Chapitre II
Rappelons d'abord que l'idée d'efficience des
marchés trouve son origine dans l'article de Cowles intitulé
« Can Stock MarketForecastersForecast ? ».
Depuis, de nombreux travaux ont semblé montrer que les
prévisions des analystes ne sont pas « rationnelles
» (les analystes commettraient des
erreurssystématiques, c'est-à-dire qu'elles ne leur
serviraient pas à corriger leurs prévisions). Mais les
prévisions des analystes ne sont toutes faites ni au même
moment ni sous la même forme. De plus, des
difficultés économétriques, dues au fait
que les erreurs d'un analyste donné sont corrélées dans le
temps et corrélées avec celles d'autres analystes, rendent les
interprétations malaisées. En appliquant la méthode des
moments généralisés, Keane et Runkel (1998)1 se
singularisent en estimant que les prévisions des analystes ne sont
pas biaisées et qu'elles sont raisonnablement
précises.
Les auteurs d'une étude plus récente
publiée initialement en 1995, sont en désaccord avec ce dernier
point. Ils considèrent les prévisions trimestrielles des
analystes (consensus earningforecasts) portant sur les
bénéfices d'un ensemble (changeant) d'environ 1 200
sociétés de 1973 à 1998. Ils trouvent qu'en moyenne
l'écart entre les prévisions et les résultats
déclarés par les firmes est de 42 % (et ces
résultats ne se sont pas améliorés au cours du
temps) ; il s'ensuit qu'il n'existe qu'une chance sur 170 pour que
l'écart entre une prévision et une réalisation soit
inférieur à 5 % pendant quatre trimestres
consécutifs. Ces conclusions sont pourtant contestées par Brown
(1996)2 qui trouve que les bénéfices prévus ne
sont pas trop élevés (par rapport aux réalisations) et,
surtout, qu'ils sont plus précis que ceux résultant d'un
modèle naïf (le prochain bénéfice sera égal au
dernier). En admettant que les prévisions des analystes soient peu
précises et même biaisées, cela ne signifie pas pour autant
que les marchés sont inefficients. Le vrai test
consiste à vérifier si, en suivant leurs recommandations, il est
possible de les « battre systématiquement
».
La majorité des résultats portant sur les
prévisions des analystes que nous venons de citer laisse penser que
les marchés sont efficients et qu'il n'est pas possible
d'utiliser avec profit
des informations après leur publication.
1 Keane etRenkel 1998 « Are Financial Analyst
`Forecasts of Corporate Profits Rational?» Journal of Political Economy
,768-805
2 Brown LD 1996 « Analyst Forecasting Error and
There Implication for security Analysis :An Alternative Perspective « ,
Financial Analyst Journal, janvier-février
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