1.2. Problématique
La dégradation des sols cultivés constitue l'une
des principales contraintes de l'agriculture en Haïti. Cette situation met
en péril la durabilité de la production agricole et, par
conséquent, la sécurité alimentaire des populations qui
dépendent, presqu'à 92 % du secteur agricole (MARNDR, 2010). On
estime que 63% des terres sont devenues improductifs (infertile) sous l'effet
de la baisse du taux de matières organiques qui se sont perdues par la
dégradation du sol qui est engendrée par plusieurs facteurs (Fred
Douca, 2001, Cité par Adrien, 2018). La mise en culture de plus en plus
rapprochée diminue les temps de jachère, provoque le
surpâturage et favorise la dégradation des sols. Il est aussi
important de noter qu'environ 50 % du pays ayant une pente supérieure
à 40% et le déboisement due à une forte dépendance
au bois (bois de feu et charbon bois), cause de sérieux problèmes
d'érosion et conséquemment entraine gravement la perte de
fertilité des solspar la baisse de la matière organique dans le
sol (MARNDR, 2013).
Des mesures scientifiques de l'érosion pour Haïti
sont rares. L'étude de la Banque Mondiale sur la gestion des ressources
naturelles en Haïti de 1990 cite des estimations sur les pertes de terre
pour certains bassins versants allant de 7,5 à 750 TM/ha./an. Le rapport
indique par ailleurs que des pertes de l'ordre de 12 à 150 TM/ha./an
peuvent être observées dans de nombreuses régions du pays.
La perte annuelle en terre pour l'ensemble du pays est évaluée
à environ 37 millions de TM. Ceci correspond à une perte moyenne
avoisinante de 15 TM/ha./an à l'échelle du pays.
A Haut-Limbé, l'agriculture est la principale
activité oùse repose l'économie de la plupart des gens de
la zone. La formation de petits agriculteurs à faible revenu de la
plupart des petites familles rurales, continuent à cultiver des
méthodes traditionnelles ou de subsistance. Leur proportion de la
population économiquement active consacrée à l'agriculture
est de 59% et leurs moyens de subsistance dépendent des environnements
marginaux (FAO, 2012). Cependant, les activités agricoles se
réduisent de plus en plus parce qu'on ne peut pas trouver de rendement
satisfaisant au niveau des plantes cultivées particulièrement la
culture du maïs à cause de la baisse de la fertilité des
sols qui régit par la baisse de la MOS.
Au cours des années de 2016-2018, les travaux de
recherche de Adrien et alont montrés clairement que la
quantité de matière organique dans les sols à
Haut-Limbé ne dépasse pas 1% environ. Cet appauvrissement en
matière organique dans le sol dans la zone d'étude engendre des
apparents problèmes qui sont d'ordre agro-socio-économique.
Sur le plan agronomique :
En se référant sur la relation entre les plantes
cultivées et le sol, sous l'influence des techniques agricoles et les
conditions climatiques qui agissent sur cette relation, la baisse de
matière organique dans la zone est causée par :
- Les Mauvaises pratiques
culturales :certains agriculteurs de la zone d'étude
n'ont pas l'habitude de renouveler les éléments nutritifs du sol
soit par des apports de fertilisant organique, soit en laissant se
décomposer les résidus de culture (chaume maïs par exemple)
sur la parcelle. Ils les utilisent comme fourrage parfois en exportant hors de
la parcelle, ou ils pratiquent le brûlis.Il faut signaler encore que les
agriculteurs dans la zone ne pratiquent pas la jachère de façon
normale pour régénérer l'état du sol et de la
productivité initiale. La mauvaise gestion du travail du sol notamment
le labour de façon répétée par les agriculteurs.
L'absence de jachère, la mauvaise succession et rotation culturale
influencent grandement la fertilité du sol donc la baisse de
matière organique dans le sol.
- Les Pertes de la couche arable du
sol : l'érosion est le principal
phénomène qui entraine la dégradation des sols par le
déplacement de la couche arable. Une estimation a été
faite que la perte de la couche arable à Haut-Limbé
s'étend entre 0-3 t/ha/an (Val, 2015 cité par Payoute, 2017).
L'abattage des arbres, un facteur occasionnant l'érosion, se fait sentir
de plus en plus à Haut-Limbé. Certains agriculteurs travaillent
sur des pentes qui mesurent plus de 50% en moyenne, ce qui n'est pas favorable
à les cultiver au risque d'érosion car la pluviométrie de
cette zone dépasse environ 2000 mm par an. Une estimation est faite que
l'érosion des sols à Haut-Limbé atteint jusqu'à 85%
de la surface (MARNDR, 2010). Cela amoindrit la productivité des sols et
diminue les rendements des plantes cultivées
- Faible résilience des cultures
particulièrement celle du maïs : Les plantes
cultivées dans la zone n'ont pas l'aptitude de robustesse contre les
aléas climatiques (période de sècheresse, la hausse et la
baisse de température, problèmes liés à l'eau et du
sol) dû à la baisse de matière organique dans le sol.
A travers ces indications agronomiques, l'appauvrissement du
sol par la baisse de la matière organiqueprovoque la réduction de
plus en plus de la fertilité.Cela influence grandement de manière
décroissante le rendement des plantes cultivées dans la zone
notamment la culture du maïs donc la production alimentaire dans la zone.
Tout cela amène à une insuffisance alimentaire pour les habitants
à Haut-Limbé qui pratique une agriculture de subsistance.
Sur le plan social :
La baisse de matière organique dans le sol provoque des
conséquences sur le plan social qui affectent les conditions de vie des
habitants dans la communauté. De celles-ci, on peut
évoquer :
- Exode rural : il est dû
à l'accroissement considérable de la population face à la
baisse de la productivité agricole dans la zone. Ce qui entraine
l'abandon des parcelles par certains agriculteurs pour aller ailleurs notamment
dans les villes.
- Expansion de la crise écologique ou
environnementale : il est dû par l'abattage
systématique des arbres pour la construction d'habitats, de confection
de meubles (Daveson Val, 2015, cité par St-Martin Kenson, 2018), et
aussi pour faire du charbon dans le but de compenser les besoins primaires de
leurs familles.
La satisfaction des besoins primaires particulièrement
le besoin alimentaire quotidien, pousse certains gens de Haut-Limbé
à la recherche de meilleure condition de vie soit en se
déplaçant vers d'autre villes du pays ou à
l'extérieur du pays pour mener des activités pouvant perturber
l'environnement comme la coupe des arbres.
Sur le plan
économique
L'agriculture est l'activité principale dans la
communauté de Haut-Limbé d'où l'économie de cette
localité repose sur les activités agricoles.Par
conséquent, la baisse de matière organique du sol
provoque :
- Faible productivité des
cultures : rareté des produits agricoles, impact des
maladies et attaques insectes, augmentation du taux d'importation des produits
agricoles.
- Crise financière :
elle est fonction de la diminution de la production locale ce qui occasionne de
l'inflation des prix des produits donc tout cela entraine la
décapitalisation ou dépression économique des agriculteurs
dans la zone.
La baisse de matière organique dans le sol entraine une
grande baisse de la productivité agricole dans la zone de
Haut-Limbé, ce qui engendre économiquement, la hausse des prix
des produits agricoles sur le marché ; puisqu'il y a la
rareté de ces produits. Parfois les agriculteurs ne peuvent même
pas réussir à obtenir l'argent qu'ils ont dû
dépenser comme coût de production ce qui entraine leur
décapitalisation.
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