1.5.4. Satisfaction des besoins
alimentaires selon la théorieéconomique
Pour les premiers économistes, les mercantilistes, l'un
des objectifs fondamentaux de toute société est de garantir
à sa population un approvisionnement alimentaire régulier et
substantiel. De même chez les auteurs libéraux à l'instar
d'Adam Smith cette analyse est faite: «aucune société ne
peut être florissante et heureuse, si la majorité de ces membres
est pauvre et misérable». Les courants de pensée
reconnaissent le caractère primordial de la satisfaction des besoins
alimentaires mais n'arrivent pas à trouver un consensus sur les
modalités d'une telle satisfaction (Senghor Langa, 2015).
A. Analyse mercantiliste
Pour les premiers, mercantilistes, c'est l'État qui
doit veiller au bon approvisionnement alimentaire des populations ainsi qu'aux
bas prix de marché. Les mercantilistes ont analysé les produits
agricoles en particulier le blé d'abord comme un bien de subsistance
avant de le considérer comme un objet de commerce. Pour garantir un prix
à la portée de tous et donc une satisfaction des besoins
alimentaires, l'État doit constamment surveiller et encadrer les
marchés et même intervenir s'il y a lieu. L'État remplit
cette mission par l'intermédiaire de stocks publics qui ont pour
résultat la stabilisation des prix. A cet effet Bodin propose «
d'avoir dans chaque ville un grenier public(...) on verrait jamais la
cherté si grande qu'elle soit, car outre le fait qu'on aurait provision
pour les mauvaises années, on retrancherait les monopoles des marchands
de blé...». Ainsi une gestion publique des réserves de
même qu'un contrôle du commerce du blé permet d'avoir un
prix juste. Les mercantilistes proposent aussi à côté de
cette intervention étatique, une réduction de la circulation des
céréales à l'extérieur de la nation et donc
d'empêcher toute sortie du territoire des produits agricoles. «La
France ne fut jamais affamée c'est-à-dire qu'elle a richement de
quoi nourrir son peuple quelque mauvaise année qui survienne, pourvu que
l'étranger ne vide nos granges». Aussi le commerce extérieur
n'est autorisé que si le pays est bien approvisionné (Bengale,
1943, Bangladesh, 1974 cité par Ya Cor Ndione, 2010).
B. Analyse libérale
Pour le courant libéral, le meilleur moyen d'assurer un
bon approvisionnement alimentaire des populations est de laisser faire le
marché avec une harmonisation de ce dernier à travers les
ajustements par les prix et les salaires. Cela suppose une libre circulation
totale des produits agricoles tant à l'intérieur qu'à
l'extérieur du pays sans que l'État ne réglemente le
fonctionnement du marché comme l'exige la tradition séculaire.
Pour apaiser les craintes des populations face à cette
libéralisation des échanges agricoles les libéraux se
fondent sur les spécificités des biens alimentaires. D'abord ces
biens étant renouvelables leur abondance est assurée. Pierre
Samuel Dupont de Nemours parle de «richesses renaissantes». Le
secteur des produits agricoles est ainsi analysé comme une
génération et non une simple addition de richesses que multiplie
la terre nourricière et qui s'assimile à un véritable don
gratuit de la nature (analyse physiocrate). De plus, le caractère
volumineux et périssable des biens alimentaires les rend difficilement
transportables par rapport aux autres marchandises. Ainsi les échanges
avec l'étranger ne concernent qu'une faible partie de la production
nationale. Les inquiétudes des populations face aux dangers du commerce
extérieur des produits alimentaires n'ont ainsi aucune raison
d'être. Cette analyse libérale du marché agricole fut
remise en cause (Bengale, 1943, Bangladesh, 1974 cité par Ya Cor Ndione,
2010).
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