F.- Le prix de transfert
120. La mondialisation et l'ouverture des frontières,
d'un côté présent des avantages indéniables pour les
économies réglementées et organisées, capables de
faire face à une concurrence intense.
En revanche, la faiblesse de certaines entreprises moins
compétitives à un impact négatif sur les recettes fiscales
marocaines.
121. Les multinationales disposent de nombreux moyens pour
pratiquer l'évasion fiscale, la problématique des prix de
transfert est l'un des principaux vecteurs de l'évasion fiscale.
1. Concept du prix de transfert a.-
Définition
122. Plus que 60% des échanges mondiaux sont le fait
d'entreprises multinationales. Ces entreprises opèrent dans plusieurs
Etats. Elles y exercent leurs activités par l'intermédiaire,
essentiellement, de succursales et de filiales. Ces dernières se
livrent, entre elles, à des opérations d'achats et de ventes de
biens et de services. Les prix auxquels ces opérations sont
échangées sont appelés prix de transfert2.
123. Selon la définition de l'OCDE, les prix de
transfert sont « les prix auxquels une entreprise transfère des
biens corporels, des actifs incorporels, ou rend des services à des
entreprises associées ». Alors, le prix de transfert porte sur
l'échange de biens, de prestations de services, d'usages de brevets, de
marques, de réseaux de distribution.
124. Plus simplement, le prix de transfert ou prix de cession
interne est le prix des transactions entre sociétés d'un
même groupe et résidentes d'Etats différents,
c'est-à-dire des transactions intragroupes avec passage d'une
frontière. Ces transactions portent sur des actifs matériels
(achats et ventes de marchandises) ou immatériels (concession de brevets
ou
1Salah Eddine SALHI et Abdellah ECHAOUI, op.cit.,
p27
2Abdellatif ZAGHNOUN, Directeur Général
des Impôts, Prix de transfert et fiscalité internationale,
Allocution, Casablanca le 28 juin 2011, p.2
48
de marque), des transferts financiers (prêts, octrois de
garantie) ou des prestations de services (recherche et développement,
comptabilité, gestion des ressources humaines)1.
125. L'une des principales contraintes sur le plan fiscal, du
fait de la mondialisation, est liée aux prix de
transfert2.La plupart des pays qui ont
réalisé leurs effets cherchent à déterminer qui
paie l'impôt dans les transactions internationales entre succursales
d'une même entreprise.
L'augmentation du nombre de multinationales qui recherchent
constamment de nouvelles opportunités d'investissement avec des gains
avérés est à l'origine de cet intérêt accru
pour les prix de transfert.
b.- Cadre juridique des prix de transfert
126. Le prix de transfert est encadré par le droit
fiscal interne marocain et la convention de non double imposition de l'OCDE.
§ Droit fiscal interne :
Pouvoir d'appréciation de l'administration :
Article 213 para. 2 du CGI3 :
127. Cet article retient le terme «
dépendance » et ne fait pas référence à la
notion de « prise de possession ».
Les effets de cet article concernant, en plus des
opérations transfrontalières, les relations maroco-marocaines.
Les informations dont dispose l'administration constituent une
méthode de référence en cas d'absence de comparables.
Le texte dispose : sont rapportés au «
résultat fiscal » et / ou « chiffre d'affaires
déclarés ». Droit de communication :
Article 214 para. 3 du CGI
1Guillaume MARQUIS, Evasion fiscale : la
problématique des prix de transfert dans l'union Européenne,
Mémoire, op.cit., p.7
2Abdellatif ZAGHNOUN, ibid., p.1
3«II. Lorsqu'une entreprise a directement ou
indirectement des liens de dépendance avec des entreprises
situées au Maroc ou hors du Maroc, les bénéfices
indirectement transférés, soit par voie de majoration ou de
diminution des prix d'achat ou de vente, soit par tout autre moyen, sont
rapportés au résultat fiscal et/ou au chiffre d'affaires
déclarés.
Les bénéfices indirectement
transférés sont déterminés :
ü Par comparaison avec ceux des entreprises similaires
ü Ou par voie d'appréciation directe, sur la base
d'informations dont dispose l'administration.
49
128. L'administration des impôts peut
demander à l'entreprise imposable au Maroc
communication des informations et documents relatifs :
- À la nature des relations liant
l'entreprise imposable au Maroc à celle située hors du
Maroc ;
- À la nature des services rendus ou
des produits commercialisés ;
- À la méthode de
détermination des prix des opérations réalisées
entre les entreprises
dépendantes et les éléments qui la
justifient ;
- Aux régimes et aux taux d'imposition
des entreprises situées hors du Maroc.
A défaut de réponse, le lien de
dépendance est supposé établi.
§ Les conventions de non double imposition
:
129. Le principe de pleine concurrence est décrit
à l'Article 9 du Modèle de convention fiscale de
l'OCDE1 et constitue la base des traités bilatéraux
conclus entre les pays de l'OCDE eux-mêmes mais aussi avec de nombreux
pays non-membres2.
1. Explication et exemple
Où vient le prix de transfert ?
130. Dans la réalité, ces prix sont artificiels.
Leur manipulation est la première forme d'utilisation des paradis
fiscaux, pour mieux comprendre, ces prix appliqués à ces
échanges
1 1. Lorsque
a) une entreprise d'un État contractant participe
directement ou indirectement à la direction, au contrôle ou au
capital d'une entreprise de l'autre État contractant, ou que
b)les mêmes personnes participent directement ou
indirectement à la direction, au contrôle ou au capital d'une
entreprise d'un État contractant et d'une entreprise de l'autre
État contractant, et que, dans l'un et l'autre cas, les deux entreprises
sont, dans leurs relations commerciales ou financières, liées par
des conditions convenues ou imposées, qui diffèrent de celles qui
seraient convenues entre des entreprises indépendantes, les
bénéfices qui, sans ces conditions, auraient été
réalisés par l'une des entreprises mais n'ont pu l'être en
fait à cause de ces conditions, peuvent être inclus dans les
bénéfices de cette entreprise et imposés en
conséquence.
2.Lorsqu'un État contractant inclut dans les
bénéfices d'une entreprise de cet État-- et impose en
conséquence -- des bénéfices sur lesquels une entreprise
de l'autre État contractant a été imposée dans cet
autre État, et que les bénéfices ainsi inclus sont des
bénéfices qui auraient été réalisés
par l'entreprise du premier État si les conditions convenues entre les
deux entreprises avaient été celles qui auraient
été convenues entre des entreprises indépendantes, l'autre
État procède à un ajustement approprié du montant
de l'impôt qui y a été perçu sur ces
bénéfices. Pour déterminer cet ajustement, il est tenu
compte des autres dispositions de la présente Convention et, si c'est
nécessaire, les autorités compétentes des États
contractants se consultent.
2 Abdellatif ZAGHNOUN, ibid., p.3
50
transfrontaliers entre des filiales dépendant d'un
même groupe devraient être équivalents à ceux que
pratiqueraient des entreprises indépendantes. La logique qui s'applique
est simple : localiser les charges dans les pays à forte
fiscalité et les profits dans les pays à maigre taxation. Les
relations commerciales et donc les prix de transfert entre filiales d'un
même groupe aboutissent à maximiser le bénéfice.
131. S'agissant de l'évasion fiscale,
qu'elles pratiquent via notamment la manipulation de leurs prix de transfert,
aucune exhortation éthique interne ou externe ne les freinera s'il n'y a
pas de règles contraignantes assorties de lourdes sanctions en cas de
non-respect1.
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