L'etat-actionnaire dans une société issue de l'OHADA. Cas de Congo Airways société anonyme avec conseil d'administrationpar Anthony NTENDELE BIKELA ISC - Liège - MBA 2021 |
2.1.2.2. L'activité règlementée : autorisation du législateur communautaire de l'OHADA.Il est normalement du domaine du droit administratif de règlementer la situation de l'Etat car, c'est ce droit qui détermine sa politique et définit d'une manière générale, les règles de sa mise en oeuvre. En pratique, il est évidement inconcevable que l'on mette l'Etat et un particulier sur le même pied d'égalité. Mais telle n'est pas la vision du législateur OHADA qui a voulu mettre les sociétés et leurs propriétaires au même pied d'égalité sans tenir compte de leur caractère, industriel ou commercial, public ou privé. Seulement, le même législateur veut que lorsque l'activité exercée par la société est règlementée, ladite société doit se conformer aux règles particulières auxquelles l'activité est soumise (article 21 de l'AUSCGIE). A ce titre, les règles de droit administratif et de droit aérien sont appliquées chez Congo Airways de manière subsidiaire mais très contraignante. Sur le plan purement opérationnel, la société est appelée à fonctionner au strict respect des règlements RACDs25(*) édictés par l'Autorité de l'aviation Civile26(*) aux standards de l'OACI27(*), lesquels règlements complètent la loi n° 10/014 du 31 décembre 2010 relative à l'aviation civile qui, elle aussi, n'abroge pas toutes les dispositions non contraires de l'ordonnance n° 62-330 du 27 septembre 1952 relative aux servitudes aéronautiques, du décret du 15 décembre 1953 régissant la création des zones interdites de survol, de l'ordonnance n° 62/321 du 8 octobre 1955 relative à la navigation aérienne, de l'ordonnance-loi n° 78-009 du 29 mars 1978 portant règlementation des conditions générales d'exploitation des services aériens ainsi que de plusieurs autres actes règlementaires portant mesures d'applications aux textes sus énumérés28(*). L'exploitation de l'aviation civile est une matière strictement et amplement réglementée, de sorte que les tâches sont à conduire suivant des règles détaillées, préconçues et préétablies. Sur ce registre DIBEMBA TSHIMANGA (2014, p. 40) mentionne que « Grand, est donc l'étonnement des non-initiés (...) de découvrir, dans un domaine où les crédos sont : le risque zéro n 'existe pas » et « la sécurité est la règle d'or, que les activités de base et les moindres détails de l'exploitation aéronautique sont codifiés dans les conventions internationales, les annexes à la convention de Chicago, les lois et les règlements nationaux, voire dans les instructions et procédures techniques et opérationnelles ». La particularité de la réglementation aérienne est d'autant plus intéressante qu'elle consacre, selon DIBEMBA TSHIMANGA (2015, p. 284) une séparation des tâches, laquelle est doublée et se renforce par une complémentarité de l'objectif, en ce sens que des limites, des provisions réglementaires spécifiques sont disponibles en direction de chaque intervenant (intervention) principal (e), voire de chaque intervenant (intervention) d'appui, sans méconnaître l'existence des garde-fous devant permettre de parer à toute défaillance d'une intervention. Il sied de noter à cet effet que la bonne exécution des tâches milite en faveur d'une responsabilisation individuelle couplée, généralement d'un garde-fou censé reprendre la main en cas de défaillance : c'est la raison d'être d'un couplage des fonctions ou de la redondance. C'est dans ce sens que s'inscrit notamment l'intérêt du co-pilotage des aéronefs. Les exemples de la complémentarité dans le système sont légion, notamment des situations de décès du pilote commandant de bord et la reprise en main de l'équipage par le copilote. C'est le cas du vol CF-61 du « Continental Airlines », opéré par un Boeing 777 reliant Bruxelles à New York, avec 247 passagers a pu atterrir sans encombre le 18 juin 2009, malgré le décès en plein vol du pilote commandant de bord survenu pendant le survol de l'océan Atlantique, grâce à l'intervention du copilote. Un autre cas est celui du 12 mars 1997, sur un A-320 de « Gulf Air », le pilote commandant de bord a fait une crise cardiaque à l'aéroport d'Abou Dhabi au moment critique du décollage. Le 8 mai 2000, un avion de ligne de « China Airlines » a effectué un QRF (retour d'urgence sur plateforme) avec le copilote aux commandes, après une crise cardiaque sévère qui a terrassé le pilote commandant de bord. De même, un copilote de « Continental Airlines » a posé l'avion le 21 janvier 2007, avec 210 passagers, sur la liaison Texas vers une station Balnéaire Mexicaine, après un malaise du pilote commandant de bord qui, va succomber dès l'atterrissage ». Eu égard à ce qui précède, lorsque la loi n°10/014 du 31 décembre 2010 relative à l'aviation civile disposent en ses articles 102, 113, 118 point 6, 62 et 95 alinéa 2, par exemple que « nul ne peut exercer les fonctions de personnel aéronautique s'il n 'est titulaire d'une licence en cours de validité » ;que « l'exercice des activités de transporteur aérien public est subordonné à la détention d'une licence d'exploitation et d'un certificat de transporteur aérien » ; que « l'exploitation du transport aérien international est ouverte aux entreprises capables de prouver leur capacité de maintenir un niveau de sécurité d'exploitation au moins équivalent aux normes de l'OACI » ; que « tout exploitant d'aéroport élabore et met en oeuvre un programme d'entretien en vue de maintenir la piste et les installations dans un état qui ne nuise pas à la sécurité, à la régularité et à l'efficacité de la navigation aérienne » ;que « les services de la circulation aérienne sont dotés des installations de télécommunication aéronautique, d'aides radio à la navigation et de système de surveillance nécessaires pour les opérations de décollage, croisière, approche et atterrissage » : il s'agit des prescriptions qui s'appliquent distinctement à Congo Airways comme à d'autres membres de l'industrie aéronautique et dont la mise en oeuvre par chacun contribue et renforce la sécurité aérienne. Toujours sur plan opérationnel, Congo Airways est soumise à une supervision duale. Au niveau national et au niveau international. 2.1.2.2.1. La supervision au niveau nationalPar ordre d'importance, deux entités exercent la supervision fonctionnelle de la sécurité aérienne en RD Congo à laquelle Congo Airways est soumise : il s'agit du Gouvernement de la République, qui engage directement l'Etat et l'Autorité de l'aviation civile, qui est un organisme placé sous la tutelle duGouvernement via le Ministère des transports et voies de communication. 2.1.2.2.1.1. La supervision de la sécurité aérienne fonctionnelle à charge duGouvernementLes engagements internationaux, en l'occurrence ceux repris dans la convention de Chicago, incombent à l'Etat, agissant par le biais de son gouvernement. Celui-ci est donc l'entité politiquement et administrativement responsable de la mise en oeuvre des dispositions conventionnelles et des SARPs sur le territoire de l'Etat. Aussi, il dispose du pouvoir réglementaire, de la définition et la conduite de la politique de la Nation dans le secteur de l'aviation civile. Dans cette perspective, suivant l'ordonnance n°20/017 du 27mars 2020 fixant les attributions des ministères du Gouvernement de la RD Congo, le ministère des transports et voies de communications, ayant le secteur de l'aviation civile dans son domaine de compétence, a pour mission organisation et gestion des transports aérien, (...) ; élaboration de la politique nationale des transports ; étude pour l'organisation et le développement des activités du sous-secteur des auxiliaires des transports (...) ; étude et élaboration des normes en matière de conditionnement et d'emballage des marchandises pour le transport (...) ; octroi des titres d'exploitation et de sécurité de transports et auxiliaires. A côté de ces attributions spécifiques, le ministère dispose des attributions reconnues communes à tous les ministères du gouvernement, lesquelles sont prévues à l'article 1er point A de la même ordonnance. Aussi, le décret portant statut de l'AAC, place celle-ci sous la tutelle du Gouvernement, qui dispose en plus de la supervision politique et administrative (sectorielle) sur l'ensemble des activités du secteur de l'aviation civile. En résumé, le Gouvernement assure « la supervision de la supervision ». S'il faut donner un condensé, les prérogatives de l'exécutif dévolues au Gouvernement consistent, outre sa responsabilité politique, aux fonctions de conception des politiques aériennes, de la réglementation, de la représentation de l'Etat vis-à-vis des organisations internationales, de la supervision et de l'administration générale du secteur et du contrôle des activités et des organismes du secteur. Les textes réglementaires spécifiques, en application de la loi n° 10/014 du 31 décembre 2010, reconnaissent au Gouvernement, statuant par décret (du premier ministre) ou par arrêté du ministre ayant l'aviation civile dans ses attributions, de prendre un certain nombre d'actes, le cas de l'ordonnance fixant les zones interdites ; du décret portant délimitation des services officiels autorisés à opérer dans les aérodromes ouverts à la circulation aérienne publique et frontaliers29(*), des textes fixant les conditions de circulation dans les zones à accès réglementée des aérodromes, etc.30(*) * 25 En vertu du RACD 00, les Règlements RACDs constituent les mesures d'application de la loi 10/014 du 31/12/2010 relative à l'aviation civile et la complètent, ils contiennent les normes et pratiques recommandées de toutes les annexes actualisées à la Convention de Chicago relative à l'aviation civile internationale ; ils sont complétés par les procédures, procédures d'applications, des guides et autres documents réglementant l'activité aéronautique en République Démocratique du Congo diffusés par l'Autorité à l'usage des exploitants et autres professionnels de l'aéronautique. * 26 L'Autorité de l'Aviation civile est un établissement public créé par le décret n° 011/29 du 10 juin 2011 du Premier Ministre. Elle a pour mission légale l'administration, la règlementation technique et la supervision de la sécurité de l'aviation civile en vertu de l'article 6 alinéa 1er de la loi n° 10/014 du 31 décembre 2010 relative à l'aviation civile. * 27 L'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) est une institution spécialisée des Nations Unies établie par les États en 1944 pour gérer et administrer la Convention relative à l'aviation civile internationale, entendue ici, la Convention de Chicago. L'organisation oeuvre de concert avec les 192 États signataires de la Convention et des groupes du secteur à l'établissement d'un consensus sur des normes et pratiques recommandées (SARP) et des politiques en matière d'aviation civile internationale servant de base à un secteur de l'aviation civile sûr et efficace, dont le développement soit économiquement durable et écologiquement responsable. Ces SARP au nombre de 19 et les politiques sont utilisées par les Étatsmembres de l'OACI pour s'assurer que leurs opérations et réglementations locales d'aviation civile sont conformes aux normes mondiales, ce qui permet au réseau mondial de transport aérien d'exploiter plus de 100 000 vols par jour, en toute sécurité et avec efficacité dans toutes les régions du monde. En outre, l'OACI coordonne l'assistance et le renforcement des capacités pour les États, en appui à de nombreux objectifs de développement de l'aviation ; produit des plans mondiaux pour coordonner les progrès stratégiques multilatéraux dans les domaines de la sécurité et de la navigation aérienne ; suit de nombreuses mesures de performance du secteur du transport aérien et en rend compte ; et effectue des audits des capacités de supervision de l'aviation civile des États dans les domaines de la sûreté et de la sécurité. * 28 Il convient de signaler que, les textes valant règlements applicables en RDC dans le secteur de l'aviation civile sont nombreux et ils ne peuvent pas être exposés de manière exhaustive à ce point de notre étude. * 29 La matière est régie notamment par le décret n° 036/2002 du 28 mars 2002 portant désignation des services et organismes publics habilités à exercer aux frontières de la RD Congo, lequel texte est couplé à l'arrêté-interministériel n°68/2001 du 6 novembre 2001 portant modalités de contrôle des personnes et de leurs biens par les services publics dans les postes frontaliers, les installations portuaires, ferroviaires et aéroportuaires de la RD Congo et par le décret n°12/032 portant réglementation du contrôle des personnes, bagages, fret et véhicules dans la zone de sûreté aéroportuaire (JORDC n° 20 du 15 octobre 2012, colonne 34) * 30 La réglementation de cette matière, qui renvoie toujours à la sûreté aéronautique, comprend l'arrêté départemental n° CAB/TRANSCOMS/409/010/80 du 15 juillet 1980 portant règlement d'accès aux zones réservées des aéroports et aérodromes de la RD Congo. En outre, le Ministre prend des arrêtés dans le cadre de la délivrance de la licence d'exploitation (LE), d'autorisation d'exploitation des aérodromes privés et dans diverses matières où la compétence lui est réservée par les lois et règlements. |
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