5.2.2. Education
extrascolaire
5.2.2.1. Fondement historique de
l'éducation extrascolaire
Pierre Furter observe dès 1976 que l'étude de
l'éducation extrascolaire souffre de la rareté de ses
études historiques. D'après ce dernier, la problématique
de l'éducation extrascolaire voit véritablement le jour au
lendemain de la deuxième guerre mondiale. La préoccupation
centrale à l'initiative de l'éducation extrascolaire est celle de
l'éducation des adultes, dans le soucide mobiliser la participation de
tous à l'effort de reconstruction (Furter, 1976). Cependant, c'est au
cours de la décennie des années 70 que s'est
développée la prise de conscience de ces problèmes et que
les principales organisations internationales ont envisagé cette
problématique (Furter, 1984). Trois faits majeurs sont à retenir
pour élaborer des hypothèses explicatives de la prise de
conscience de cette problématique :
- Le constat des limites de l'universalisation et de la
démocratisation de l'éducation scolaire obligatoire ;
- La complexité grandissante des rapports que les
« systèmes » scolaires entretiennent avec les
« para-systèmes» extrascolaires qui sont nés de
l'institutionnalisation de l'éducation des adultes.
- L'élargissement des conceptions de
l'éducation, en particulier sous l'impact des idées qui donneront
naissance à ce qu'on peut mettre dans la catégorie de
l'éducation permanente.
Cléopâtre Montandon (s.d.) affirme que,
la crise mondiale de l'éducation
diagnostiquée il y a une quarantaine d'années (fin des
années 1960 et début des années 1970), dont s'est
émue l'UNESCO ou la Banque Mondiale, aconduit vers l'idée que
pour résoudre le problème des systèmes scolaires, il
était nécessaire de se tourner vers les ressources
éducatives en dehors de l'école et dans d'autres secteurs de la
société (Coombs 1968 ; Coombs, Prosser & Ahmed, 1973). C'est
à cette époque que les notions de déscolarisation (Illich,
1973) ou de learning society (Faure, 1972) sont apparues et que les
distinctions entre éducation formelle, informelle et non formelle ont
pris leur essor.
Toutefois, la littérature, telle que rapportée
par Furter (1976), rend compte de ce que, la première conférence
internationale sur l'éducation des adultes (CONFINTEA 1), qui a eu lieu
à Elseneur au Danemark en 1949 inaugure les activités de l'UNESCO
dans le domaine d'éducation extrascolaire. Mais cette conférence
pionnière est européocentrique et classiste. En effet,
d'une part le tiers monde n'est pas représenté et les deux tiers
des participants sont européens; d'autre part, l'idée centrale
est la promotion de « l'élite » ouvrière.
Lorsque les participants parlent d'éducation populaire,
« ce n'est que dans l'intention de diffuser la culture bourgeoise
dans les milieux prolétaires ». Mais, un autre
thème y est évoqué de manière furtive, mais sera
développé dans les années 50. Il s'agit de
l'éducation fondamentale. L'UNESCO entend par là
« essentiellement une intervention éducative globale, mais
réduite à un minimum indispensable qui inclut
l'alphabétisation et qui s'adresse à des populations marginales
afin de leur donner le pouvoir de trouver leurs solutions aux problèmes
qu'elles rencontrent ».
CONFINTEA 2s'est tenu à Montréal au Canada en
1960. Elle fait suite à celle d'Elseneur mais lui est cependant
très différente. En effet, le monde a changé. Une
multitude de pays ont accédé à l'indépendance.
« Pour la première fois, on reconnaît que
l'éducation des adultes est un ensemble complexe dont on discerne mal
les limites et dont on domine peu l'ensemble des formes ». Ce
qui n'empêche pas d'en tracer les grands traits dans le secteur
économique avec la formation professionnelle et l'amélioration
des qualifications ; dans le secteur social avec l'éducation
fondamentale et dans le cadre de l'apport de l'éducation à la
construction des nouvelles nations.
La troisième conférence internationale de
l'UNESCO sur l'éducation des adultes (CONFINTEA 3) est celle de 1972
à Tokyo, qui donne naissance au fameux rapport Apprendre à
être. « Fondamentalement, le rapport défend une
conception globale de développement de l'éducation pour les
sociétés contemporaines dont la finalité est d'assurer
à tout individu la possibilité d'apprendre pendant sa vie
entière ». Ce principe d'éducation
permanente constitue la clé de voûte de toute
l'argumentation. Trois considérations fortes se dégagent: d'abord
celle de l'éducation diffuse,
« c'est-à-dire du processus réellement permanent
grâce auquel tout individu adopte des attitudes et des valeurs, acquiert
des connaissances grâce à son expérience quotidienne, aux
influences de son milieu et à l'action de toutes les institutions qui
l'incitent à modifier le cours de sa vie ». Ensuite,
celle de l'éducation extrascolaire,
« c'est-à-dire de toutes les activités
organisées d'éducation qui visent des clientèles
particulières en fonction de leurs besoins et de leurs
aspirations ». Enfin, l'éducation scolaire,
« qui sous la forme de systèmes d'enseignement
hiérarchisés, tronçonnés en années
d'études, permet à l'ensemble de la population non encore
engagée dans la production, d'acquérir la formation de base
indispensable pour pouvoir par la suite utiliser les moyens de
l'éducation extrascolaire et diffuse ». Pour le rapport
Apprendre à être, « le succès ou
l'échec d'une politique de l'éducation dans un pays ne peut plus
se mesurer seulement par la scolarisation de la nouvelle
génération, mais par le nombre d'adultes qui sont devenus
capables d'auto-instruction ». D'autre part, ce rapport affirme
que « le développement éducatif ne peut se
contenter d'attribuer à l'éducation extrascolaire un rôle
complémentaire, correctif ou de palliatif par rapport aux
systèmes scolaires, mais que le succès de l'éducation des
adultes passe par une refonte des systèmes
scolaires ».
Ainsi,
L'approche intégrée a été
formulée de manière plus explicite par la Commission
internationale sur le développement de l'éducation, réunie
par UNESCO en 1971-1972,qui précisait dans son rapport :
« L'éducation des adultes revêt une importance
particulière dans la mesure où elle constitué un facteur
déterminant dans la réussite scolaire desnon adultes: on ne peut,
en effet, dissocier l'enseignement primaire des enfants duniveau
éducatif des parents; ce n'est pas dans un milieu analphabète que
pourront êtrepréparées les générations
nouvelles... Il importe donc de ne jamais opposer l'éducationdes adultes
à l'éducation des enfants et des jeunes: le concept d'une
éducation globale transcende cette apparente contradiction et en met les
deux pôles, parallèlement etsimultanément, au service des
objectifs communs de l'éducation au sens large. Il s'en suit que
l'éducation des adultes ne peut demeurer plus longtemps dans aucune
sociétéun secteur marginal et qu'une place doit lui être
réservée dans les politiques et budgetsd'éducation, ce qui
implique une articulation solide entre l'enseignement scolaire et
l'éducation extrascolaire». (Hamadache, 1993).
Les trois derniers CONFINTEA (4, 5, 6) ont eu lieu
respectivement en 1985, 1997 et 2009 à Paris (France), Hambourg
(Allemagne) et Belém (Brésil). S'appuyant sur les acquis des
premières, elles considèrent que le développement de
l'éducation des adultes est la condition indispensable de la
concrétisation de l'éducation permanente et un facteur important
de la démocratisation de l'éducation et consacre la
nécessité d'une législation adéquate en
matière d'éducation des adultes.
Quant au colloque de Dakar sur l'éducation
extrascolaire du 3 au 8 mai 1976, il avait été entendu que, pour
les pays en voie de développement, le concept d'éducation
extrascolaire recouvrait deux domaines, celui des activités
organisées au profit des jeunes scolarisés en dehors du temps et
du lieu de l'école; ce serait l'acception traditionnelle du terme. Mais
l'éducation extrascolaire vise particulièrement l'énorme
masse laborieuse analphabète, formée de jeunes et d'adultes qu'il
importe de former et d'instruire, pour leur permettre d'intervenir avec plus
d'efficacité dans le développement économique et social,
et dans toutes les affaires du pays de manière consciente (Gomès,
1977). Elle regroupe toutes les activités d'éducation pour ceux
qui sont dans la vie active : alphabétisation, cours par
correspondance, cours de perfectionnement, initiation à la production,
loisirs éducatifs et sports (Idem).
En définitive, l'éducation extrascolaire vise la
construction d'un cadre de référence utile pour concevoir un
développement culturel favorable à
l' « éducogénie » c'est-à-dire
« tout ce qui soutient et peut soutenir une formation diffuse,
définie comme la capacité globale de formation propre à un
milieu donné et mesurée par l'ensemble des contributions de
formation de la famille, des classes sociales, de la langue, des moyens de
communication de masse et d'autres institutions culturelles »
(Furter, 1984).
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