2.2.15.3.5.2 L'intégration politique
Ce sous-domaine de l'intégration se penche sur les
principes et les fondamentaux de la gestion du vivre ensemble au sein de la
communauté nationale. Il s'intéresse au cadre constitutionnel, au
respect des institutions de la République, à ses règles de
fonctionnement, à l'organisation des pouvoirs publics, à
l'expression des opinions et des choix des citoyens. Il invoque les notions de
patrie, de patriotisme, de civisme, de sanctuarisation et de défense du
territoire national et des institutions de la République, mais aussi
celles de décentralisation, de gouvernance locale, de droits et devoirs
des citoyens et des droits de l'Homme en général.
Il s'agit, au niveau de l'Etat, de garantir
l'intégrité du territoire national, de le défendre contre
toutes les menaces, d'assurer la connaissance et le respect des institutions,
symboles et dispositifs juridiques de l'Etat, mais également, de
garantir son caractère unitaire et décentralisé.
Relèvent de ce thème les questionnements tels que : les
dispositions étatiques de diffusion des instruments juridiques
(constitutionnels, législatifs, réglementaires...) concernant
l'organisation et le fonctionnement de l'Etat ; les dispositions visant
à garantir les libertés des citoyens ainsi que l'expression de
leur citoyenneté ; les initiatives susceptibles d'encourager et de
promouvoir, sur le plan politique, le vivre ensemble ; - les mesures
destinées à assurer la défense du territoire national
contre les agressions extérieures, mais aussi, à combattre les
éventuelles velléités centrifuges ou menace de
l'intérieur ; - la gestion des frustrations et revendications
sociopolitiques légitimes ; l'état des lieux de la
décentralisation et des mesures d'accompagnement ou de
responsabilisation ou d? « empowerment » des collectivités
territoriales décentralisées.
L'attitude des citoyens dans le domaine politique renseigne
sur la connaissance par eux des textes fondamentaux et leur appropriation de
ceux-ci, leur conscience civique et citoyenne, leur connaissance de leurs
droits, ainsi que la façon dont ils les expriment dans le quotidien de
leur vie. Elle permet également d'interroger leur sens du bien commun et
du respect de la chose publique, ainsi que leur participation à la
politique locale dans le cadre de la décentralisation.
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2.2.16 Le vivre ensemble commence à
l'école
« Préparer tous les élèves à
être des citoyens responsables, capables de contribuer au
développement d'une société démocratique,
solidaire, pluraliste et ouverte aux autres cultures ». Cet extrait du
Décret « Missions » de l'enseignement en
Fédération Wallonie-Bruxelles ne laisse pas de doute : le
vivre-ensemble, ça doit commencer à l'école.
Démocratie, solidarité, ouverture, contribution au bien commun...
Nous sommes nombreux à considérer que ces valeurs sont la
clé de notre avenir commun sur cette planète. Mais les
écoles, comme la société dans son ensemble, baignent dans
un capitalisme néolibéral qui non seulement régit le
travail, les échanges marchands et financiers, mais qui imprègne
aussi nos vies à un point dont nous n'avons pas toujours conscience. Et
que dire de l'imprégnation des jeunes, qui n'ont pas connu l'avant 1989,
quand il y avait encore au moins deux idéologies qui s'affrontaient et
pas une seule, triomphante, soi-disant indiscutable (« There's no
alternative », disait Margaret Thatcher) comme aujourd'hui. Les plus de 40
ans sont les enfants de la Déclaration universelle des droits de
l'Homme, des progrès de la sécurité sociale, de l'espoir
d'un avenir plus beau que le présent. La solidarité, la force de
l'action collective, la primauté des droits humains faisaient partie de
leur univers mental, culturel. Ce qui n'est, et de loin, plus le cas de tous
les élèves aujourd'hui.
2.2.16.1 À contre-courant
Le système dans lequel nous vivons aujourd'hui, ce
modèle de société qui a été choisi au
tournant des années 90, va à l'encontre du vivre-ensemble,
puisqu'il est fondé sur l'accumulation de richesses et de pouvoir par
une minorité, sur la surconsommation comme clé de l'existence
sociale, sur la concurrence généralisée, sur la loi du
plus fort, sur le mérite individuel et la croyance qu'on peut se
construire et s'épanouir par la seule force de sa propre
volonté.
Or, ce sont les valeurs du vivre-ensemble - la
solidarité, le respect, le partage, la justice... - que les
écoles sont censées inculquer aux jeunes. Autant dire que la
tâche n'est pas facile. On lui demande, en quelque sorte, pour
caricaturer et pour parodier une célèbre marque de chocolat
suisse, d'être une oasis de vivre- ensemble et de citoyenneté dans
un monde de brutes égoïstes et sans scrupules.
Bien vivre ensemble n'est pourtant pas seulement
nécessaire pour former les citoyens de demain : vivre bien ensemble est
nécessaire pour que les élèves soient en condition de
réaliser des apprentissages. Il est difficile à un
élève de se concentrer quand son esprit est absorbé par
des problèmes relationnels, des moqueries, voire des harcèlements
- plus ou moins perçus par l'équipe éducative. Respect et
bienveillance ne sont pas des options, ce sont des
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conditions de l'apprentissage. Entre les élèves
comme des profs envers les élèves - et inversement.
Vivre ensemble n'est pas un concept statique. Vivre ensemble,
dans la société comme à l'école, ne se
résume pas à la paix sociale, à la coexistence pacifique,
à vivre les uns à côté des autres sans se taper
dessus. Vivre ensemble, c'est dynamique, c'est fécond, c'est porteur de
vie et de joie. Vivre ensemble, c'est avant tout ÊTRE
ensemble, et puis c'est FAIRE ensemble.
2.2.16.2 Être soi-même à
l'école : un défi ?
Être ensemble, tout d'abord. Et, pour cela, pouvoir
être soi-même. A quoi ressemble le vivre-ensemble dans une
école secondaire aujourd'hui ? L'école n'est-elle pas souvent un
lieu où le jeune doit montrer une image de lui-même qui va lui
permettre d'être intégré, admis, reconnu ? Ne doit-il pas
se doter d'une carapace, jouer un rôle, sous peine de souffrir moqueries
et exclusions diverses ?
Qui fréquente des jeunes connaît forcément
les expressions casser ou clasher, qui signent la victoire de l'un (celui qui a
de la répartie, de l'assurance, de l'ironie, voire de la
méchanceté) sur l'autre (celui qui s'est laissé
piéger, qui est du côté des perdants, qui s'est fait avoir,
qui est pigeon). Agresser et rabaisser l'autre semble être la norme dans
les relations, le top pour se faire bien voir de ses
congénères.
D'où la question : l'école est-elle un lieu
où l'on peut être soi-même ? Les adolescents ne se
sentent-ils pas obligés d'occulter une partie d'eux-mêmes ? Le
timide, le roux, le sensible, celui qui a toujours des bonnes notes, celui qui
au contraire ne comprend jamais rien, le trop basané... S'ils ne se
construisent pas cette apparence « conforme », ou s'ils essaient mais
qu'ils n'y parviennent pas, ils risquent bien des exclusions et parfois de
réelles difficultés affectives et psychologiques.
Se fabriquer et entretenir cette image conforme - notamment
sur les réseaux sociaux, où cette image de soi «
idéale » prend des proportions démesurées - leur
demande certainement beaucoup d'énergie - qu'ils ne pourront pas
consacrer sereinement aux apprentissages scolaires - et occasionne une
souffrance, en raison du décalage entre ce qu'ils sont vraiment et ce
qu'ils doivent paraître pour « survivre » à
l'école. Si l'on ajoute à cela des situations familiales parfois
douloureuses, on imagine ce que cela peut représenter comme
énergie gaspillée et comme poids dans la vie d'un adolescent.
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2.2.16.3 Indispensable bienveillance
Sans un climat de bienveillance où chacun est accueilli
et reconnu tel qu'il est et pour ce qu'il est (et non pour sa
popularité, ses résultats scolaires ou sa façon de
s'habiller), on ne peut pas vraiment parler de vivre-ensemble, que ce soit dans
une école où dans la société en
général.
Mais comment le créer, ce climat ? Il peut
bien-sûr être favorisé par l'enseignant, par sa façon
d'être, par les règles et limites qu'il applique en classe durant
ses cours (comme de ne pas tolérer les insultes, les manques de respect
ou les injustices), par le climat d'écoute et de non-jugement qu'il peut
instaurer dans la classe. Tout cela peut avoir une influence positive mais,
pour un réel « être bien ensemble », il faudrait que cet
esprit règne dans toute l'école, et que ce soit une
démarche intériorisée, intégrée. Sans cela,
les jeunes en resteront au stade des règles imposées et
n'arriveront pas à un changement durable et profond.
Pour installer un climat bienveillant dans sa classe,
l'enseignant doit être lui-même suffisamment serein. Or, enseigner
est de plus en plus difficile et les pressions que subissent les enseignant
sont multiples. « Quand on est jeune prof, on doit plaire à la fois
à la direction, aux collègues, aux élèves, aux
parents et à l'inspection », constate une jeune enseignante.
Pressés par le programme à respecter, par certains
élèves difficiles à gérer, par
l'insécurité d'emploi (pour les jeunes non nommés), il
faudrait aux profs une heure de méditation chaque matin pour rester
toujours « zen » ! Il conviendrait aussi intégrer davantage
cette dimension de « climat bienveillant » dans la formation des
enseignants.
Ouvrir les jeunes à leur propre
intériorité paraît essentiel dans ce monde où le
règne de l'apparence et du tape-à-l'oeil les exile
d'eux-mêmes. Un cours de citoyenneté qui ne commencerait pas par
une reconnexion à soi-même risquerait bien de n'obtenir que des
résultats de surface et pas le changement radical dont nous avons besoin
pour aujourd'hui et pour demain. C'est le fondement - souvent
négligé - de toute démarche de « citoyenneté
», cours ou autre. Spiritualité, sensibilité, foi
éventuellement, fragilité, fêlures, diversité des
vécus et des aspirations... ont-ils leur place dans nos classes et nos
cours de récréation ? (Isabelle De Wee, s. d.).
2.2.16.4 Vivre ensemble pour changer (le monde)
ensemble
Deuxième facette : vivre ensemble, c'est faire
ensemble. Faire ensemble, parce que c'est avant tout par l'expérience
qu'on découvre que vivre ensemble n'est pas seulement une obligation,
mais aussi une source de joie et de créativité. Enseigner quelque
chose qui est de
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l'ordre des valeurs - la participation, la solidarité,
le respect de la diversité, le sens du collectif... - sans avoir
l'occasion de le vivre, c'est très artificiel et peu efficace.
Faire ensemble, aussi, parce que vivre ensemble, aujourd'hui,
c'est changer ensemble, construire ensemble une société où
il fasse bon vivre. Les jeunes peuvent, comme les adultes, constater que la
terre ne tourne pas très juste. Ils ont parfois l'impression que
l'école est un microcosme hors de la société et qu'en tant
qu'élèves, en tant que jeunes, ils n'ont pas de rôle
à jouer dans cette société qui, par ailleurs, ne leur
semble guère accueillante. Leur donner l'occasion, par une action
collective, de faire changer les choses, même au niveau local, renforcera
leur confiance en eux-mêmes et en leur capacité à devenir
des acteurs de changement.
Pour cela, on peut créer, avec la participation des
élèves, des projets au sein de l'école, où chacun
peut exprimer ce qu'il/elle est, en tenant compte de la diversité des
intelligences, de façon à ce que chacun soit reconnu comme
compétent (ce qui renforce le « être - bien avec -
soi-même »). Cela peut-être un projet culturel, ou lié
à l'environnement, ou à l'aménagement de l'école et
de ses alentours, etc.
Pour vivre des expériences de vivre-ensemble,
l'école gagnerait à sortir plus souvent de ses murs et à
systématiser des expériences de vie avec des personnes
différentes par l'âge, le milieu social, le handicap, l'origine
culturelle, etc. Systématiser, parce que cela doit être plus
qu'une visite ponctuelle à la résidence pour personnes
âgées ou au centre d'accueil pour réfugiés,
même si ces rencontres sont déjà positives en soi. Cela
doit être un processus qui se construit avec les élèves,
qui les amène à se rendre compte qu'ils ont dès maintenant
un rôle positif à jouer dans la société, qu'ils
peuvent y être utiles, qu'ils ont des compétences et que toutes
les compétences sont nécessaires pour faire
société. Pas seulement l'intelligence logico-mathématique
et linguistique, mais aussi toutes les autres, et notamment l'intelligence
relationnelle, qui n'est peut-être pas assez stimulée ni
travaillée à l'école.
Pour cela, il faut bien entendu que ce vivre-ensemble soit
l'affaire de toute l'école, de toute l'équipe éducative.
Cette dernière doit être prête à s'engager dans
l'aventure, à y mettre de l'énergie. L'équipe
éducative doit accepter de céder un peu de son pouvoir (les
enseignants sont maîtres dans leur classe, ce sont eux qui
détiennent le savoir) pour se lancer dans des projets nouveaux, afin que
ce pouvoir qu'ils cèdent se transforme en puissance d'agir pour les
élèves, pour reprendre une expression chère à
l'éducation populaire. Une remise en chantier des méthodes
d'enseignement, donc, qui sera tout bénéfice pour les
élèves, mais aussi, l'expérience le montre, pour les
enseignants. Et, faisons-en le pari, pour la société.
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Nous sommes à une époque où de nombreuses
initiatives un peu hors-cadre, hors-système, voient le jour, promues par
des personnes ou des collectifs qui sont persuadés que le changement
viendra des citoyens avant de venir du monde politique. On les observe dans des
secteurs aussi divers que l'agriculture, la culture, le logement,
l'épargne, les monnaies locales, les réseaux d'échanges et
d'entraide... ou l'enseignement. Elles n'attendent pas que le monde change pour
changer le monde.
Pourquoi attendre que l'école change (par un nouveau
décret, de nouveaux socles de compétences, un nouveau pacte
d'excellence, un nouveau cours de citoyenneté...) pour changer
l'école ? Montrer qu'autre chose est possible, c'est peut-être le
meilleur moyen de convaincre nos élus d'oser innover.
Travailler à un mieux vivre-ensemble à
l'école, on l'a dit, c'est contribuer à la réussite et
à l'épanouissement de chacun (y compris des enseignants,
d'ailleurs), mais aussi contribuer à donner au monde de demain des
citoyens responsables et désireux de mettre leurs compétences au
service d'un monde qui, pour reprendre le slogan d'Entraide et
Fraternité, tourne plus juste (Isabelle Franck, 2015). Pour ce qui est
du Cameroun, on relève dans les documents officiels une
préoccupation constante qui concerne les valeurs à transmettre
dans la formation citoyenne. La constitution du Cameroun met l'accent sur
l'idéal de paix et d'unité nationale, ainsi que sur le respect de
la diversité. Par ailleurs, (Biya P, 1986) président de la
république, prône une idéologie reposant sur les valeurs
morales. Pour traduire cette idéologie en action, plusieurs discours,
décrets, circulaires et notes de service ont été produits
et ont participé à la construction d'une vision de la nation, de
la justice et du contrat social.
Bien plus, le chapitre 3, paragraphe III.3 du document de la
« vision Cameroun 2035 », consacre à la stratégie
d'intégration nationale et à la consolidation du processus
démocratique, stipule que « le développement du Cameroun
nécessite la mobilisation efficiente de toutes les énergies dans
un cadre de cohabitation harmonieux. Elle exige donc le renforcement de
l'intégration nationale » (Cameroun, 2009), dont il définit
les contours et trace les axes de stratégie. Quant à la loi
d'orientation de l'éducation au Cameroun, elle stipule, en son article
5, al 2, que « l'éducation a pour objectif la formation aux grandes
valeurs éthiques universelles que sont la dignité et l'honneur,
l'honnêteté et l'intégrité, ainsi que le sens de la
discipline » (Cameroun, 1998). (Fonkoua et Toukam, 2007), décrivent
un ensemble de faits de la vie quotidienne, de la vie politique et
économique à partir desquels une analyse une analyse critique
59
peut être engagé dans le sens de former l'esprit
critique du citoyen afin qu'il devienne un acteur social éclairer et
engagé.
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