CONCLUSION
Ainsi, l'ordonnateur dirige son attention sur l'administration
qu'il tente de remettre en ordre, sur les aspects économiques qu'il
dynamise, enfin sur des réalisations scientifiques et techniques. Les
nombreuses tâches administratives qui l'accaparent l'entraînent
à assainir les finances en soldant les créances des habitants qui
pour certains couraient depuis plus de trois ans. Il réalise des
économies en supprimant des postes inutiles, en réformant
certaines procédures judiciaires, et suggère au ministre de mieux
répartir les dépenses en faisant un effort sur
l'approvisionnement. S'attachant à étudier les projets
proposés par le baron de Bessner, Malouet conteste leur
réalisation. Son administration intransigeante et pointilleuse le
confronte à de nombreuses difficultés et lui vaut
l'inimitié de nombreux habitants, qui n'hésitent pas à lui
mettre des bâtons dans les roues. Sur le plan économique, Malouet
agit en faveur de l'exploitation forestière qu'il souhaite faciliter par
la création de pépinières. Il intervient également,
mais de façon plus marginale, dans le domaine des épices. Son
action s'observe également dans la promotion de secteurs comme la
pêche et l'élevage, dans le but de ravitailler les Antilles. Ce
volet économique est prolongé par les grands travaux entrepris
pour la bonification et la reconnaissances des zones humides, opération
pour laquelle il se rend au Surinam et recrute Guisan. De fait, lors de son
départ de la colonie en août 1778, Malouet se félicite d'un
bilan globalement positif1082.
1079Jean Samuel GUISAN, Le Vaudois des terres
noyées, op. cit., p. 155. 1080ANOM C14/52 F° 93
1081Ciro Flamarion CARDOSO, La Guyane française (1715-1817),
op. cit., p. 193. 1082ANOM C14/50 F° 62
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3 LA GUYANE APRÈS MALOUET
Le bilan que dresse Malouet de son passage à Cayenne
semble positif, à la lecture de son dernier compte-rendu. Il a remis de
l'ordre dans l'administration, mis au pas les conseillers les plus
récalcitrants, soldé les créances, embelli Cayenne,
réaliser des asséchements exemplaires et productifs. Si l'on suit
ses recommandations à la lettre, il ne fait aucun doute pour lui que la
Guyane devienne le pays de Cocagne qui semble être sa
destinée1083. À en croire ses
Mémoires, son retour à Versailles en 1779 lui vaut les
honneurs générales et on salue unanimement la qualité de
son travail, laissant l'impression d'un appareil d'État dont l'attention
est accaparée par la Guyane et la réussite du plan de
Malouet1084. Toutefois, si effectivement il peut verser à son
actif quelques beaux succès, il est indéniable que durant ces
deux années il a essuyé des revers qui viennent ternir son bilan.
Ce qui est pour nous l'occasion de proposer une réévaluation
à la fois de l'image du personnage et de son travail en Guyane.
3.1 Un bilan mitigé
Si Malouet met tellement en lumière l'apport que
constitue l'arrivée de Guisan à Cayenne dans le courant de
l'année 1777, il est vraisemblable que cet artifice rhétorique
lui permet de se mettre en valeur auprès du ministre, tout en oubliant
pudiquement les échecs de bon nombre de ses entreprises. Il s'entoure
d'ailleurs de précautions à ce sujet, demandant l'indulgence
ministérielle :
« Je demande encore une fois qu'on me pardonne le
bien que je dirai de moi, en faveur de la vérité avec laquelle
j'exposerai le mal même que je pourrois dissimuler1°85.
»
En dépit de cela, une étude plus poussée
des archives fait apparaître un bilan finalement
mitigé.
1083Ibid.
1084Pierre Victor MALOUET, Mémoires de Malouet, vol.
1, op. cit., p. 165. 1085ANOM C14/50 F° 64
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