Le contrat de partenariat en droit positif camerounaispar Cédric Prosper EYEBE NANGA Université de Yaoundé 2 - Diplôme des Études Approfondies 2010 |
PARAGRAPHE II :LE CONTENTIEUX IMPLICITE AU JUGE ADMINISTRATIFDans sa thèse portant sur« La Compétence de la Juridiction Administrative au Cameroun », Jean Calvin ABA'A OYONO, en parlant du contrat administratif, notera que le caractère imparfait du droit positif camerounais qui règne sur l'absence d'une définition générale du contrat administratif est marqué par deux faits majeurs. D'une part le mutisme de la loi et d'autre part la carence du droit jurisprudentiel. Du mutisme de la loi, il procède que c'est au paroxysme des lueurs des sources formelles du droit écrit ( c'est-à-dire les lois et les textes réglementaires ) que s'incubent les précisions des régimes juridiques des contrats administratifs. Ita est dans le droit positif français des contrats administratifs par détermination de la loi. A contrario l'ordre interne du droit public camerounais est sous-tendu, hormis, l'objet d'une réglementation rigoureuse en ce qui concerne la législation sur les marchés publics, par l'imprécision des lois contentieuses. Toute chose qui dénote selon cet auteur l'idée d'un défaut d'acceptation textuelle de la notion du contrat administratif. Au décryptage de la carence du droit jurisprudentiel, malgré la reforme des lois contentieuses intervenues en 2006, le législateur a semblé mutatis mutandis repris le serpent de mer de l'implicite privé dans le dispositif de l'article 2 alinéa 2152(*). Toute chose qui est de nature à prévisager l'attitude d'un juge administratif à adopter « une approche réductionniste de la norme réglementaire dans la définition du contrat administratif justifié par le fait parcellaire que le marché public n'est qu'une présentation pratique du contrat administratif et ne saurait par conséquent rendre compte de sa réalité globale »153(*) . Toutefois force est de constater que cette imperfection est désormais corrigée par le sens donné à l'entendement du contrat administratif par le juge administratif camerounais dans le jugement avant dire droit de l'affaire « UM NTJAM »154(*).Cette considération a donc eu comme portée juridique à étendre la sphère de la compétence de ce juge dans les matières litigieuses . Le contrat de partenariat considéré comme tel au regard de l'obéissance de son régime juridique à cette catégorie de contrats, offre des sphères d'attraction prétorienne de compétence du juge de part sa connaissance du contentieux de pleine juridiction dans les contrats administratifs (A) mais également de part sa connaissance du contentieux de l'excès de pouvoir qui s'émeut au contrat de partenariat(B). A- SA CONNAISSANCE DU CONTENTIEUX DE PLEINE JURIDICTION DANS LA MATIERE DES CONTRATS ADMINISTRATIFS Il est naturellement admis que c'est au juge administratif qu'appartient la connaissance du contentieux des contrats administratifs. La connaissance de ce contentieux est intimement liée par l'analyse des critères particuliers qui meublent l'éligibilité aux contrats administratifs. Ainsi la connaissance de ce contentieux imparti au juge administratif constitue selon l'expression reconnue au Pr. Joseph OWONA des attractions prétoriennes de compétence155(*) . C'est-à-dire qu'il subsiste des domaines contentieux entrouvertes, auxquels l'initiative audacieuse du juge administratif peut se faire prévaloir ou s'imposer ; qui de part la nature de règles et du contexte du droit public ambiant convoque que l'on se réfère exclusivement à son office. S'il apparait compréhensible selon la majorité de la doctrine de droit public camerounais que l'improductivité de la jurisprudence administrative semble d'inhérence liée à l'incompatibilité de la formation de son juge, elle ne saurait cependant refouler son office dans la matière générale du contentieux de pleine juridiction. Le contentieux de pleine juridiction est manifeste en l'espèce parce qu'il interpelle au juge du contrat de procéder à l'examen minutieuse des prétentions des parties. Il est de ce fait assimilé au contentieux de l'atteinte des droits subjectifs. A ce propos les moyens de droit et de fait peuvent être invoqués et recevables dès lors qu'ils sont susceptibles d'avoir une influence sur l'issue du litige. Toute situation juridique qui permet de se rendre compte que le juge administratif dans la pleine juridiction dispose de pouvoirs étendus, venant mêmeconcurrencer celle du juge de l'excès de pouvoir où ce dernier doit se borner à rechercher si l'acte qui lui est déféré est conforme à la légalité. Le juge de pleine dans le contentieux des contrats administratifs lui, requiert le pouvoir de statuer sur l'interprétation des obligations des parties ; de relever d'office l'incompétence ou l'impossibilité pour une autorité administrative de signer un type de contrat, de relever l'utilisation d'une procédure de passation non prévue parla loi, d'annuler des mesures prises par la personne publique contractante en l'encontre du cocontractant ou de résilier le contrat à la demande des deux parties. Cet état de chose est bien transposable au contrat de partenariat. Toutefois l'attractivité de la compétence du juge administratif qui vaut dans ce cadre procède de la summadivisio relatif à l'examen du pouvoir de ce juge. Ainsi le champ de prédilection des pouvoirs du juge administratif s'analyse suivant qu'il s'agisse du pouvoir d'injonction (1) ou qu'il relève du pouvoir d'annulation (2) s'instituant au contentieux des contrats administratifs. 1- le pouvoir d'injonction la question du pouvoir d'injonction pose en sus la problématique de l'exécution des décisions du juge administratif , notamment en matière de plein contentieux, lorsque la décision du juge doit être exécuté en l'encontre de la personne privée au bénéfice de l'administration, le juge estime que le problème se règlera généralement de lui-même, par le fait que l'administration dispose à l'égard de ceux-ci de pouvoirs suffisamment puissants pour que des moyens de contrainte spécifiques se révèlent inutiles156(*) . Quant aux décisions d'exécution prise par le juge à l'encontre des personnes publiques, la formule s'est souvent fidéliser à l'argumentaire que « s'il appartient au juge de constater les obligations réciproques des parties, il ne saurait intervenir dans la gestion du service public en adressant sous une menace de sanctions pécuniaires des injonctions »157(*) dénotant ainsi l'atteinte portée au principe de séparation de l'administration active et de la juridiction administrative. Le pouvoir d'injonction est donc un pouvoir d'exécution qui dès lors s'applique lorsque l'administration doit exécuter un jugement ou un arrêt. Il ne s'applique pas aux décisions ne nécessitant aucune mesure d'exécution, ni aux décisions non juridictionnelles des tribunaux. Si cette question semble désormais résolut dans le droit positif français avec l'importante loi du 8 février 1995 qui accorde au juge administratif un pouvoir d'exécution et qui généralise le pouvoir de prononcer des astreintes contrel'administration ; l'analyse du pouvoir d'injonction dans les litiges concernant les contrats administratifs dans l'environnement du droit positif camerounais semble problématique.car enlisé directement par les velléités sociologiques et indirectement liée aux influences politiques faisant du juge administratif « uncomplice de l'administration » Comme l'affirme T.B. NKOTTO « Le pouvoir d'injonction à l'encontre des personnes publiques administratives, relève donc de la compétence des tribunaux judiciaires de grandes instances qui l'exercent comme le montre l'affaire NGUENA »158(*) .Transposé au contentieux des contrats de partenariat, le pouvoir d'injonction se verra d'application difficile, et ceci pour une double raison : · Le dispositif juridique régissant le contentieux de ces contrats a en lui-même réglé cette question en privilégiant la résolution des différends soit par la tentative du règlement amiable, soit que les parties recourent à l'arbitrage juridictionnel sous les auspices de la CCJA. · En outre même dans les hypothèses que le contentieux soit régler devant le juge administratif dont l'hypothèse de la pleine juridiction, la plus certaine et plausible se limiterait qu'au seul cas de la résiliation du cocontractant(partenariat public-public) ; l'on s'interrogera sur l'attitude à adopter du juge administratif camerounais. Enjoindra-t-il des recommandations à l'encontre de l'Etat portant sur l'objet de remplir ses obligations financières par exemple ou de payer les indemnités dus au cocontractant ? Toute chose qui aura pour conséquence, à ses dépens et du risque d'empiéter sa crédibilité à l'égard des investisseurs étrangers. En tout état de cause le juge administratif ne saurait biaiser sa judicature liée au pouvoir d'injonction au risque de ne jamais produire une jurisprudence dans la matière des contrats de partenariat. Toute chose qui aux antipodes du pouvoir d'annulation. 2- le pouvoir d'annulation L'examen du pouvoir d'annulation dans le recours de pleine juridiction en matière contractuelle, constitue l'un des artifices le plus complet de l'expression de son office. Car amenant le juge administratif statuant sur la recevabilité du recours, à procéder à l'examen au fond du litige relative à l'objet soit d'annulation des mesures d'exécution de l'administration contractante ou soit annuler la décision de résiliation prise par celle-ci à l'égard du cocontractant étant entendue qu'une telle résiliation constitue l'une des mesures résolutoire sanctionnant le non respect des clauses du contrat du titulaire cocontractant. Le juge du contrat exerce donc une jurisdictio en opportunité pour prononcer l'annulation de tels recours. Qu'en sera-t-il donc de ce pouvoir d'annulation dans le contentieux des contrats de partenariat, lorsque la personne cocontractante intentera un recours portant sur l'objet de l'annulation de la résiliation du contrat ? Car en vertu de l'article 39 du texte réglementaire traitant de leur contentieux :« Le contrat de partenariat peut être résilié par la personne publique concédante, soit pour faute grave du cocontractant, soit pour des motifs d'intérêt général... » Qu'adviendra-t-il de l'appréciation ou de la décision que le juge administratif saisi d'un tel recours aura à statuer sur la régularité de la résiliation de la personne publique concédante ; lorsqu'il est asserté selon la doctrine que la résiliation administrative constitue une prérogative de puissance publique reconnu en l'endroit de la personne publique (considéré comme seule juge garant pour assurer le service public)159(*). En l'occurrence, le droit jurisprudentiel camerounais consultatif au contentieux des marchés publics, donne déjà un sens à cette préoccupation. Dans un jugement frais datant du 12 septembre 2012 le juge administratif des marchés publics annule la décision de résiliation du ministre des travaux publics au motif que celui-ci « a commis un excès de pouvoir » condamnant par la suite l'administration technique à la réparation du préjudice subit de la société CARMCO160(*). Ita est du contrat de partenariat qui se situe à l'intermédiarité des contrats de concession de service public. En effet dans cette matière le pouvoir d'annuler les décisions de résiliation trouve son fondement au fait qu'il considère que le concessionnaire de service public a le droit de demander que l'administration tienne le plus grand compte des investissements qu'il a été amené à réaliser et quepar la suite, elle ne prononce pas à la légère les résiliations irrégulières et éventuellement couteuses pour la collectivité. En outre et de manière générale, le conseil d'Etat français a étendu ces solutions aux contrats de longue durée ayant pour objet la réalisation et l'exploitation d'ouvrages nécessitant des investissements importants, dont l'amortissement doit être effectué pendant toute la durée de l'exploitation et comportant pour le cocontractant de l'administration des garanties analogues à celles accordées aux concessionnaires de service public ou de travaux public1 . La détermination de ces solutions apparaît dans une large mesure s'adapter au contrat de partenariat auquel la personne publique concédante confie la mission globale du projet d'investissement sur une longue durée. Le cocontractant se chargeant donc de la conception des ouvrages à réaliser ; de participer au financement dudit projet ; de l'entretenir ou le maintenir ; de l'exploiter ou le gérer. De même, ces solutions sauront trouver un écho favorable de leur réception par le juge de la chambre administrative camerounaise. Quid du contentieux en recours pour excès pouvoir ? B -SA CONNAISSANCE DU CONTENTIEUX DE L'EXCES DE POUVOIR EMOUVANT AU CONTRAT DE PARTENARIAT L'incidence du recours pour excès de pouvoir dans l'étude du contentieux du contrat de partenariat, tient lieu dans ce cadre, en ce qu'il met en évidence la contestabilité de la légalité contractuelle. Ainsi ,contrairement à la pleine juridiction dans laquelle le juge du contrat procède au règlement des prétentions des parties liée à la cause des droits subjectifs ; le juge de l'excès de pouvoir dans la sphère contractuelle est amené à régler le litige au fond en procédant soit à l'annulation d'une décision unilatérale soit alors un contrat qui viole la légalité s'il est passé sans respecter les conditions de validité requise et même entre frappé de nullité absolue. Simplement dit, le juge de l'excès de pouvoir par l'office de sa compétence aux contrats administratifs est le juge reconnu pour statuer sur le contentieux objectif du droit de ces contrats. A cet effet, les conclusions du commissaire ROMIEU dans l'arrêt TERRIER qui est apparu comme une jurisprudence de principe sont à grande suffisance illustratifs. Il affirmera que « Tout ce qui concerne l'organisation et le fonctionnement des services proprement dits, généraux ou locaux, soit que l'administration agisse par voie de contrat, soit qu'elle procède par voie d'autorité, constitue une opération administrative au point de vue des litiges de toutes sortes auxquels elle donner lieu » .En l'occurrence c'est à l'effet de la défection ou de la violation de la légalité contractuelle que ce dernier est interpellé à statuer de manière objective au regard de la situation juridique du contrat outrepassant parfois même l'objet du recours à l'issue de l'instance. Cette logique est manifeste sous la plume d'une certaine doctrine publiciste qui pense que « L'opposition entre le contrat et recours pour excès de pouvoir vientdu fait que ce recours est destiné à protéger les situations juridiques générales et impersonnelles, par contre le contrat crée une situation juridique individuelle dont la violation ne peut constituer par elle-même l'excès de pouvoir, qui ne peut jamais être la violation d'une règle de droit objectif, loi ou règlement »161(*).En d'autres termes, cette opposition disparait lorsque les actes unilatéraux détachables du contrat portent atteinte à la légalité objective, ou encore lorsque le contrat ne se bornant plus à créer des situations subjectives contient des clauses qui au sens matériel, sont de nature réglementaire. Ce sera d'ailleurs sous le prisme l'institution de la question préjudicielle que l'article 14 alinéa 2et 3 sur la nouvelle loi organisant les tribunaux administratifs au Cameroun « Qu'obligation leur sera faite lorsqu'ils se trouvent devant une difficulté d'interprétation ou d'appréciation de la légalité d'un acte législatif ou réglementaire, de surseoir à statuer et à renvoyer la question devant la chambre administrative de la cour suprême qui doit rendre un avis sur la difficulté à elle déféré dans les trois mois de sa saisine »162(*) En effet la nature de l'institution du contrat de partenariat est pourvu dans la catégorie des délégations de service public ; ce qui permet que l'on puisse recevoir l'interprétation selon laquelle le contrat de partenariat semble être caractérisé par une légalité contractuelle ambiante .Car le fait est que sa définition élabore que l'Etat ou toute autre collectivité publique confie au partenaire privé la responsabilité totale ou partielle d'un projet d'investissement relative à la kyrielle de mission de conception d'ouvrages ;de financement ;de maintenance ou d'entretien ; d'exploitation ou de gestion. Ces opérations contractuelles non étrangères et même traditionnel aux contrats de délégant la gestion ou la fonctionnement de service public à l'instar de la concession ou de l'affermage, sont de nature à illustrer ou susciter des actes détachables (1) voire même induire de clauses réglementaires (2) dont la violation pourra automatiquement ouvrir droit à un recours en excès pouvoir susceptible d'être traité par son juge. 1- Le recours pour excès de pouvoir avec la recevabilité de l'acte détachable La notion des actes détachables est relative aux décisions administratives dont la légalité peut être appréciée du contrat. Il en est ainsi qualifié les actes dont qui bien que pris dans le cadre des opérations contractuelles, apparaissent suffisamment individualisés pour que leur validité puisse faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir. Cette théorie prend toutefois en compte le fait que, le contrat en réalité comporte un double aspect : d'une part il est une opération conventionnelle, d'autre part qu'il comporte une série de décisions unilatérales émanant de l'administration. La recevabilité des recours en de pouvoir avec la notion de la détachabilité des actes tirant leur conformité du contrat principal, consacré par l'arrêt MARTIN fut en réaction à l'idée que le juge statuera la fin de non recevoir des recours en annulation des décisions administratives qui en vertu des conclusions d'une jurisprudence bien établie de la chambre administrative de la cour suprême du Cameroun « Qu'il lui appartient seulement de rechercher si ces actes sont intervenus dans les conditions de nature à ouvrir au profit de l'entrepreneur privé un droit à indemnité »163(*) mais les conclusions du commissaire ROMIEU apparaissent pourtant claires « l'annulation de l'acte détachable n'aura et ne pourra avoir par elle-même aucun effet direct sur le contrat auquel le juge de l'excès de pouvoir ne peut toucher : les parties resteront liées tant que le juge n'aura pas été saisi : à ce moment et seulement alors le juge du contrat ... examinera les conséquences de l'irrégularité des actes administratifs sur les rapports contractuels des parties dans les circonstances de l'affaire »164(*)Ainsi l'esprit de synthèse nous amène à constater que les sentiers de recevabilité de recours pour excès de pouvoir sont certaines à l'égard de son juge qui, n'exerce dans cette échéance qu'un office restrictif. Il en sera ainsi des actes pris préalablement à la passation du contrat ; des actes de passation et d'approbation du contrat ; de certaines actes pris lors de l'exécution du contrat. Revenu donc, à questionner le droit positif camerounais, la notion de l'acte détachable va être consacré par le juge de la chambre administrative dans le jugement la Compagnie Forestière Sangha Oubangui (CFSO). La nourrice de l'intellect de la doctrine de droit public camerounais qui va consacrer des développements dans cette affaire, établiront à rendre compte la réalité contextualisée, de la démarche entreprise par le juge administratif pour éclairer cette notion. En l'espèce le Pr. NLEP constatera que « le juge administratif camerounais... admet implicitement que l'acte par lequel le Ministre de la fonction publique détache un fonctionnaire auprès d'une firme privée en vertu d'un contrat est un acte détachable de contrat »165(*). Plus tard l'auteur des contrats de l' administration au Cameroun ayant relevé l'ancrage jurisprudentiel de l'acte détachable dans plusieurs autres jugements de ladite chambre administrative, conclura que « le juge national n'a à la connaissance, jamais usé de l'expression acte détachable, et l'examen de sa jurisprudence où cette notion apparait de manière implicite, mais nécessaire montre qu'il s'agit d'actes émanant d'une autorité autre que celle engagée dans le rapport de droit initial ... Le constat qui s'impose est que le juge national a une conception organique de la détachabilité »166(*). Si donc le juge des contrats de partenariat s'affilie à la réception de cette ligne directrice foisonnant l'ancrage du droit jurisprudentiel camerounais relative à ces contrats, il est possible qu'il se déclare compétent pour recevoir des recours en excès de pouvoir en violation des critères d'éligibilité dans la phase de la passation du contrat de partenariat. En l'occurrence, la dérogation de l'administration contractante de recourir par la commande publique au contrat de partenariat en dehors de l'urgence ou la complexité du projet constitue « une rupture de juridicité »selonABA'A OYONO167(*). Car l'attitude malfaisante de la personne pourra être remise en cause du fait que celle-ci aura préféré l'option contractuelle de la régie intéressée, de la concession de service public, de l'affermage ou encore du marché public empiétant à cette occasion la légalité des contrats de partenariat. Il en sera de même des recours à lui intenté, quant à l'objet d'annuler les actes d'approbation ou de passation de ce contrat. Le conseil d'Etat français considère d'ailleurs que, l'acte d'approbation par l'autorité hiérarchique ou de tutelle ne pose pas problème, mais que l'acte de conclusion soit détachable résulte d'une distinction subtile, s'agissant de la signature elle-même168(*). En conséquence de ceci, le juge administratif des contrats de partenariat pourra s'inspirer de cette solution en transposant cette réalité pertinente, pour contester la légalité des actes de conclusion ou de passation de ces contrats, soit pour incompétence ou pour détournement de pouvoir de l'autorité administrative à conclure des contrats de partenariat169(*). D'ailleurs depuis 2007, il désormais possible selon une jurisprudence française que, par le recours en appréciation de validité « le contrat peut désormais être attaqué directement par les concurrents évincés »170(*). Enfin certains actes pris lors de l'exécution du contrat du contrat de partenariat pourront également faire l'objet de recours pour excès de pouvoir. Il en sera ainsi de l'exemple du refus de résiliation du contrat de partenariat à la demande du cocontractant comprise, dans l'hypothèse du règlement amiable ; le juge français considère que cet acte viole non pas le contrat en lui-même, mais il est appelé à statuer suivant les règles générales171(*). L'impériosité de l'application de la théorie de l'acte détachable dans l'étude du droit du contentieux des contrats administratifs en général et en particulier au cas du contrat de partenariat, prévisage une survie fébrile et un état précaire. Cette fébrilité est sérieusement limitée au principe des privilèges de l'action publique dont dispose l'administration contractante tout au long de la vie du contrat, et qu'elle ne saura y renoncer. Car rien n'empêche à ce que l'administration contractante se déroge de la manoeuvre des règles de publicité ou de concurrence dans la passation du contrat lorsque le projet éligible au contrat de partenariat a été à l'initiative du partenaire privé172(*).Quant à sa précarité, elle est légitimé au fait que le recours pour excès n'aboutit pas a fortiori à l'annulation du contrat mais à l'acte détachable ; le contrat bien que continuant sa survie, il apparait paradoxal si l'acte détachable est l'une des conditions de validité du contrat à l'instar de l'autorisation de la tutelle du MINATD requise pour les CTD ou encore d'un exécutif communal qui conclut un tel contrat sans l'approbation de l'organe délibérant. Le contrat de partenariat risque donc être en situation de précaire car à la moindre difficulté, l'une des parties pourra invoquer cette irrégularité et saisir le juge du contrat qui prononcera aussitôt la nullité5. 2- Le recours pour excès de pouvoir avec la recevabilité des clauses réglementaires La théorie des clauses réglementaires est celle communément propre aux concessions de service public, parce que l'on considère que la collectivité publique cède un service public à l'autonomie de gestion par le tiers cocontractant. Il y va dans cette catégorie de contrat, que le caractère contractuel de l'acte découle de son mode de conclusion et régit les engagements respectifs, mais dans ses effets il est contredit par la portée normative qui lui est attachée, et qui en fait une source de droit vis-à-vis des tiers. Ainsi, contrairement à l'acte détachable, nous nous retrouvons dans la situation inverse : la légalité d'un acte administratif unilatérale est contestée parce que cet actea violé une disposition contractuelle. Le recours en excès de pouvoir dirigé contre l'acte ne peut aboutir, car le contrat est considéré comme ne faisant pas partie de la légalité objective ; il ne concerne que les relations juridiques entre parties. Il ne fait par conséquent, naitre aucun droit au profit des tiers, et seules l'une d'elles pourra éventuellement déférer cet acte devant le juge du contrat. C'est ainsi affirmer que la problématique du recours pour excès de pouvoir contre les clauses réglementaires dans un contrat pose en amont le problème de la violation de la règle de droit tel qu'il ressort de l'arrêt MARTIN. LAURENT RICHER relèvera à ce propos que « Le problème réside aussi dans le distinguo entre clauses réglementaires et clauses contractuelles. Les clauses réglementaires sont celles qui sont relatives aux conditions d'organisation et de fonctionnement du service public ; a contrario celles contractuelles restent d'autorité inter partes selon l'article 1134 du code civil »173(*) .En conséquente l'exception est restreinte et ne concerne que les concessions de service public ; désormais depuis l'arrêt CAYZEELE, le conseil d'Etat français admet que la clause réglementaire est contestable devant le juge de l'excès de pouvoir174(*). Cette dialectique apparait bien se transposer au régime des contrats de partenariat. Car, s'il est apparu à notre sens, d'admettre que le contrat de partenariat, épouse la conceptualisation qui sied à la délégation de service public, l'intérêt parait double. Premièrement, parce qu'une tellequalification aura l'avantage d'unifier le droit des contrats impliquant la délégation de service public à celui du régime des contrats de partenariat. Une telle unification étendra la notion de gestion déléguée par voie contractuelle à celle reconnue à la concession ou l'affermage. Deuxièmement, une telle application porte l'avantage d'unifier le droit du contentieux du recours en excès de pouvoir aux contrats de partenariat avec la théorie des clauses réglementaires propres aux concessions de service public. Cette logique trouve son justificatif parce que, la phase d'exploitation ou de gestion du projet, marque la période de la plénitude du fonctionnement du service public, qu'exerce le partenaire cocontractant. Cette gestion dudit service public par le partenaire privé, peut être sujette à la prise de mesures administratives, susceptibles de porter une atteinte aux droits des tiers (usagers). De ce fait, il est probable que des tiers intentent des recours en annulation contre de telles mesures devant le juge administratif. En somme l'on ne saurait avoir une vue globale au cas particulier et de manière spécifique, rendant compte la réalité du droit du contentieux des contrats de partenariat sous un prisme de lege feranda. D'autant plus qu'il n'existe de jurisprudence expérimentée. Toutefois, les travaux expérimentaux ayant porté sur le séminaire de formation des juges administratifs relatif au contentieux des contrats de partenariat au Cameroun175(*), constitueront sans doute la nourrice mamelle au socle juridique de leur contentieux dans une perspective de lege lata. L'architecture du régime du droit du contentieux des contrats de partenariat au Cameroun exalte une structuration nouvelle, aux antipodes des modes de résolution de leurs litiges traditionnellement institués aux contrats administratifs. Ce particularisme semble être justifié et légitimé quant à la nature même du ce contrat. D'une part c'est un contrat inscrit dans le long terme ; d'autre part c'est un contrat nécessitant d'énormes investissements. Ainsi, la principauté du règlement de l'arbitrage OHADA qui semble être consacré dans la résolution des litiges relatifs au contentieux des contrats de partenariat, apparait répondre aux vertus de l'institution del'arbitrage (célérité du procès, confidentialité). En effet, la volonté des parties de recourir à une convention d'arbitrage ou une clause compromissoire constitue uninstrument juridique indispensable dans l'optique qu'elle permet non seulement d'aménager le cadre propice d'une justice privée ainsi que sauvegarder les investissements consentis.Ces raisons expliquent dès lors que, le contentieux devant le juge administratif soit envisagé que de manière exceptionnelle. * 152 Loi N° 2006/022 du 29 décembre 2006 fixant organisation et fonctionnement des Tribunaux administratifs. * 153 J-C ABA'A OYONO, thèse précitée, p.159. * 154 CS/CA jugement ADD du 31 aout 2005, UM NTJAM c/Etat du Cam (MINEF). * 155 Cité par Magloire ONDOA cours polycopié de contentieux administratif, 3eme année Licence, Droit public,Université de Yaoundé II (soa), 2007-2008. * .156Pr. SANDEVOIR, le recours de pleine juridictionRep. Cont. Adm. Dalloz ,avril. 2000, p.38-39 * 157 CE 27 janv.1993, le Loir, Rec.p. 136. S. 1933.III.p.132,Concl. DETTON. * 1581_ T.B.NKOTTO, thèse précitée, p.518 * 159 R-G SCHWARTZENBERG, L'autorité de la chose décidée, LGDJ. 1969, p.63. * 160 CA/CS Jugement n°145/2012 du 12 sept. 2012 , Société CARMCO contre Etat du Cameroun (MINDCAF). * 161 M.WALINE, note sous CE.5 Jan. 1924, Compagnie industriel du gaz et de l'Electricité. c/Compagnie de REMIREMONT,D.1926,p.45 * 162 C.KEUTCHA TCHAPNGA in LaReforme attendue du Contentieux Administratif au Cameroun : A PROPOS DE LA LOI N° 2006/022 du 29 décembre 2006 fixant L'ORGANISATION ET FONCTIONNEMENT DES TIBUNAUX ADMINISTRATIFS, p.9. * 163 Jugement N°110/90-91 du 30 mai 1991, Ent. AMSECOM ASECOM (TAMEGHI Boniface) c/ Etat du Cam, note J-C ABA'A OYONO, thèse précitée. * 164 Arrêt MARTIN, 4 aout 1905, Rec. 849, concl. ROMIEU, S.1906, III, p. 49,note HAURIOU. * 165 R-G NLEP, note sous CS/CA jugement du 27oct. 1988, CFSO c/ Etat du Cam. PENANT n° 806, 1991. p. 283 * 166 T.B. NKOTTO, thèse précitée, p.514 * 167 J-C. ABAA OYONO, in LE contentieux des contrats de partenariat, séminaire de formation sur « lecontentieux des contrats administratifs », KRIBI du 28 Nov au 1erDec. 2011, POOL CENTRE-SUD-EST, P.A.J, Pjet 10eme FED * 168 CE. 20 mars 1973, Ministre de l'Aménagement du Territoire, AJDA 1973, 366, note DUFAU. * 169 Article 19 de la Loi de 2006 fixant Le Régime Général des Contrats de Partenariat. * 170 Arrêt « Sté TROPIC Travaux Signalisation » du 16 juillet 2007, Voir aussi Arrêt « SMIRGEOMES » du 03 oct. 2008 ( référé précontractuel pour manque aux obligations de publicité et de concurrence, Art.551-1 551-2 du Code de justice administrative française). * 171 CE, 24 avr.1924, SALIC, Rec. 239 ; AJDA 1964 308, concl. COMBARNOUS et la chro. p.293 ; D 1964, 665, note DEBBASCH. * 172 Art 5 alinéa 2 du DECRET du 24 janv. 2008 précisant les modalités d'application des Contrats de partenariat. * 173 L. RICHER, Droit des Contrats administratifs, 8e éd., LGDJ 2012, p. 234 * 174 CE, 10 juillet 1996, arrêt CAYZEELE. En l'espèce un tiers a été admis à demander directement l'annulation des clauses réglementaires se détachant du reste du contrat ; mais le recours fut rejeté au fond au motif que « Aucune disposition législative ou réglementaire n'interdisait d'imposer aux immeubles collectifs colonies, restaurants, l'acquisition de conteneurs en rapport avec le vol de déchets » * 175 DOCUMENT PEDAGOGIQUE, séminaire de formation sur « Le contentieux des contrats administratifs », KRIBI, du 28 novembre au 1 décembre 2011, POOL CENTRE, SUD et EST, P.A.J, projet ( 10eme FED N° Europeaid /127791/D/SERM/CM). |
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