PREMIERE PARTIE : INSTABILITÉ FAMILIALE ET ABANDON
SCOLAIRE AU CAMEROUN : LE CADRE THÉORIQUE
Cette partie est organisée autour de deux chapitres. Le
premier chapitre présente le cadre global de l'étude. Il s'agit
pour nous de décrire à la fois le système éducatif
camerounais et l'environnement socio-culturel dans lequel est mis en oeuvre ce
système. Le chapitre deux quant-à-lui est consacré
à la présentation des théories explicatives de l'abandon
scolaire.
CHAPITRE 1 : PROBLEMATIQE DE L'ÉTUDE
1.1- CONTEXTE DE L'ETUDE
Selon l'ISU (2016) environ 263 millions d'enfants,
d'adolescents et de jeunes à travers le monde ne sont pas
scolarisés, soit un sur cinq en âge de l'être. Dans le
primaire, le taux d'enfants non scolarisés n'a presque pas changé
au cours des dix dernières années : 9% des enfants en âge
d'aller à l'école primaire (de 6 à 11 ans environ), soit
63 millions, ne sont pas scolarisés. Par ailleurs, 61 millions
d'adolescents en âge de fréquenter le premier cycle du secondaire
(de 12 à 14 ans environ) et 139 millions de jeunes du deuxième
cycle du secondaire, un sur trois ne sont pas inscrits à l'école.
Les enfants issus de familles pauvres, zones rurales ou minorités
ethniques, les enfants handicapés et ceux qui doivent travailler pour
aider leurs familles font face au plus grand risque d'être privés
de leur droit à éducation. Le Cameroun ne fait pas figure
d'excepption face à cette situation :D'une part soncontexte
socioéconomique, démographique, et culturel, et d'autre part la
dynamique de son système économique sont autant d'élements
qui permettront de mieux apprécier l'environnement dans lequel cette
recherche est menée.
1.1-1. Le contexte démographique,
socioéconomique et culturelle camerounais
Dans cette sous section, il s'agira de présenter la
structuredémographique, socioéconomique et socioculturelle du
Camerounet en particulier leur incidence sur les enfants, lajeunnesse et les
familles camerounaises.
1.1-1.1. Le contexte démographique Camerounais
Les résultats du 3ème RGPH établissaient
la population du Cameroun à 17 463 836habitants en 2005. Cette
population est constituée de 50,6% de femmes et 49,4% d'hommes. En
2014, cette population était estimée à 21 657 488
habitants. Cette population a connu une augmentation entre 2014 et 2017, ce qui
la place aujourd'hui à un peu plus de 23 248 044 habitants en 2019
(INS). La structure de la population camerounaise montre l'importance
démographique des enfants et des jeunes. Selon les statistiques
démographiques en 2019, près de la moitié (49,9%) de la
population du Cameroun est âgéede moins de18 ans, traduisant ainsi
l'extrême jeunesse de la population. Ces statistiques montrent
également qu'en 2019, sur dix camerounais plus de six (64,1%) ont moins
de 25 ans. Quant à la population des enfants de moins de 15 ans, leur
proportion est estimée à plus de 43,0% en 2019 (INS).
Les fortes proportions d'enfants et de jeunes dans
lapopulation totaleest la preuve que le niveau de fécondité est
encore élevé au Cameroun malgré la tendance à la
baisse del'IndiceSynthétiquede Fécondité (ISF) (BUCREP).
En effet, lesdifférentes Enquêtes Démographiques et de
Santé (EDS) réalisées dans le pays révèlent
que le nombre moyen d'enfants par femme, mesuré à partir de,
l'ISF est passé de 5,8 en 1991 à 5,0 en 2011.
Si ce changement se manifeste par la diminutionprogressive du
poids démographique des différentes tranches d'âges chez
les enfantsde moins de 18 ans, il faut toutefois noter que le poids
démographique des jeunes de 15-24 a tendance à augmenter. Il est
passé de 20,7 en 2005 à 21,1 en 2014 et en2017, il
estestimé à 21,2%. Cette situation particulière serait
probablement liée à la baisse de la mortalité des
enfants en bas âge. Concernant la dynamiquedémographique,
l'observation de la population du Cameroun en partant du 1er recensement
exécuté en 1976, met en évidence la persistanced'un taux
d'accroissement démographique élevé.
La population du pays est passée de 7 663 246 à
10 493 655 habitants entre 1976 et 1987, puis à 17 463 836 habitants
en 2005, soit un taux d'accroissement annuel moyen de 2,9% sur la
période 1976 - 1987 et de 2,8% sur la période 1987 - 2005.
Ainsi, le nombre théorique d'enfants à scolariser qui
était de 2,5 millions en 2002passerait de 3,4 millions en 2015, soit une
progression de 34,5%. Outre cette pression due à la poussée
démographique, le taux de prévalence du VIH-SIDA dans la
population de 15-49 ansétait estimé à 11% en 2002.
Cette situation a eu desconséquences néfastes
surle systèmeéducatif se traduisant par une forte augmentation du
nombre d'orphelins liés à cette maladie, l'aggravation du
déficit d'enseignants et la baisse de leur rendement. On estimait
à 500 par an le nombre d'enseignants décédés pour
cause de SIDA et 350 mille le nombre d'enfants orphelins de SIDA (ECAM 4). Les
prévisions indiquaient qu'aux alentours de 2015, le nombre de
maîtres devant être remplacés chaque année par suite
de cette pandémie se situerait entre 1200 et 1500(DSSE, 2006).
Les données scolaires les plus récentes et
disponibles concernent l'année scolaire 2015-2016, les besoins en
données démographiques concernent ainsi la population de
l'année 2015. Selon les projections du BUCREP, la population
camerounaise est estimée au 1er juillet 2015 à 22,180 millions
d'habitants. Les données de la Division de population des Nations Unies
estiment la population camerounaise à cette même date à
22,835, soit une différence de l'ordre de 3%. Les graphiques suivants
illustrent les pyramides des âges selon les deux sources qui
présentent des allures similaires sauf en ce qui concerne les femmes des
tranches d'âge des 10-19 ans.
Graphique 1: Pyramide des
âges, Cameroun 2015 (BUCREP)
Graphique 2: Pyramide des
âges, Cameroun 2015 (UNPD)
Le graphique suivant présente une comparaison de ces
deux sources de données concernant la population âgée de 0
à 24 ans.
Graphique 3: Population
camerounaise âgée de 0 à 24 ans en 2015 :
répartition par âge selon les données du BUCREP et de
l'UNPD
Source : UNICEFd'après les données du BUCREP
et de l'UNPD
La confrontation des données démographiques
recueillies à partir des différentes sources citées avec
les données scolaires aboutit à certaines incohérences et
anomalies (population scolarisée dépassant la population
scolarisable pour la tranche d'âge des 6-10 ans) qui nécessitent
un ajustement de la série démographique ou de la série
scolaire à retenir pour les besoins de calcul des différents
indicateurs propres aux 3 dimensions de l'exclusion scolaire.
Graphique 4: Population
scolarisée et population scolarisable (2015)
Source : Unicefd'après
les données du MINEDUB, MINESEC, BUCREP et UNPD
En fait, l'ajustement à effectuer concerne la structure
par âge de la population scolarisée telle qu'elle ressort des
données administratives. En effet, la comparaison de la structure par
âge de la population scolarisée au primaire entre les
données de l'annuaire statistique du MINEDUB et celles obtenues à
travers les enquêtes ménages montrent une différence
significative de structure notamment en ce qui concerne la tranche d'âge
des 6-10 ans qui est précisément la tranche concernée par
l'anomalie présentée plus haut.
Le graphique suivant illustre cette différence des
structures entre les données de l'annuaire d'une part et celles des
enquêtes ménages (MICS 5 et ECAM 4) d'autre part :
Graphique 5: Structure
comparée de la répartition par âge des enfants
scolarisée au primaire
Ainsi, pour les besoins de la présente étude, il
est retenu d'ajuster la structure par âge des filles et des
garçons inscrits au primaire selon les données de l'année
scolaire 2015-2016 par la moyenne de structure obtenue par MICS5 et ECAM 4. Le
graphique suivant illustre ces deux répartitions.
Graphique 6: Structure de
la répartition par âge des enfants scolarisée au primaire
selon les données administrative et la moyenne de MISC4 et ECAM
4
Source : d'après les
données du MINEDUB, de MICS5 et de ECAM4
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