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Style autoritaire en education extrascolaire et resistance au changement: cas des commerçants de trottoirs du marché Melen


par Cyrille Armel SAPE KOUAHOU
Université de Yaoundé 1 - Master 2017
  

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CHAPITRE 6: THEORIES EXPLICATIVES

Afin de saisir la résistance au changement des commerçants de trottoirs, il est question, à la faveur de ce chapitre, de traiter des théories susceptibles d'orienter la présente étude. C'est-à-dire de faire le choix du « modus operandi », à l'effet de mettre en relief la scientificité et la rationalité de l'étude. C'est le lieu d'exposer les travaux des devanciers et des'en inspirer pour expliquer sa problématique et tenir son propre argument.

Trois cadres théoriques ont alors été mobilisés à savoir la théorie de la réactance psychologique selon la perspective de Brehm ; la théorie de changement selon les modèles de Kurt Lewin, de Corellette, Deliste et Perron, de Coch et French et enfin l'approche théorique de l'éducation des adultes selon Malcom Knowles et David Kolb. Toutefois, un accent sera mis sur la théorie de la réactance psychologique et celle de l'éducation des adultes, qui sont les théories fondatrices de l'étude.

6.1. THÉORIE DE LA RÉACTANCE PSYCHOLOGIQUE

La théorie de la réactance psychologique a été élaborée par Brehm (1966). La proposition centrale de la théorie est la suivante : « Étant donné un individu qui dispose d'une gamme de « comportements libres », cet individu éprouvera de la réactance chaque fois que l'un de ces comportements est éliminé ou menacé d'élimination ». Cette théorie postule donc que l'individu réagit aux tentatives de contrôle de son comportement et aux menaces de sa liberté de choix en prenant une position de retrait ou de rejet (Darpy et Prim-Allaz, 2006). En matière de marketing commercial, elle a été étudiée pour expliquer des changements de préférence d'un clientvis-à-vis d'un produit. Lorsqu'un consommateur se voit refuser la liberté de choisir une certaine alternative, même si celle-ci n'avait pas été sa préférence au départ, l'alternative devient alors sa préférée (Maillard, 2014).

D'après Moscovici et Plon (1968), Brehm part de l'idée très simple que les individus ont le sentiment -- réel ou illusoire -- qu'ils sont libres de choisir, de s'engager dans une gamme de comportements au sein de laquelle ils peuvent ainsi affirmer leur liberté. Si cette liberté ou cette autonomie de choix est réduite ou simplement menacée d'être réduite, l'individu va être sensibilisé au niveau motivationnel. Cette sensibilisation va être orientée contre toute nouvelle réduction et vers le rétablissement de la liberté perdue ou menacée. L'état motivationnel en question est donc une réponse à la réduction ou à la menace de réduction de la liberté de choixet il peut être estimé en terme lewinien comme une « contre-face », désignée sous le nom de « réactance psychologique ».

Brehm insiste sur un point, il est important de ne pas assimiler la réactance à une réaction de frustration, cette dernière survenant si l'on supprime l'objectif préféré de l'individu. Alors que dans le cas de la réactance, la suppression concerne des comportements ou des choix. La réactance se produit donc à propos d'une gamme de comportements qui restent prisés.

L'intensité de la réactance ainsi produite sera une fonction directe de quatre déterminants :

a) L'intensité de la réactance est d'autant plus grande que l'importance du comportement libre éliminé ou menacé est grande.

b) L'intensité de la réactance est aussi une fonction directe de l'importance relative d'un comportement éliminé ou menacé de l'être à un moment donné par rapport à l'importance de l'ensemble des comportements libres en ce même moment.

c) Plus la proportion de comportements éliminés ou menacés de l'être est grande, plus l'intensité de la réactance estgrande. Par exemple, si un individu estime pouvoir effectuer librement trois actions, il éprouvera une réactance psychologique plus grande s'il lui est empêché de réaliser deux de ces actions plutôt qu'une seule.

d) Si un comportement libre est menacé d'élimination, plus grande est le pouvoir de la menace, plus grande est la réactance. Par exemple, si l'origine de la menace est située chez autrui, la menace est considérée comme d'autant plus forte et partant la réactance d'autant plus grande que cet autrui a un pouvoir élevé.

La théorie de la réactance permet de montrer que l'option perdue suite à une contrainte de liberté de choix est finalement préférée, même si tel n'était pas le cas avant la suppression de l'alternative. Un comportement forcé par une influence extérieure, celui de la libération des trottoirs par exemple, est peu apprécié. Une influence sociale agissant pour soutenir une contrainte de liberté peut avoir un « effet boomerang »sur l'initiative du soutien. La théorie de la réactance psychologique postule que dès que la liberté de choix entre deux options est menacée en rendant l'une d'entre elle difficile et complexe, l'attractivité, de l'individu, pour cette dernière est renforcée.

Un comportement considéré comme « problématique » devient plus attractif si une intervention remet en cause, ou met au défi, la liberté individuelle. Alors, la théorie postule que, chaque fois que notre liberté de choix se trouve limitée ou menacée, nous attachons soudain plus de valeur à ce choix par le fait qu'il semble inaccessible. Autrement dit, le fait d'éliminer, ou simplement de menacer, la liberté d'action d'un individu provoque une motivation dite « réactance psychologique ». Cette motivation dirige le comportement de l'individu vers le rétablissement de la liberté perdue virtuellement ou réellement.(Paboussoum, s.d.)

Marie-Claire Maillard(2014),utilise la figure2ci-dessous pour schématiser la réactance psychologique.

FIGURE 2 : Illustration de la théorie psychologique de la réactance

Source :Marie-Claire Maillard, Thèse de Doctorat (2014)

Au regard de ce qui précède, la théorie de la réactance psychologique est tout à fait valide pour expliquer la résistance au changement des commerçants de trottoirs. En effet, « la pratique du laisser-faire par le laxisme des pouvoirs publics a favorisé l'ancrage mental d'un imaginaire citadin difficile à déconstruire chez les opérateurs informels et les autres citadins » (Mbouombouo et Nsangou, 2012).Cette longue accoutumance aurait fait en sorte d'aux yeux de ces commerçants ou pour une bonne fraction d'entre eux, les trottoirs se caractériserait par son « opportunité entrepreneuriale » et sa « disponibilité foncière » (Steck, 2006). Les trottoirs seraient alorspour le « négro-africain » des espaces vacants, disponibles et à prendre (Janin, 2001). L'occupation des trottoirs étant ainsi entrée dans la « conscience collective » à cause d'une longue pratique, le citadin africain est habité par la ferme conviction qu'il est libre d'occuperune portion de trottoirs pour un usage privé. L'occupation du trottoir participe par conséquent de sa liberté de choix. D'où la réactance psychologique, dès que l'on tente de lui imposer le contraire. Ladite réactance psychologique se manifestepar la défense de sa liberté à vendre sur le trottoir.

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon