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La CPI et la lutte contre l'impunité des crimes internationaux


par Berger-Le-Bonheur RAWAGO
Institut Supérieur de Droit de Dakar - Master 2 Droit Public 2023
  

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B- La Recevabilité en cas de l'incapacité d'un Etat

Mis à part le manque de volonté, la recevabilité comprend également le critère de l'incapacité d'un à mener à bien les poursuites à l'encontre de la personne mise en cause. Tout comme la notion de manque de volonté, l'incapacité n'a pas été définie par le Statut de Rome. Elle est également cristallisée dans le Statut de Rome comme suit : « 3- Pour déterminer s'il y a incapacité de l'État dans un cas d'espèce, la Cour considère si l'État est incapable, en raison de l'effondrement de la totalité ou d'une partie substantielle de son propre appareil judiciaire ou de l'indisponibilité de celui-ci, de se saisir de l'accusé, de réunir les éléments de preuve et les témoignages nécessaires ou de mener autrement à bien la procédure »111.

En partant de ce qui précède, force est donc de constater l'incapacité d'un Etat peut s'expliquer de trois manières. Il s'agit de prouver l'effondrement ou l'indisponibilité de l'appareil judiciaire national, pour commencer. L'effondrement du système national de la

108 MBAYE (A.A.) et SHOAMANESH (S.S.), « Commentaire article par article : la Cour », in Statut de Rome de la Cour Pénale Internationale : commentaire article par article, Edition A. PEDONE, p. 687 -709.

109 Statut de Rome de la CPI, Article 17, paragraphe 2, alinéa (b).

110 Statut de Rome de la CPI , Article 17, paragraphe 2, alinéa (c).

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111 Statut de Rome de la CPI, Article 17, paragraphe 3.

magistrature doit être total ou substantiel. Un effondrement total peut être défini par un effondrement complet de l'administration de la justice, soit en raison de la perte par l'État de son contrôle sur le territoire ou en raison d'une décision nationale de supprimer l'administration de la justice. Pour ce qui concerne l'effondrement substantiel, elle comprend une situation, où les autorités de l'État ne sont pas nécessairement complètement dysfonctionnelles, mais tout de même incapables d'assurer l'instruction de l'affaire. Il est nécessaire de mettre en valeur le lien de cause à effet, c'est-à-dire démontrer que cette incapacité est le résultat de l'effondrement ou de l'indisponibilité de l'appareil judiciaire. Dans ce cas, nous pouvons imaginer que l'Etat, après avoir constaté son incapacité, décide de lui-même de se dessaisir et de déférer la situation devant la CPI. A titre d'exemple l'Ouganda, la République Démocratique du Congo et la République Centrafricaine, après avoir constaté leur incapacité à mener véritablement à bien les poursuites des personnes présumés avoir commis des crimes internationaux sur leurs territoires ont déféré ces situations à la CPI112.

Il s'agira de démontrer, ensuite, que l'Etat est incapable de se saisir de l'accusé, de réunir les éléments de preuve et les témoignages nécessaires ou de mener autrement à bien la procédure. Le premier cas peut être le résultat de difficultés rattachées à l'extradition, qui peut se fonder par exemple sur des motifs futiles, à des questions d'asile, dont l'octroi peut s'avérer discrétionnaire, à l'immunité ou à des obstacles logistiques, comme le fait de bloquer des commissions rogatoires. Pour ce qui concerne le second cas, il peut résulter d'un empêchement d'accéder au lieu où les crimes se sont déroulés, de l'absence d'un programme de protection des témoins ou encore d'un manque de personnel qualifié pour recueillir les témoignages.

La Cour Pénale Internationale n'est pas une simple cour des droits de l'homme. Son but premier n'est pas de détecter les violations des principes du procès, mais plutôt de déterminer si le système national est capable ou non de poursuivre les principaux crimes prévus par le Statut113. Voyons maintenant l'évolution de la notion de complémentarité de la Cour.

112 RDC : ICC-01/04-01/06 Affaire Le Procureur c/Thomas Lubanga Dyilo , ICC-01/04-01/07 Affaire Le Procureur c/Germain Katanga et Mathieu Ngudjolo Chui , ICC-01/04-02/06 Affaire Le Procureur c/ Bosco Ntaganda ; RCA :ICC-01/05 -01/08 Affaire Le Procureur c/ Jean-Pierre Bemba Gombo ; OUGANDA : ICC-02/04-01/05 Affaire Le Procureur c/ Joseph Kony, Vincent Otti, Okot Odhiambo et Dominic Ongwen

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113 HELLER (K), « Le côté obscur de la complémentarité : l'effet de l'article 17 du Statut de Rome sur la procédure régulière nationale », Forum de droit pénal, Vol. 17, 2006, pp. 255-280.

Paragraphe 2 : L'évolution de la complémentarité de la Cour : la complémentarité positive

En effet, les normes régissant la complémentarité ont été conçues pour répondre à la confrontation entre la juridiction nationale et la CPI. Cependant, force est de constater qu'après l'entrée en vigueur du Statut de Rome, les lacunes de la complémentarité passive de la Cour ont été remarquées et élaborées par plusieurs auteurs et même par le Procureur de la CPI. Nous sommes partis alors d'une complémentarité passive de la Cour à une forme avancée, dite complémentarité positive. Cependant, tout comme la complémentarité passive, la complémentarité positive n'est pas non plus définie dans le Statut de Rome, ce dernier se limite à consacrer la forme et les modalités d'une assistance que la Cour peut fournir aux tribunaux nationaux114.

En effet, L'émergence vers le concept de « complémentarité positive » en droit pénal international s'inscrit dans l'optique de remédier aux lacunes du Statut de Rome quant à la définition de l'assistance globale pour le renforcement des capacités des systèmes judiciaires nationaux115. Pour aller plus en profondeur, nous analyserons la notion de la complémentarité positive (A) ainsi que les différentes formes d'assistance dans la complémentarité positive (B).

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