Le droit à la présomption d'innocence face au droit à l'information( Télécharger le fichier original )par Ouaogarin Roger SANKARA Université Ouaga 2 - Master de recherche en Droit Privé Fondamental 2015 |
§2. La portée des atteintes en rapport avec les moyens de publicitéLes atteintes à la présomption d'innocence sont d'autant plus graves que les moyens de publicité donnent un écho quasi-universel au coup porté à l'honneur et à la considération de la personne poursuivie. La protection d'une atteinte à la présomption d'innocence n'est d'ailleurs envisageable que dans la mesure où il y a eu un acte de publicité concluant à la culpabilité102(*). Aux moyens de publicité traditionnels et déjà influents au sein de l'opinion publique (A), sont venues s'ajouter les nouvelles technologies de l'information et de la communication (B). A. Des moyens traditionnels de publicité déjà influentsEn droit français, tout comme en droit burkinabè, la publicité des atteintes à la présomption d'innocence s'opère très souvent aux moyens de médias. Nous traiterons des médias de masse traditionnels (A) en ce que leur portée et leur influence (B) constituent des facteurs de gravité de l'atteinte à la présomption d'innocence. 1. Les mass médias traditionnelsEn France, l'article 23 de la loi du 29 juillet 1981 a énuméré les moyens de publicité des atteintes à la présomption d'innocence. Il s'agit de la presse écrite, parlée et filmée. Ce triptyque existe en droit burkinabè, depuis le Code de l'information de 1993 qui régissait l'activité de la presse écrite et de l'audiovisuel (radio et télévision). La loi n°057-2015/CNT sur la presse écrite s'applique aux journaux et périodiques paraissant à intervalles réguliers, conformément en son article 2. La loi n°059-2015/CNT régit la radiodiffusion sonore et télévisuelle sous sa forme analogique. La libéralisation de l'espace médiatique au début des années 1990 avait déjà permis la naissance de nombreux médias de masse susceptibles de véhiculer des atteintes à la présomption d'innocence et à d'autres droits de la personnalité. Leur influence est préjudiciable à l'innocence des personnes mises en cause. 2. L'influence des mass médias attentatoire à l'innocenceLes atteintes à la présomption d'innocence véhiculées par les médias portent un coup dur à la réputation et à l'honneur des victimes. « La presse est un élément jadis ignoré, une force autrefois inconnue, introduite maintenant dans le monde. C'est la parole à l'état de foudre ; c'est l'électricité sociale », disait Chateaubriand. Les médias influencent l'opinion. Une fois la culpabilité annoncée, même en cas de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement, il devient quasi impossible pour la personne lésée de laver son honneur par le même circuit informatif. Les lecteurs d'un article annonçant la culpabilité ne liront pas tous un autre écrit faisant état de l'innocence, si celle-ci venait à être établie plus tard. Par ailleurs, les médias sont marqués par leur internationalité de sorte que la mise en cause publique d'un individu opérée à un point donné de la planète est reçue à tous les endroits du monde. L'honneur se trouve gravement atteint. Prenons l'exemple de la diffusion aux Etats-Unis de l'image de Dominique STRAUSS-KAHN, menotté, faisant le tour du monde alors que dans son propre pays, l'article 35 ter de la loi de 1881 sur la liberté de presse interdit que soient montrées de telles images. Avec l'apparition de nouveaux moyens de publicité, il y a une aggravation des atteintes à la présomption d'innocence. * 102 C. A., Paris, 7 avril 1997, Légipresse, Mars 1998, n°149, 1 , p. 220 |
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