II. REVUE
EMPIRIQUE
Elément fondamental dans le pilotage de politique
éducative, l'allocation des ressources (matérielles,
financières et humaines) au niveau de ce secteur a des impacts
considérables sur l'accès et la qualité de
l'éducation. Qu'il s'agisse d'allocation intersectorielle ou
d'allocation intra sectorielle, les implications en termes de performance sur
un système éducatif national sont très significatives.
Plusieurs études ont tenté de montrer l'impact de politiques
éducatives sur les scolarisations.
Dans sa thèse SIKA (2011) s'intéresse à
la pertinence de la répartition des ressources entre écoles
primaires. Il tente de savoir comment se fait la répartition des
ressources entre écoles : cette répartition tient-elle
compte de l'équité ou de l'optimalité et permet-elle aux
écoles primaires d'atteindre des résultats efficients ? Pour
apporter une réponse à ces interrogations, l'auteur analyse,
d'une part, l'influence des dotations en ressources sur l'efficacité des
écoles primaires en Côte d'Ivoire sur la base d'une enquête
sur les compétences réalisée par le Ministère de
l'Education Nationale et d'autre part, examine l'impact du conflit
militaro-politique de septembre 2002 sur la demande d'éducation en
s'appuyant sur les données des enquêtes MICS-2000 et 2006.Pour se
faire, il utilise le score d'efficacité des écoles comme variable
dépendante dans un modèle Tobit. Il estime le modèle dans
un premier temps par la méthode du critère de performances
moyennes, et par suite, par la méthode du double critère de
performance moyenne et d'équité.
Les résultats obtenus montrent que le nombre
d'années d'expérience du directeur en tant que directeur de
l'école dans laquelle il exerce au moment de l'enquête, a un effet
significatif et positif au seuil de 5 % au CP2 dès les premières
années d'expérience, mais l'effet devient négatif aussi
bien au CP2 qu'au CE2 lorsque le directeur acquiert plus d'expérience
dans l'école. La formation continue du directeur pour la gestion de
l'école a un effet significatif au seuil de 5%, positif au CP2 mais
négatif sur les élèves du CE2. Par contre, la
première visite de l'inspecteur a un effet significatif et positif sur
les performances des élèves de CE2 au seuil de 10 %. Les
performances des élèves du CP2 s'améliorent lorsque
l'inspecteur répète les visites dans les classes tenues par les
maîtres du CP2. Ses résultats mettent également en exergue
le fait que, relativement aux enseignantes, leurs homologues de sexe masculin
ont un effet significatif et positif uniquement sur les performances des
élèves du CE2 au seuil de 1%. De plus, les performances des
élèves s'améliorent dans les classes du CE2 lorsque
l'enseignant est titulaire d'un diplôme académique
supérieur ou que le nombre d'années d'expériences de
l'enseignant dans la tenue de sa classe s'accroît.
A la suite des résultats obtenus, SIKA propose des
recommandations ciblées vers les décideurs de la politique
éducative et vers les parents d'élèves. Quelques-unes
d'entre elles sont :
- Partager les charges inhérentes à la
création et au fonctionnement de l'école, de même que les
responsabilités de gestion, au moment précis où le pays
s'est engagé dans un vaste processus de reconstruction ;
- Développer des mesures incitatives pour les
enseignants ;
- Veiller à l'équité dans l'allocation
des ressources faites aux écoles ;
Il apparait clairement au vu de ces recommandations que le
système éducatif ivoirien a besoin d'un bon nombre de
réformes. Un diagnostic détaillé et couvrant tous les
niveaux du système éducatif national a été
opéré entre novembre 2007 et avril 2009, conduisant à
l'élaboration du « Rapport d'Etat du Système
Educatif National » (RESEN). Ce rapport, publié en
2011 par la Banque Internationale pour la Reconstruction et le
Développement et la Banque Mondiale, est le
résultat d'une étroite collaboration entre la Banque Mondiale et
le Gouvernement de Côte d'Ivoire, avec la contribution du Pôle de
Dakar (UNESCO-BREDA). Ce diagnostic a permis un état des lieux
détaillé du système éducatif ivoirien du point de
vue :
i) des ressources qu'il mobilise ;
ii) des modalités concrètes de son
fonctionnement aux différents niveaux d'enseignement et les
différents types d'études ;
iii) des résultats qu'il obtient.
Ce diagnostic a permis à la fois d'évaluer le
niveau d'efficience et d'équité du système (et de ses
différentes composantes) et de cerner l'origine des difficultés
rencontrées. Il fait d'abord état du fait que le pays a connu un
contexte macroéconomique difficile d'abord dans les années 1990,
période de l'ajustement structurel, ensuite dans la période
récente. Mais dans ce contexte difficile, il apparait que les
contraintes intersectorielles ont aussi eu comme conséquence une
diminution de la priorité budgétaire pour l'éducation;
très élevée dans la première moitié des
années 1990 (de l'ordre de 35 % des dépenses courantes
affectées à l'éducation), cette priorité a
baissé de manière significative pour atteindre 25 % en 2007. La
combinaison d`un contexte macroéconomique défavorable et d'une
priorité budgétaire moindre pour l'éducation,
ajoutée à l'impact de la croissance démographique, a
conduit à ce que le volume de ressources publiques par jeune de 6 -15
ans (un indicateur des possibilités du système à offrir
des services éducatifs à sa population) baisse pratiquement de
moitié en termes réels entre les années 1990 et 2007.
Cette baisse a conduit à une augmentation du financement privé
des services éducatifs, qui est estimé représenter plus ou
moins la moitié des dépenses publiques pour le secteur.
A la suite du RESEN, un travail de recherche a réuni
les trois ministères en charge du secteur (Ministère de
l'Education Nationale, Ministère de l'Enseignement Technique et de la
Formation Professionnelle, Ministère de l'Enseignement Supérieur)
autour d'un modèle de simulation. Ce travail a permis d'arrêter
les grandes orientations d'un scénario de développement qui doit
permettre à la Côte d'Ivoire d'approcher la scolarisation primaire
universelle à l'horizon 2020 d'une manière soutenable. Ces
orientations ont été identifiées lors d'un atelier
à Paris en mai 2009, auquel participaient des délégations
des trois ministères, chaque délégation étant
conduite par le Directeur de Cabinet du Ministre, et quelques partenaires
techniques et financiers (AFD, UNESCO, UNICEF, Banque Mondiale).Le
scénario retenu a fait l'objet d'une description détaillée
dans une « note de cadrage » de juin 2009,
puis d'une « lettre de politique
sectorielle ». La lettre de politique sectorielle a
été adoptée formellement par le Conseil des Ministres du 3
juin 2010. Elle définit les bases d'une politique d'éducation et
de formation nouvelle et ambitieuse. La vision du Secteur à travers la
lettre de politique éducative se fonde sur
laStratégiedeRéductiondelaPauvreté(SRP),lesObjectifsduMillénairepourle
Développement(OMD),laConventionsurlesDroitsdel'Enfant(CDE)etlesobjectifsde
l'Education Pour Tous (EPT). Cette vision de moyen terme (horizon 2020) se veut
être une vision qui soit une réponse efficace d'une part, aux
difficultés identifiées dans le diagnostic et d'autre part, au
double enjeu i) d'une progression significative vers l'objectif
d'achèvement universel d'un cycle primaire de qualité et ii) de
la définition d'une structure et d'une qualité des scolarisations
aux différents niveaux et types d'études qui corresponde aux
besoins du développement économique et social du pays.
A la suite de la lettre de politique sectorielle, un Plan
d'Actions à Moyen Terme (PAMT) du secteur Education/Formation a
été élaboré. Ce document constitue la traduction
opérationnelle des
orientationscontenuesdanslalettredepolitiquedusecteur.Décrivantlesactivitésà
entreprendre dans les trois prochaines années, ce plan
budgétisé est conforme au scénario d'expansion retenu pour
fonder les bases solides et saines d'un développement à long
terme tel qu'envisagé dans le cadre du plan décennal
(2010-2020).
Dans le but de mettre à la disposition des trois
ministères, en charge de la gestion du secteur de l'éducation, un
outil opérationnel adapté aux besoins de projection et de gestion
de chaque sous-secteur de l'Éducation/Formation dans la perspective du
futur programme sectoriel, un« Cadre de dépenses
à Moyen Terme »a été
élaboré parchaque ministère.
Tous ces documents permettent aujourd'hui à l'Etat
ivoirien de formuler des requêtes crédibles auprès de
bailleurs de fonds internationaux, afin d'avoir accès à des
financements extérieurs en vue d'une relance, du secteur éducatif
en particulier et de l'économie ivoirienne en général.
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