II.
PROBLEMATIQUE DE L'ETUDE
Les réflexions menées autour de la
problématique de la qualité d'audit sont nombreuses (DeAngelo,
1981 ; Nichols et Smith, 1983 ; Lennox, 1999 ; Chemangui,
2004 ; Manita, 2005). Cette notion a été
appréhendée à travers l'analyse du profil de l'auditeur et
à travers l'analyse du processus d'audit considéré comme
une boite noire par de nombreux auteurs (Manita, 2005 ;Manita et
Chemangui, 2007). Ces études basées sur la qualité de
l'auditeur se décomposent en deux blocs. Il s'agit des études
identifiant les substituts de la qualité de l'audit et les études
identifiant les comportements réducteurs de la qualité de
l'audit. C'est le second bloc qui nous intéresse dans le cadre de cette
étude. En effet, ce bloc vise à identifier sous un soubassement
comportemental, les comportements des collaborateurs du CAC réducteurs
de la qualité d'audit.
Par conséquent, ces comportements dysfonctionnels de
l'auditeur ont fait l'objet de nombreuses études depuis une trentaine
d'année aujourd'hui. Ces comportements des auditeurs seraient dusselon
Gaddour (2013) et Herrbach (2001) au dilemme coût-qualité
rencontré dans les cabinets d'audit. La littérature semble
regrouper les études sur les comportements dysfonctionnels de la
qualité d'audit en quatre catégories. Il s'agit des comportements
de réduction de la qualité de l'audit, de la sous
déclaration du temps passé à la mission d'audit, des
Comportements Non Professionnels (CNP) et la Mauvaise Gestion de l'Equipe
d'audit (MGE) (Gaddour, 2013 ; Herrbach, 2001 ; Pierce et Sweeney,
2004, 2006).La première catégorie porte sur un ensemble de
comportement spécifié dont chacun est susceptible de
réduire la qualité d'audit (Pierce, 2004). La deuxième
catégorie englobe les comportements dysfonctionnels de l'auditeur
à l'origine des budgets trop serrés qui sont susceptibles de
conduire plus tard à des comportements de réduction de la
qualité (Otley et pierce, 1996a ; Gaddour, 2013). La
troisième catégorie quant à elle traite des manquements
à la dimension du professionnalisme de l'auditeur et enfin, la
quatrième catégorie recouvre les manquements des collaborateurs
d'audit à la responsabilité de gestion de l'équipe d'audit
sur le terrain (Herrbach, 2001).
Par ailleurs, deux types d'étude empirique
caractérisent la recherche sur les comportements dysfonctionnels de
l'auditeur. Il s'agit des analyses descriptives et des analyses explicatives.
Pour ce qui est des études descriptives qui ont débutées
aux USA à la fin des années 1970 et qui se sont limitées
à analyser l'impact d'un aspect particulier sur la fréquence des
comportements de réduction de la qualité de l'auditeur.
S'agissant des analyses explicatives multivariées, elles sont
axées sur la construction des modèles explicatifs plus fournis.
Il ressort de ce deuxième groupe plusieurs variables pouvant être
à l'origine des comportements dysfonctionnels de l'auditeur. On peut
citer : les variables liées à la maitrise du temps (la
pression budgétaire, la pression de délais, les styles
d'évaluation de la performance et le niveau de participation à
l'établissement du budget temps) (Otley et Pierce, 1996b ; Kelley
et al, 1999 ; Pierce et Sweeney, 2004), les variables associées
à la personnalité de l'auditeur (Malone et Roberts, 1996), les
variables organisationnelles (engagement organisationnel et l'intention de
rester) (Otley et Pierce 1996b, Malone et Roberts, 1996) ou bien encore les
variables relatives à l'évaluation des éléments du
contrat psychologique (Herrbach, 2001), ainsi que la culture éthique
dans les entités d'audit (Prat dit Hauret, 2003). Notre étude
s'inscrit dans ce deuxième groupe, plus précisément le
paradigme des recherches empiriques qui cherche à expliquer les
échecs d'audit par les facteurs déterminants de la qualité
d'audit.
En effet, parmi les raisons qui peuvent justifier les
multiples scandales financiers observés dans le milieu des affaires, la
littérature mentionne que l'échec d'audit peut être
expliqué par le manque d'indépendance (Bazerman et al.,
1997 ; Djoutsa et Foka, 2014), par le manque de compétence
(Groverman, 1995 ; Djoutsa et Foka, 2014), l'inadéquation des
méthodes et processus d'audit (Sakka et al., 1998) et à des
comportements dysfonctionnels adoptés par les auditeurs (Herrbach,
2001 ; Gaddour, 2013 ; Foka, 2019). Dans le cadre de cette
étude, nous nous intéressons à un facteur qui a fait
l'objet de plusieurs recherches en Europe, aux Etats-Unis, et dans certains
pays de l'Afrique de l'ouest, mais qui reste à notre connaissance peu
exploré dans le contexte camerounais. Il s'agit des comportements
dysfonctionnels de l'auditeur. Ces comportements dysfonctionnels de l'auditeur
ont été jusqu'à présent considérés
dans un contexte social. En plus de ce contexte social, nous abordons cette
étude sous un angle relationnel comme l'a fait Gaddour (2016) en
mettant en avant la théorie du LMX (leader-member-exchange). Cette
théorie consiste à étudier la relation supérieure
subordonnée à l'effet d'analyser la relation individuel entre le
supérieur (en occurrence le commissaire aux comptes) et chacun de ses
subordonnés (les auditeurs seniors et juniors) sur ces comportements
singuliers. En plus de cette théorie, nous avons eu recours à la
théorie de l'agence de Jensen et Meckling (1976) qui suppose que les
individus dans un environnement inter dimensionnel marqué par la
concurrence et les intérêts contradictoires agissent pour
maximiser l'utilité de leur action. Par ailleurs, nous avons
également utilisé la théorie des échanges sociaux
pour essayer d'expliquer l'influence que peut avoir la nature des
échanges organisation-employés sur l'orientation de leur
comportement au travail. Des lors, l'objet de cette étude est de
déterminer les facteurs qui poussent les auditeurs à adopter les
comportements dysfonctionnels réducteurs de la qualité de l'audit
au Cameroun.
A cet effet, la question principale à laquelle nous
apporterons les éléments de réponse est la suivante :
Quels sont les facteurs susceptibles d'expliquer les comportements
dysfonctionnels des auditeurs au Cameroun ? De
cette question centrale découle quatre questions
spécifiques :
- Quel est l'effet des facteurs contextuels (tels que la
pression budgétaire, la pression du délai temps) sur le
comportement dysfonctionnel des auditeurs ?
- Les comportements dysfonctionnels de l'auditeur sont-ils
influencés par la relation supérieur-subordonné ?
- Les comportements dysfonctionnels de l'auditeur sont-ils
tributaire des facteurs de contingence comportementale ?
- Le comportement dysfonctionnel des auditeurs
dépend-il de leur niveau d'engagement organisationnel ?
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