Le contrôle de constitutionnalité des lois et actes ayant force de lois sous l'empire de la constitution du 18 février 2006par Derrick KAMBALE MULYATA Université de Kinshasa - Graduat 2018 |
1.2.4 1. Le contrôle par voie d'actionPar ce contrôle dit objectif, le requérant demande directement au juge l'annulation de la loi pour inconstitutionnalité. Il s'agit donc d'un procès objectif ou abstrait fait à la loi. La loi inconstitutionnelle sera annulée ex tunc c'est-à-dire qu'elle sera supposée n'avoir jamais existée et cette annulation vaut erga omnes c'est-à-dire à l'égard de tous les citoyens qui en bénéficient45(*). Lorsqu'il est prévu, le contrôle de la constitutionnalité par voie d'action, la loi qualifiée d'inconstitutionnelle est directement déférée devant une juridiction chargée de contrôler la constitutionnalité. Au cas où la juridiction se prononce en faveur de l'inconstitutionnalité, elle prononce l'annulation pure et simple de la loi46(*). La décision s'impose à tous et bénéficie d'une autorité absolue de la chose jugée. Ce contrôle est exercé devant une juridiction ordinaire ou spéciale (la Belgique, le Benin, le Burkina Faso, la France, le Gabon, le Mali, le Niger, la République Centrafricaine, la République Démocratique du Congo, la République du Congo ou la République Sud-Africaine). 1.2.5 2. Le contrôle par voie d'exceptionLa technique d'exception d'inconstitutionnalité s'entend d'une obligation faite au juge ordinaire qui doute de la constitutionnalité d'une loi et parfois d'une autre règle de droit de surseoir à statuer sur le litige à trancher et de saisir la cour spéciale de la question de la constitutionnalité de la loi : c'est la procédure de contrôle concret de la constitutionnalité des lois. L'on peut affirmer, en outre, que l'exception constitue la meilleure manière de faire trancher une difficulté constitutionnelle par un juge mais à la condition que cette dernière ait un lien évident avec l'issue du litige principal. Et ce qui distingue ainsi l'exception dans le modèle américain d'avec la même notion dans les autres modèles, en ce que cette exception peut être résolue par n'importa quel juge devant lequel elle est soulevée. A la différence du contrôle par voie d'action, le contrôle par voie d'exception est subjectif ou encore concret. Il s'effectue au cours d'un litige, l'une des deux parties demande au tribunal de ne pas faire application de la loi évoquée par l'autre, l'estimant contraire à la Constitution. On parle alors de l'exception d'inconstitutionnalité47(*). Il n'intervient qu'incidemment devant un juge de fond au cours d'une instance et, à titre d'une exception soulevée comme moyen d'accusation ou de défense. Assuré au moyen d'une exception d'inconstitutionnalité, ce contrôle n'aboutit pas à l'annulation d'une loi reconnue inconstitutionnelle mais plutôt à son application dans l'instance en cours. Il s'ensuit qu'une loi jugée inconstitutionnelle par cette voie ne cesse pas d'exister dans l'ordre juridique ; elle pourrait, cependant, être appliquée dans une autre affaire. L'autorité de la chose jugée étant relative dans un contrôle, l'institution d'un tribunal spécial n'est pas nécessaire, le juge ordinaire pouvant valablement s'en occuper48(*). Dérivée du contrôle de constitutionnalité par voie d'exception, la question préjudicielle de constitutionnalité a pris du temps pour être reconnue en France. Elle augure une procédure en vertu de laquelle une personne (physique ou morale) partie à une instance demande, par l'entremise du juge de fond, la vérification par le juge constitutionnel de la constitutionnalité d'une loi. La requête se présente sous forme d'une nouvelle demande qui vient se greffer sur un moyen principal. La question préjudicielle de constitutionnalité est susceptible d'être soulevée devant toutes les juridictions relevant de l'ordre administratif ou judiciaire. La même exception peut être soulevée par le demandeur et même le défendeur49(*). Saisi d'une telle question, le juge ordinaire sursoit à statuer et transmet au juge constitutionnel la question préjudicielle aux fins de la vérification de sa conformité à la Constitution. Cette transmission se fait par les soins de deux plus hautes juridictions de l'ordre administratif (Conseil d'Etat ou de l'ordre judiciaire (Cour de cassation) qui assurent une sorte de filtrage, ce qui peut allonger inutilement la procédure. Dépourvues du pouvoir d'appréciation de la justesse ou non de la question préjudicielle de constitutionnalité, les juridictions de jugements doivent s'en remettre au juge constitutionnel qui seul peut en apprécier la pertinence.50(*). Le système américain de mise en oeuvre d'une question préjudicielle de constitutionnalité quant à lui, rend compétent tout juge saisi d'une telle demande, de se prononcer. Très complexe dans son maniement, la question préjudicielle de constitutionnalité permet aux particuliers de saisir, indirectement, le juge constitutionnel pour attaquer des lois déjà promulguées.51(*) Une autre variante du contrôle de constitutionnalité par voie d'exception est la question préalable de constitutionnalité qui se démarque de deux autres variantes, en l'occurrence la question préjudicielle et prioritaire de constitutionnalité. À la différence de la question préjudicielle de constitutionnalité qui conduit à la surséance par le juge de fond, en attendant la décision du juge constitutionnel saisi à cet effet, la question préalable de constitutionnalité confère au juge de fond un rôle plus actif. Celui-ci est, en effet, obligatoirement tenu de se prononcer sur la demande relative à la question avant toute décision de fond. L'évocation d'une question préalable de la constitutionnalité amène le juge à se prononcer prioritairement avant l'examen de tout autre moyen connexe ou annexe. Cette requête n'est pas portée devant un juge spécial (juge constitutionnel au sens classique) mais plutôt au même juge de droit commun. * 45 DJOLI ES'ENGEKELI (J.), Droit constitutionnel, t. 1, Principes structuraux, Kinshasa, EUA, 2010, p. 151 * 46ESAMBO KANGASHE (J-L.), Le Droit constitutionnel, Academia Bruylant, Louvain-la-Neuve, 2010, op cit p. 85 * 47DJOLI ES'ENGEKELI (J.), Droit constitutionnel, t. 1, Principes structuraux, Kinshasa, EUA, 2010, op cit, p. 152 * 48ESAMBO KANGASHE (J-L.), Le Droit constitutionnel, Academia Bruylant, Louvain-la-Neuve, 2010, op cit p. 88 * 49 Idem p. 89 * 50ESAMBO KANGASHE (J-L.), Le Droit constitutionnel, Academia Bruylant, Louvain-la-Neuve, 2010, op cit p.85 * 51Idem p. 90 |
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