autrement dit, la décentralisation est un mode
d'organisation de l'État et de partage de pouvoir dans l'État qui
implique autant une nouvelle conception, qu'une configuration
rénovée du système financier justifiée par le
développement des finances locales382. De ce fait, les
finances locales sont aujourd'hui traversées par la philosophie de la
nouvelle gouvernance financière publique383. Elle constitue
une réalité dans le système financier camerounais en
général, et dans le régime financier des CTD en
particulier384. Elle constitue une véritable
révolution financière par l'introduction d'une logique de
performance dans la gestion des finances publiques non seulement de
l'État, mais aussi et surtout des collectivités infra -
étatiques comme les CTD385. L'objectif de la nouvelle
gouvernance financière publique était de faire passer la
philosophie managériale logique de moyens à une logique de
résultats386. L'exécution du budget des CTD est
encadrée par plusieurs mécanismes de contrôle. Sur le plan
juridique, les lois et règlements définissent les
procédures à suivre tout au long du cycle budgétaire,
depuis la préparation jusqu'au contrôle postérieur. Le
contrôle interne joue un rôle éminemment important en
établissant des systèmes et des procédures pour assurer la
transparence, la régularité et la conformité des
opérations financières. Parallèlement, le contrôle
externe est assuré par la juridiction financière
spécialisée telle que la Chambre des comptes de la Cour
suprême, chargée de vérifier la régularité
des comptes et la légalité des dépenses.
382 AKONO OLINGA (André), op.cit., p. 382.
383 Ibid.
384 Idem.
385 Idem.
386 Idem.
114
Le contrôle de l'exécution du budget des
Collectivités Territoriales Décentralisées au
Cameroun
Malgré les efforts déployés, plusieurs
défis persistent dans la gestion et le contrôle de
l'exécution du budget des collectivités territoriales
décentralisées au Cameroun. Les capacités administratives
limitées au niveau local entravent souvent une gestion financière
efficace, tandis que la complexité des procédures et la lourdeur
administrative peuvent ralentir la mise en oeuvre des projets locaux. De plus,
la dépendance financière des CTD vis - à - vis du pouvoir
central limite leur autonomie et leur capacité à répondre
aux besoins locaux de manière proactive. En outre, la persistance de la
corruption et des pratiques opaques, compromettent la bonne utilisation des
ressources publiques et sapent la confiance des citoyens au sein des
collectivités locales.
Cependant, pour améliorer la gestion et le
contrôle de l'exécution du budget des CTD au Cameroun, plusieurs
perspectives clés doivent être explorées. Il est crucial de
renforcer les capacités administratives locales par le biais de
formations continues et du développement des compétences. La
promotion de la transparence et de la reddition des comptes est essentielle,
impliquant la publication régulière des informations
budgétaires et l'adoption de mécanismes de contrôle
robustes. Il est également nécessaire de renforcer les organes de
contrôle externe pour assurer une supervision efficace et impartiale. En
parallèle, la promotion d'une véritable décentralisation
fiscale et le renforcement des ressources propres des collectivités
locales sont indispensables pour accroître leur autonomie
financière.
Les principes de la libre administration, d'autonomie locale
et de la personnalité juridique réaffirmés dans le CGCTD,
démontrent bien la volonté des pouvoirs publics à
maintenir les Régions et les Communes au centre de leur propre gestion.
Cependant, elles exercent leurs activités dans le respect de
l'unité nationale, de l'intégrité du territoire et de la
primauté de l'État387. Les ressources propres des
Régions et des Communes et celles qui sont transférées par
l'État constituent des derniers publics, dont la gestion doit
obéir aux procédures et mécanismes officiels en vigueur et
est soumise aux contrôles de tutelle et des institutions
spécialisée.
Même si nous l'avons pas évoqué,
l'autorité de tutelle joue un rôle très important dans le
registre du contrôle administratif du budget des CTD. D'une
manière générale, les actes et les
délibérations des collectivités territoriales sont en
principe soumises à l'approbation du
387 Tel est le sens de l'article 2, alinéa 2 de la loi
du 24 décembre 2019 portant CGCTD qui dispose que les Régions et
les Communes sont les CTD de la République, « Elles exercent
leurs activités dans le respect de l'unité nationale, de
l'intégrité du territoire et de la primauté de
l'État ».
115
Le contrôle de l'exécution du budget des
Collectivités Territoriales Décentralisées au
Cameroun
représentant de l'État388.
L'approbation est un procédé de tutelle qui s'exerce sur les
délibérations et les décisions des collectivités
territoriales389. Selon ce procédé, « l'acte
pris par l'autorité « sous tutelle » ne peut
entrer en vigueur tant que n'est pas survenue l'approbation qui, selon les
textes, peut être expresse - l'autorité de tutelle manifeste
clairement sa volonté d'approuver le texte (ou de le
désapprouver) - ou tacite - le silence de l'autorité de tutelle,
pendant un délai dont la durée peut varier, vaut approbation
»390.
En finances publiques locales, le pouvoir d'approuver le
budget voté par l'organe délibérant est reconnu au
représentant de l'État. L'article 426 du CGCTD dispose à
cet effet que « le budget de la Collectivité Territoriale est
approuvé par arrêté du représentant de l'État
dans un délai de quinze (15) jours suivant la date de sa
réception par celle-ci. Passé ce délai, le budget est
réputé approuvé ». Il s'agit du Préfet en
ce qui concerne les budgets des communes, et du Gouverneur en ce qui concerne
les budgets des régions. L'article 76 du même texte précise
que cette autorisation est préalable. Toute chose qui atteste que les
budgets locaux ne peuvent être exécutés sans l'approbation
du représentant de l'État. Ces dispositions renforcent le pouvoir
de la tutelle dans le processus budgétaire local391. Il se
pose en effet un problème de légitimité392. En
effet, comment un représentant de l'État, de surcroit
nommé détient le pouvoir de suspendre un organe élu
?393 Ce pouvoir reconnu au représentant de l'État est
en contradiction avec les exigences de la démocratie394. Bien
plus, le représentant de l'État qui approuve le budget, peut le
modifier « d'office ». Cette modification intervient lorsque le
budget voté n'est pas conforme à la législation. Dans, ce
cas, le représentant de l'État adresse une mise en demeure
à l'organe délibérant. Au cas où ce dernier ne
réagit pas, le budget est modifié d'office395.
La loi consacre ainsi une autre forme de tutelle qu'est le
pouvoir de substitution d'action396. La substitution d'action est
définie par le Dictionnaire de droit administratif
388 BIPELE KEMFOUEDIO (Jacques), « La tutelle
administrative dans le nouveau droit camerounais de la décentralisation
», ASFJP/Uds, Tome 9, 2005, pp. 83 - 110.
389 MONGBAT (Alassa), DJODA (Jean - Marc), « Recherche
sur le pouvoir budgétaire des collectivités territoriales
décentralisées en droit public financier camerounais »,
op.cit., p. 2210.
390 VANG LANG (Agathe), GONDOUIN (Geneviève), INSERGUET
- BRISSET (Véronique), Dictionnaire de droit administratif,
Paris, Sirey (7e éd.), 2015, 515 p., pp. 38 - 39.
391 MONGBAT (Alassa), DJODA (Jean - Marc), ibid., p.
2211.
392 Idem.
393 Idem.
394 Idem.
395 Art. 422 (1) de la loi du 24 décembre 2019 portant
CGCDT.
396 PLESSIX (Benoît), « Le pouvoir de substitution
d'action », in COMBEAU (Pascal) (dir.), Les contrôles
de l'État sur les collectivités territoriales aujourd'hui,
Paris, L'Harmattan, 2007, pp. 67 - 88 ; du même auteur :
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Le contrôle de l'exécution du budget des
Collectivités Territoriales Décentralisées au
Cameroun
comme « un procédé très
rigoureux permettant notamment à une autorité de tutelle de
prendre une décision à la place de l'autorité
décentralisée »397. Ce pouvoir de
modification du budget reconnu au représentant de l'État
constitue une véritable arme redoutable lui permettant de défaire
le budget selon ses intérêts personnels398. Pouvant se
substituer à l'organe délibérant, le représentant
de l'État serait tenté de modifier les budgets dans lesquels il
n'y trouve aucun intérêt399. Ainsi, la tutelle dans le
droit budgétaire des CTD constitue une atteinte à la
liberté locale et s'apparente à une sorte de « fonction
maudite »400.
En réalité, le pouvoir d'approbation du budget
reconnu au représentant de l'État limite les pouvoirs de l'organe
délibérant en matière budgétaire. En
conséquence, les sessions budgétaires sont devenues des sessions
de fête pour les conseillers. Ils y vont tout simplement pour approuver
le projet de budget auquel ils n'ont pas participé à
l'élaboration et percevoir leurs perdiems401.
En fin de compte, l'approbation apparaît ainsi comme un
autre mécanisme de contrôle qu'exerce la tutelle sur les
collectivités en matière budgétaire. L'autorité de
tutelle vérifie notamment le respect des ratios fixés aux termes
de l'article 38 de la loi no 2009/011 du 10 juillet 2009, portant
fiscalité locale. Il faut ajouter que le pouvoir d'approbation du budget
des collectivités locales par l'autorité de tutelle, est
également un contrôle de performance, car l'autorité de
tutelle a également vocation à vérifier la
cohérence des programmes de la collectivité locale avec les
politiques publiques nationales.
« Une prérogative de puissance publique
méconnue : le pouvoir de substitution d'action », RDP,
no 119, 2003, pp. 579 - 629.
397 VANG LANG (Agathe), GONDOUIN (Geneviève), INSERGUET -
BRISSET (Véronique), op.cit., p. 456.
398 MONGBAT (Alassa), DJODA (Jean - Marc), op.cit., p.
2211.
399 Ibid.
400 RUFFAT (Jocelyne), « La tutelle, une fonction maudite
», Politiques et Management Public, no 1, Vol. 7,
1989, pp. 113 - 146.
401 KANKEU (Joseph), « L'autonomie des
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Le contrôle de l'exécution du budget des
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