5.1.2.
Interprétation économique
Sur le plan économique, nos résultats sont pour
la plupart conforme aux travaux antérieurs seul à quelques
exceptions prêtes. Plus précisément, les données du
tableau montrent que l'effet du statut matrimonial est négatif et
significatif au seuil de 1%, Ce qui valide notre première
hypothèse en montrant que les élèves issus des familles
monoparentales et recomposées (structurefamilaile instable), ont une
probabilité de décrochage scolaire plus élevée que
ceux des structures familiales stables (famille nucléaire).
Deslandes et Bertrand (2008), dans une revue sur
l'état d'avancement des connaissances sur les relations
« école-famille » confirment ce résultat. Ces
auteurs soulignent que le degré de participation des parents aux
activités scolaires de leurs enfants varie suivant la structure
familiale dans laquelle vit l'enfant. Les auteurs soutiennent qu'à
niveau socio-économique et culturel égal, les familles
biparentales (familles traditionnelles) participent davantage au suivi scolaire
à la maison et à l'école que les familles
monoparentales.
En effet, Rmberger (2011) montre que la concentration de
l'abandon scolaire dans certains types de familles a convaincu la
majorité des chercheurs du fait que les parents exercent une influence
déterminante sur la persévérence scolaire des enfants.
Seulement, il est difficile de connaitre comment les parents soutiennent ou non
la persévérance scolaire des enfants. Plusieurs études se
sont focalisées à identifier « l'adresse sociale de la
famille » Brofenbrenner (1996) sans pour autant s'intéresser
aux precesus à l'intérieur de la structure familiale qui sont
susceptibles de favoriser ou de défavoriser l'abandon scolaire.
Brofenbrenner et Ceci (1994) précisent que les processus intra familiaux
sont en quelque sorte « les moteurs qui propulsent, jour après
jour, le développement social et intellectuel de l'enfant, de
l'adolescent, incluant ses apprentissages ». Un enfant qui a grandi
dans une structure familiale nucléaire ou biparentale à plus de
chance d'etre exposé aux bons processus intra familiaux qu'un enfant
vivant dans une famille monoparentale ; comme quoi, la composition (type)
de la famille influence le type de processus à l'intérieur de la
famille, dont l'incidence sur le décrochage ou la complétude
scolaire des enfants a été confirmée.
En considérant un seuil de 1%, on peut dire que la
probabilité d'abandon pour les enfants dont le père a un niveau
d'éducation du primaire, est supérieur à celle des enfants
dont le père a un niveau d'éducation secondaire. Par ailleurs,
ceux dont le père a un niveau d'éducation du supérieur
réduit la probabilité d'abandon. Autrement dit, plus le niveau
d'éducation du père est élevé, plus les chances
d'abandon scolaire diminuent. Ce qui valide notre quatrième
hypothèse.
En fin de compte, on observe que l'éducation des
parents est l'un des facteurs clés du succès scolaire de leurs
enfants. Par conséquent, l'éducation du père importe
beaucoup en ce qui concerne l'abandon scolaire. Plus le niveau
d'éducation du père est élevé, plus il est
prêt à faire de son mieux pour maintenir ses enfants à
l'école. En d'autres termes, les pères éduqués
pourraient être mieux informés sur les bienfaits de
l'éducation, ce qui les encourage à envoyer et à maintenir
leurs enfants à l'école. Ces résultent vont dans le
même sens que ceux de Carron et Chau (1998).
Par ailleurs, les résultats montrent que la
probabilité d'abandonner est moins élevée chez les
garçons que chez les filles. Ce résultat se justifie par le fait
qu'au Cameroun, le taux de scolarisation entre garçons et filles n'est
pas le même. Les parents dans la plupart du temps ne misent pas dans
l'éducation de la fille car celle-ci est appelée à aller
en mariage et à fonder une famille le plus souvent avant le
garçon.
Rumberg (2011) identifie trois différentes
caractéristiques familiales susceptibles d'influencer directement ou
indirectement l'abandon scolaire ou la complétude scolaire des enfants,
à savoir : la structure familiale, les ressources familiales et les
pratiques parentales. Les ressources familiales ici font
référence au niveau d'éducation et aux revenus des
parents. Il établi ici un lien entre le niveau d'éducation des
parents et leurs revenus. Dans les familles ou le niveau d'étude des
parents n'est pas élevé, les revenus sont
généralement bas, ce qui explique le fait que dans ces memes
familles, les enfants travaillent. Nos résultats montrent
que Comparés aux enfants qui ne travaillent pas, les enfants qui
travaillent abandonnent l'école plus que d'autres. Ainsi, la
probabilité d'abandon est plus élevée pour les enfants qui
travaillent dans la mesure où ceux-ci ne disposent pas assez de temps
d'étude du fait de leurs diverses occupations. De ce fait, la
probabilité de redoublement est élevée et donc d'abandon
(Noumba, 2008). Ces résultats viennent valider notre troisième
hypothèse qui stipulait que dans les structures familiales instables,
les enfants sont souvent obligés de travailler, de ce fait, les enfants
qui travaillent son plus enclein à abandonner l'école que ceux
qui ne travaillent pas.
Pour ce qui est de la religion, la probabilité
d'abandon chez les musulmans est plus élevée que celle des
chrétiens. Ce résultat confirme les disparités
observées au Cameroun. Le taux de scolarisation dans les régions
musulmanes (Adamaoua, Nord et extrême-Nord) est très faible
comparé à celui des régions chrétiennes. A titre
illustratif, en 2014, le taux de scolarisation dans les régions du Nord
et de l'extrême Nord a été respectivement à l'ordre
de 1% et de 3% tandis que ce même taux au Centre et au Littoral
s'élève à 30% et 17% respectivement durant le même
temps.
Un autre résultat issu de nos régressions montre
que la probabilité d'abandon est plus élevée pour les
parents sans emploi. Ceci peut être le fait du manque de ressources pour
envoyer l'enfant à l'école. Dans ce sens, Boris et Carpenter
(1984), en abordant l'influence du niveau socio-économique des parents
sont arrivés à la conclusion que les familles vivant sous le
seuil de la pauvreté éprouvent souvent de grandes
difficultés à offrir leur soutien pour les devoirs et les
leçons, cette incapacité augmente ainsi les risques
d'échec et de redoublement. D'autre part, dans les structures familiales
instables, ou les parents n'ont pas d'emploi, ou alors ont un emploi
précaire, les enfants se retrouvent souvent obligés d'aller
travailler, ce qui d'ailleurs amenuise leurs résultats scolaires et les
incite à l'abandon scolaire.
Fort de ce qui précède, nous pouvons dire qu'au
regard des données statistiques et économétriques, nous
distingons deux formes de structure familiales à savoir la structure
familiale stable et la structure familiale instable. Les indicateurs des
structures familiales peuvent etreappréhenés selon trois
approches à savoir les indicateurs socioculturels de la structure
familiale, les indicateurs sociodémographiques de la structure
familiale, et les indicateurs socioéconomiques.
Parmi les indicateurs socioculturels de la structure
familiale, on distingue la religion, la mobilité des parents ou de
l'enfant ; parmi les indicateurs sociodémographiques, on distingue
la taille du ménage, le type de famille ; parmi les indicateurs
socioéconomiques de la structure familiale, nous avons le revenu des
parents, le statut professionnel de l'enfant, le niveau d'étude des
parents. Il ressort que les structures familiales instables se
différencient des structures familiales stables à quatre niveaux
principaux : la composition de la famille, la taille de la famille le
statut professionnel de l'enfant, et le niveau d'étude des parents.
Les résultats montrent clairement que les familles
monoparentales et recomposées ont moins de temps pour le suivi des
enfants à la maison que les familles nucléaires, aussi en ce qui
concerne la taille, les famille nucléaires sont moins nombreuses que
certaines familles recomposées, ce qui explique le fait que les
ressources pour envoyer les enfants à l'école sont moins
suffisantes dans les structures familailes instables que dans les familles
stables ; aussi la plupart des familles nucléaires disposent plus
de revenus que les familles monoparentales ( Mather, 2010 ; Observatoire
de la pauvreté et des inégalités du Québec, 2016)
ou polygammes, car les familles monoparentales et polygames, pour la plupart
dispose d'une seule source de revenu, tandis que dans les familles
nucléaires, le ménage dispose souvent de deux revenus et de moins
d'enfants, surtout lorsque les parents ont fait des études
supérieures.
Dans les structures familiales instables, il y aplus d'enfants
travailleurs que dans les structures familiales stables, et cela s'explique par
le faible niveau de revenus dans les familles instables, qui sont pour la
plupart pauvres. En général, il est plus facile par exemple,
d'aider l'adolescent à faire ses devoirs lorsque les deux parents sont
présents au domicile et lorsque ceux-ci détiennent un
diplôme avancé (Dumont, & al., 2014)
Il ressort que la propension à l'abandon scolaire est
plus élevée chez les élèves issus des structures
familiales instables que chez ceux issus des structures familiales stables. Les
recommandations et les implications professionnelles se feront en rapport avec
les différents indicateurs mobilisés pour capter la structure
familiale instable.
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