1.5.5. Politique publique de la
lutte contre la faim
L'élaboration des politiques publiques de lutte contre
la faim ne s'inspire pas nécessairement des deux principaux courants
d'analyse de la faim mentionnés ci-dessus. Toutefois, on peut noter une
certaine filiation entre les politiques publiques de lutte contre la faim et
ces courants d'analyse des causes de la faim. En effet rien ne justifie que la
politique d'augmentation du ratio disponibilité alimentaire/population
soit incompatible avec l'analyse malthusienne des causes de la faim et des
solutions possibles. La politique d'abaissement et de stabilisation des prix
alimentaires semble elle donner comme solution à la faim celle de Sen
à savoir l'augmentation de l'accessibilité par la lutte contre la
pauvreté. La politique de sécurité alimentaire plus
récente peut être considérer comme englobant les deux
précédentes (Ya Cor Ndione, 2010).
1.5.6. Importance commerciale
et aides alimentaires
Les importations de denrées alimentaires de base sont
pratiquées par les pays soit par obligation, soit par choix. Les
marchés internationaux de denrées alimentaires se
caractérisent par leur très grande instabilité
expliquée par le nombre insuffisant d'exportateurs et un grand nombre
d'importateurs. Ainsi cinq territoires seulement à savoir les
États-Unis, le Canada, l'Union Européenne, l'Australie
l'Argentine ont assuré plus de 80% des exportations durant la
période 1997-1999, les États-Unis en assurant près de la
moitié. De plus tout le négoce international des denrées
alimentaires est aux mains d'une demi-douzaine de firmes internationales. La
pratique des importations alimentaires qui représente une part
importante des dépenses en devises et de la consommation
intérieure est risquée à cause du caractère
oligopolistique des marchés internationaux de denrées et de
l'instabilité des prix qui en découle (Brunel, 1997, cité
par Ya Cor Ndion, 2010).
Concernant l'aide alimentaire, l'un des premiers programmes
est né aux États-Unis en 1954 dans le cadre du plan Marshall. La
loi relative à cette aide (la Public Law 480) fixait comme objectif la
lutte contre la faim dans le monde mais également l'écoulement du
surplus agricole américain, de conquérir de nouveaux
marchés agricoles et enfin d'asseoir une influence politique pour lutter
contre le communisme. Les pays européens quant à eux ont
commencé à adopter les programmes d'aide alimentaire à
partir de 1960 une fois que leur autosuffisance a été
assurée. Actuellement plus d'une soixantaine de pays fournissent l'aide
alimentaire mais les États-Unis en assurent à eux seuls
près de la moitié. Cette aide se présente le plus souvent
sous forme de dons, de ventes à prix particulièrement bas, de
prêts à des taux d'intérêt faibles, de devises pour
acheter des denrées alimentaires. L'aide d'urgence en cas de catastrophe
et de guerre est devenue plus importante quantitativement que l'aide
apportée dans le cadre de projets ou programmes. Dans les pays receveurs
l'aide est donnée vendue ou échangée en contrepartie de
participation en travail à de grands travaux de publics. L'aide
alimentaire a été très largement critiquée: d'abord
parce que les flux sont très irréguliers et peu
prévisibles. De plus lorsque l'aide est très abondante et
distribuée gratuitement aux populations elle peut entraîner chez
celles-ci la passivité et maintenir la dépendance d'autant plus
que les producteurs ne produisent plus. Dans certains cas l'aide arrive en
retard ou est composée de denrées qui ne correspondent pas aux
habitudes alimentaires des pays receveurs ou encore elle est de mauvaise
qualité. Enfin l'une des plus véhémentes critiques de
l'aide est qu'elle peut être détournée par des groupes
sociaux puissants; elle peut amener certains pays à ne pas combattre les
premiers signes d'apparition de la famine pour bénéficier de plus
d'aide avec l'aggravation de la situation. Ainsi certaines famines pourraient
même être fabriquées de toute pièce (Brunel, 1997,
cité par Ya Cor Ndion, 2010).
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