6.2. THÉORIE
DU CHANGEMENT
Cette théorie est issue de la psychologie des
organisations et traite du changement organisationnel. Mais il est
adapté dans le cadre de cette étude au changement social, entendu
comme « toute transformation observable dans le temps, qui
affecte, d'une manière qui ne soit pas provisoire ou
éphémère la structure ou le fonctionnement de
l'organisation sociale d'une collectivité donnée et modifie le
cours de son histoire » (Rocher, 2003). Les points d'ancrages
seront les modèles de changement de Kurt Lewin, de Corellette et al, et
de Coch et French.
6.2.1.
Modèle de changement de Kurt Lewin
Inspiré des sciences de la nature, le psychologue
américain d'origine allemande Kurt Lewin, pionnier de la
« psychosociologie », développe une
conception du changement caractérisée par un souci de fonder une
théorie scientifique des rapports entre personnes et
société (Rhéaume, 2002). Selon lui, le processus du
changement passe fondamentalement par trois étapes, plus ou moins
longues, difficiles et intenses selon les personnes ou les groupes
concernés. Il s'agit de ladécristallisation, du
déplacement et de la cristallisation.
v Décristallisation ou dégel
Cette phase correspondrait à la période
où un système, qu'il s'agisse d'un individu, d'un groupe ou d'une
autre collectivité, commence à remettre en question,
volontairement ou non, ses perceptions, ses habitudes ou ses comportements.
Cette étape reflète la prise de conscience des
inconvénients d'une situation, soit l'écart entre une situation
présente et une autre plus agréable. Cette étape conduit
dans son application, à dresser de prime abord un portrait le plus
complet possible de la situation de départ vécue par une personne
ou un groupe de personnes, dans son contexte actuel: motivations, ressources,
visées, alliances, oppositions, résistances au changement
visé, etc. (Rhéaume, 2002).
La décristallisation, dans le cadre de la
présente recherche, appellerait à la déconstruction des
représentations sociales du trottoir chez les commerçants de
trottoirs et à leur prise de conscience des avantages de sa
libération ainsi que des inconvénients de son occupation.
v Déplacement ou transition
A ce niveau, sont initiés les nouveaux modes de
fonctionnement et expérimentés de nouvelles façons de
faire. C'est la phase d'apprentissage, d'intégration voire
d'assimilation de nouveaux comportements où les individus investissent
l'essentiel de leurs énergies (Mboe, 2013). Il est question ici
d'identifier les facteurs ou les « forces » qui sont susceptibles de
faciliter une décristallisation du champ psychologique et social,
permettant de former le projet d'agir ou d'intervenir sur ces facteurs
(Rhéaume, 2002).
Il est question ici d'amener les commerçants de
trottoirs à intégrer dans leurs habitudes de nouvelles
façons de faire vis-à-vis des trottoirs.
v Cristallisation ou recristallisation
C'est la phase effective du changement ou de la
réalisation de la nouveauté proprement dite. Le changement, pour
être durable, est intégré dans de nouvelles façons
de faire de plus en plus spontanées. Les nouvelles pratiques
s'harmonisent avec les autres dimensions du quotidien et font désormais
partie des habitudes. Les nouvelles attitudes, valeurs et comportements
commencent à se stabiliser et à se recristalliser.
Le « promoteur » du changement se doit de
prendre ces étapes en considération tout au long de ses
interventions. A ce titre, Tessier (1992, cité par Mboe, 2013), soutient
que « l'impact potentiel, d'une action entreprise par les
initiateurs d'un projet de changement planifié auprès de ses
destinataires, peut se représenter comme une modification d'un champ de
forces sociales visant à créer un nouvel équilibre parmi
les forces dont l'action s'exerce positivement ou négativement sur la
conduite des destinataires du changement ».
Le modèle lewinien a le mérite de proposer une
lecture dynamique du processus de changement. Ce modèle vaplus
tardinspirer Collerette et al. (1997) qui propose un modèle
corrigé.
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