2.
Identification des facteurs explicatifs du comportement dysfonctionnel des
auditeurs : une analyse multivariée
Dans le but d'approfondir les résultats ci-dessus, il
est nécessaire que nous procédions à une analyse
multivariée. L'avantage de cette analyse est qu'elle prend en compte les
interrelations pouvant exister entre les variables explicatives. A cet effet,
un modèle « MCO » a été estimé. On tient
à préciser que nous avons effectué quatre
régressions étant donné que notre variable
dépendante est mesurée à travers quatre types de
comportements. Le tableau N° 17 ci-dessous présente les
résultats de l'estimation des paramètres.
Tableau 17: Estimation des paramètres du
modèle
|
Comportements dysfonctionnels des auditeurs
|
Comportement de réduction de la qualité
d'audit (Modèle 1)
|
Mauvaise gestion de l'équipe d'audit
(Modèle 2)
|
Comportement non professionnel (Modèle
3)
|
Sous déclaration du temps
(Modèle 4)
|
B
|
t
|
Sig.
|
B
|
t
|
Sig.
|
B
|
t
|
Sig.
|
B
|
t
|
Sig.
|
Constante
|
-0,923
|
-1,007
|
0,318
|
0,865
|
0,874
|
0,386
|
0,268
|
0,292
|
0,771
|
-0,323
|
-0,300
|
0,765
|
Age de l'auditeur
|
-0,076
|
-0,469
|
0,641
|
-0,194
|
-1,103
|
0,275
|
-0,225
|
-1,385
|
0,172
|
0,423
|
2,214**
|
0,031
|
Type formation
|
0,387
|
1,205
|
0,233
|
0,201
|
0,579
|
0,565
|
0,279
|
0,869
|
0,388
|
-0,275
|
-0,729
|
0,469
|
Expérience en cabinet
|
0,174
|
1,468
|
0,148
|
0,082
|
0,642
|
0,523
|
0,160
|
1,352
|
0,182
|
-0,239
|
-1,715*
|
0,092
|
Pression budgétaire
|
-0,063
|
-0,471
|
0,639
|
-0,154
|
-1,066
|
0,291
|
-0,024
|
-0,179
|
0,858
|
0,354
|
2,248**
|
0,029
|
Pression délai temps
|
0,074
|
0,723
|
0,472
|
-0,056
|
-0,506
|
0,615
|
-0,071
|
-0,697
|
0,489
|
0,220
|
1,830*
|
0,073
|
Relation supérieur-subordonné
|
0,273
|
2,400**
|
0,020
|
0,232
|
1,890*
|
0,064
|
-0,026
|
-0,227
|
0,822
|
0,169
|
1,259
|
0,213
|
Engagement organisationnel
|
0,364
|
2,702***
|
0,009
|
0,364
|
2,505**
|
0,015
|
0,503
|
3,741***
|
0,000
|
0,219
|
1,385
|
0,171
|
Réseau international
|
-0,499
|
-1,741*
|
0,087
|
-0,163
|
-0,527
|
0,600
|
-0,658
|
-2,294**
|
0,026
|
-0,264
|
-0,781
|
0,438
|
|
R-deux ajusté =0,225
F = 3,322*** P =0,004
N=65
|
R-deux ajusté =0,096
F = 1,845* P =0,088
N=65
|
R-deux ajusté =0,225
F = 3,328*** P =0,004
N=65
|
R-deux ajusté =0,154
F = 2,459** P =0,023
N=
|
***, ** et * : Significatif au seuil respectif de
1%, 5% et 10%
Les résultats de l'estimation de ces modèles
révèlent une valeur négative et non significative pour la
variable représentant les facteurs non spécifiés
(Constante) pour les modèles 1 et 4 et une valeur positive et non
significative pour les modèles 2 et 3. Bien plus, la statistique de
FISHER est significative au seuil de 1% pour les modèles 1 et 3 et au
seuil 10% et 5% pour les modèles 2 et 4 avec un R² ajusté de
0,225 pour le modèle 1, de 0,096 pour le modèle 2, de 0,225 pour
le modèle 3 et de 0,154 pour le modèle 4. On note trois
variables significatives avec le premier modèle a différents
seuils, deux avec le deuxième modèle et troisième
modèle, et quatre avec le quatrième modèle. On en conclut
selon les R2ajusté que les variables recensées pour
caractériser les variables indépendantes expliquent à
divers pourcentages les comportements dysfonctionnels des auditeurs de
l'échantillon.
Les résultats de ce tableau révèlent
qu'il existe une relation positive et significative au seuil de 5% entre
l'âge de l'auditeur et les comportements dysfonctionnels de l'auditeur
lorsqu'il est mesuré par la sous déclaration du temps. Ce
résultat signifie que les auditeurs moins âgés ou jeunes
adoptent plus les comportements dysfonctionnels lors des missions d'audits en
sous déclarant les heures de travail. Ce résultat rejoint les
travaux de (Gaddour, 2016) qui avait trouvé que les auditeurs
âgés de plus de 27,8 ans ont moins tendance de s'engager dans des
comportements dysfonctionnels que les auditeurs plus jeunes.
Concernant l'expérience des auditeurs en cabinet, il
ressort des analyses qu'il existe une relation négative et significative
au seuil de 10% entre l'expérience de l'auditeur en cabinet
(Coefficient=-0,239 t=-1,715) et les comportements dysfonctionnels lorsqu'ils
sont mesurés par la sous-déclaration du temps. Ce résultat
signifie que les comportements dysfonctionnels de l'auditeur diminuent
lorsqu'on a à faire aux auditeurs
expérimentés.Cerésultat rejoint les conclusions de (Libby
et Frederick, 1990) et(Ismail et Trotman, 1995) qui avaient trouvé
qu'un auditeur doté d'une expérience de vérification de
plus de quatre (4) ans serait moins enclins aux comportements
dysfonctionnels réducteurs de la qualité d'audit. Ces analyses
permettent de rejeternotre Hypothèse 3 qui
stipule « qu'il existe une relation significative entre
les facteurs de contingence comportementale (tels que l''âge, le type de
formation, l'expérience de l'auditeur) et le comportement dysfonctionnel
des auditeurs »En effet, le type de formation n'a
montré aucune corrélation significative avec les quatre
comportements dysfonctionnels. Ceci peut s'expliquer par le fait que la plupart
des auditeurs quel que soit leur formation initiale, acquièrent une
bonne connaissance en audit que durant leur séjour au cabinet en tant
de collaborateur de CAC.
S'agissant des facteurs contextuels, on constate qu'il existe
une relation positive entre la pression budgétaire (au seuil de 5%), la
pression du délai temps (au seuil de 10%) et les comportements
dysfonctionnels de l'auditeur lorsqu'ils sont mesurés par la sous
déclaration du temps. Ce résultat signifie d'une part, que plus
l'auditeur perçoit une pression intense du délai, plus il
s'engage dans les comportements de réduction de la qualité
d'audit en sous déclarant les heures de travail. D'autre part, une
pression intense du budget temps entraîne les auditeurs a effectué
les heures supplémentaires non déclarées pour achever leur
travail. Ce résultat conforte les travaux de Pierce et Sweeney
(2004) qui avait trouvé quela contrainte budgétaire est
susceptible de pousser les auditeurs à s'engager dans la
sous-déclaration du temps que d'adopter des comportements
réducteurs de la qualité d'audit. Par ailleurs, Gaddour (2016)
dans ses travaux a trouvé qu'il existe une relation positive et
significative entre la sous déclaration du temps et la pression
budgétaire. Kelley et Margheim (1990) quant eux ont mis en
évidence fait que les budgets temps trop serrés peuvent conduire
les auditeurs à adopter les comportements dysfonctionnels. Ce
résultat nous permet de valider l'hypothèse
1 qui stipule« qu'il existe une relation
positive entre les facteurs contextuels(la pression budgétaire, la
pression du budget temps) et les comportements dysfonctionnels de
l'auditeur »
Pour ce qui est de la relation avec le supérieur, on
constate que la perception par l'auditeur d'une bonne relation avec son
supérieur entraine plus de comportements dysfonctionnels lorsqu'ils sont
mesurés par la réduction de la qualité (au seuil de 1%) et
la mauvaise gestion de l'équipe d'audit (au seuil de 5%). Ce
résultat signifie que plus l'auditeur perçoit une bonne relation
avec le manager plus il s'engage dans les comportements dysfonctionnels.
D'où, la validation de l'hypothèse 2 qui stipule
que « la perception par les auditeurs d'une bonne relation
avec le manager influence significativement leurs comportements
dysfonctionnels » toutefois, le sens de ce
résultat est contraire avec celui de Herrbach (2000) et Gaddour (2016)
qui dans leur travaux ont trouvé que la perception par l'auditeur d'une
bonne relation avec le supérieur permet de
réduiresignificativement les comportements dysfonctionnels.En revanche,
les comportements de réduction de la qualité mais entraine plus
de comportements de sous déclaration du temps. Ceci peut s'expliquer par
le fait que le collaborateur en très bonne relation avec le manager
s'engage dans les comportements dysfonctionnel pour garantir la
rentabilité de son cabinet en réduisant la quantité du
travail à effectuer.
En ce qui concerne l'engagement organisationnel, on observe
qu'un faible niveau d'engagement organisationnel de l'auditeur entraine plus de
comportement dysfonctionnel lorsqu'il est mesuré par le comportement de
réduction de la qualité (au seuil de 10%), la mauvaise gestion de
l'équipe (au seuil de 5%) et les comportements non professionnels (au
seuil de 10%). Ce résultat signifie que, les comportements
dysfonctionnels de l'auditeur augmentent significativement lorsqu'il affiche un
faible niveau d'engagement organisationnel. Ce résultat conforte les
travaux de Herrbach (2000) et Gaddour (2016) qui dans leur travaux ont
trouvé qu'un faible niveau d'engagement affectif serait lié
à un niveau de comportements dysfonctionnels élevé et
d'avantage de comportements non professionnel. Ce résultat va
également dans le même sens que les conclusions de Kalleberg
(1990) qui dans son étude avait trouvé que les employés
très engagés déploient plus d'efforts considérables
au nom de l'organisation même si ces efforts ne contribuent pas
directement à la rémunération. Ces analyses nous
permettent de valider l'hypothèse
H4 qui dispose que « Le
comportement dysfonctionnel des auditeurs augmente avec leur niveau
d'engagement organisationnel »
En définitive, la qualité du service rendu par
les professionnels d'audit dépend largement du profil de l'auditeur et
de leur comportement au travail. Globalement, nous avons observé une
relation significativeentre l'âge de l'auditeur, son expérience en
cabinet, la relation supérieur-subordonné, les facteurs
contextuels (pression budgétaire et pression du délai temps), le
niveau d'engagement organisationnel et les comportements dysfonctionnels
lorsqu'ils sont mesurés par les comportements de réduction de la
qualité, la mauvaise gestion de l'équipe d'audit, les
comportements non professionnels et la sous déclaration du temps
passé à la mission d'audit. Toutefois, l'absence de
significativité entre certains facteurs et les comportements
dysfonctionnels ne nous ont pas permis d'effectuer des analyses plus
approfondies.
Ces résultats corroborent avec la théorie des
échanges sociaux qui stipule que le comportement au travail des
individus est fonction de la nature de leurs échanges avec
l'organisation. En effet, lorsque ces échanges sont marqués par
la considération et la valorisation de leurs contributions au travail,
ces derniers sont enclins à développer un niveau d'engagement
organisationnel plus élevé et par conséquent à
adopter moins de comportements dysfonctionnels.
Cette dernière section avait pour vocation d'exposer
les résultats de la régression appliquée sur les quatre
comportements dysfonctionnels de notre étude. Pour ce faire, nous avons
jugé important de commencer d'abord par l'analyse bivariée des
corrélations entre les différentes variables et puis une analyse
multivariées afin d'identifier les facteurs qui expliquent au mieux les
comportements dysfonctionnels de notre étude. Ces analyses nous ont
permis de valider trois hypothèses des quatre préalablement
formulées. La synthèse des différents résultats est
présentée dans le tableau suivant.
Tableau 18: Synthèse des hypothèses et
des résultats de régression
N° de l'hypothèse
|
Intitulé de l'hypothèse
|
Résultats
|
H1
|
Il existe
une relation positive entre les facteurs contextuels (la pression
budgétaire, la pression du budget temps) et les comportements
dysfonctionnels de l'auditeur
|
validée
|
H2
|
La
perception par les auditeurs d'une bonne relation avec le manager influence
significativement leurs comportements dysfonctionnels.
|
validée
|
H3
|
Il existe
une relation significative entre les facteurs de contingence comportementale
(tels que l''âge, le type de formation, l'expérience) et le
comportement dysfonctionnel des auditeurs.
|
Invalidée
|
H4
|
Le
comportement dysfonctionnel des auditeurs augmente avec leur niveau
d'engagement organisationnel
|
validée
|
Au terme de ce chapitre, il était question pour nous
de présenter dans un premiers temps, les résultats de l'analyse
descriptive et puis dans un second temps, les résultats des analyses
explicatives. Ainsi, au cours de la première section, nous avons
présenté d'abord, les caractéristiques des
répondants et puis la synthèse des analyses descriptives des
différentes variables dépendantes et indépendantes de
notre modèle conceptuel. La deuxièmesection quant à elle
nous a permis d'exposer les résultats tirés des analyses de la
corrélation entre les différents facteurs. Ce qui nous a conduits
à la validation de trois hypothèses.
Cette deuxième partie de notre étude s'est
intéressée dans unpremier chapitreà la démarche
méthodologique mise en oeuvre pour conduire l'étude et puis dans
un second chapitre à l'exposition des résultats empiriques de
l'étude.
Tout d'abord dans le premier chapitre, nous avons mis en
évidence la méthode d'échantillonnage et de collecte des
données. Ici, nous avons dit que notre échantillons était
constitué essentiellement de auditeurs exerçant auprès des
cabinets d'expertise comptables agrées membre de l'ONECCAauprès
des quels nous avons collecté les données en utilisant un
questionnaire conçu à partir des étudesantérieure
sur le sujet. Ces données ont été traitées en
utilisant le logiciel d'analyse des données SPSS v20 et les analyses ont
été faites à travers, le tri à plat, l'analyse de
corrélation, la régression linéaire. Dans le
deuxième chapitre, nous avons présenté d'une part les
résultats issus des analyses descriptives et d'autre par ceux issus des
analyses explicatives. Les principaux résultats de ces analyses ont mis
en évidence unimpact crucial des éléments de notre model
conceptuel sur les comportements dysfonctionnels des auditeurs. A savoir,
l'âge de l'auditeur sur l'URT, l'expérience sur l'URT, les
facteurs contextuels (pression du budget et pression du délai temps) sur
l'URT, la relation supérieure-subordonné sur les QTB, et MGE et
le niveau d'engagement organisationnel des collaborateurs avec les QTB, MGE et
CNP.
|
|