B.- Définition juridique des comportements
illégaux et légaux :
1. Des comportements illégaux
38. Les comportements considérés par la loi
fiscale comme « illégaux », entraînent l'application de
sanctions fiscales et, le cas échéant, de sanctions
pénales, en fonction du comportement en cause. Ces comportements peuvent
être d'une fraude fiscale ou d'un abus de droit et/ou d'un acte anormal
de gestion. (Ils s'agissent d'un comportement délibéré de
la part des contribuables, en violent délibérément les
dispositions de la loi fiscale, avec l'intention de ne pas payer les
impôts qu'ils doivent, soit en s'abstenant de soumettre une
déclaration de leurs bénéfices ou en soumettant une
déclaration incomplète ou fausse).
39. Commet une fraude fiscale le contribuable qui s'est
soustraite ou qui tente de se soustraire à l'établissement ou au
paiement des impôts. Sont constitutifs de fraude fiscale, l'omission
volontaire de déclaration dans les délais, la dissimulation
volontaire de revenus ou de patrimoine, ou encore l'organisation volontaire de
son insolvabilité1.
40. La loi distingue deux types d'abus de droit :
- L'abus de droit par simulation : ce sont
des actes déguisés ou fictifs tels qu'un acte de vente à
moindre coût afin de dissimuler une donation passible de droits
d'enregistrement élevés ;
- L'abus de droit par fraude à la loi
concerne le fait de recourir à un montage juridique
afin de contourner l'objectif poursuivi par le texte dans un
but exclusivement fiscal. L'acte juridique signé par le contribuable est
réel, formellement conforme à la loi, mais motivé par un
objectif contraire à celui du législateur, dans le seul but
d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales qui seraient
normalement supportées eu égard à la situation de la
contribuable ou à ses activités réelles.
2. Des comportements légaux
41. Un comportement légal ou
considéré légitime est un acte conformément
à la loi, tel que l'évasion fiscale qui se base sur
l'élimination par le contribuable du paiement de l'impôt, du fait
qu'il profite de certains des lacunes de la législation fiscale, sans
qu'il y ait violation des
1 Antoine DULIN, rapport les
mécanismes de l'évitement fiscal, leurs impacts sur le
consentement à l'impôt et la cohésion sociale, 13
décembre 2016, p.17
24
textes légaux (dont le législateur est
responsable pour atteindre certains objectifs économiques et
sociaux).
42. Au sens intermédiaire le plus fréquemment
retenu la fraude légale permet d'éviter l'impôt selon trois
modalités :
- Soit la loi fiscale aménage
elle-même la fraude légale par un régime fiscal de faveur,
le contribuable prend connaissance de ce régime et en
bénéfice compte tenu de son activité.
- Soit plus simplement, le contribuable
s'abstient d'accomplir l'activité, l'opération ou l'acte
taxable.
- Soit enfin, la fraude légale se
produit par la manipulation des failles du système fiscal ce qui permet
au contribuable de se soustraire à certaines obligations en
matière d'impôt sans contrevenir à la loi. Elle se
ramène à l'habilité fiscale ou au choix de la voie la
moins imposée1.
Il y a aussi une évasion fiscale résultant du
manque de clarté du texte fiscal.
43. La fraude et l'évasion sont un
phénomène très complexe posant de sérieuses
problématiques non seulement sur le plan national mais également
sur le plan international.
3. Cadre juridique de l'évasion fiscale a.-
L'élément légal
44. L'élément matériel de l'évasion
fiscale est représenté dans les actes suivants :
- Délivrance ou production de factures
fictives ;
- Production d'écritures comptables
fausses ou fictives ;
- Vente sans factures de manière
répétitive ;
- Soustraction ou destruction de pièces
comptables légalement exigibles ;
- Dissimulation de tout ou partie de l'actif de
la société ou augmentation frauduleuse
de son passif en vue d'organiser son insolvabilité.
45. Le législateur marocain n'a pas
précisé les méthodes de fraude dans le domaine fiscal,
mais certaines jurisprudences considèrent qu'il s'agit d'un manquement
au devoir de
1 Aicha BELMANÇOUR, la fraude fiscale au Maroc,
Master spécialisé en Droit de l'entreprise, Novembre 2008,
p.17-18
25
confiance que la loi impose aux autorités fiscales dans
les déclarations et documents qui leur sont soumis par l'administration
fiscale1.
b.- L'élément moral
46. L'infraction d'évasion fiscale exige la
présence d'un élément moral représenté dans
l'intention d'induire en erreur pour atteindre un objectif illégal.
Cet objectif est représenté dans le sens de
l'intention du fraudeur de se débarrasser complètement ou
partiellement de la taxe qui lui est imposée légalement.
La définition exclusive d'évasion fiscale par
le critère de légalité, a été
proposée par les fiscalistes et les pénalistes. Pour P.-M
GAUDEMET2, l'évasion consiste à «
éluder l'impôt en tournant intentionnellement la loi fiscale mais
sans la violer 3».
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