I.2.1. Origine de
l'étude du pidgin
Les études sur le pidgin commencent au début du
19e siècle (Meijer et Mysken 2009 :188). Selon ces
chercheurs, la première personne qui entama ces études
était Adolpho Coelho dans l'une de ses publications
intitulée : « os Dialectos Romanicos ou Neo- Latinos
na Africa, Asia es America » (Meijer et Mysken ibid. :191).
Bien que d'autres chercheurs aient (Hugo Schuchardt &
Hesseling : 2009, August Schleicher, Holm : 2000)
développé des théories sur l'origine des Pidgins, ce
terrain jusqu'à une époque n'était pas très
fascinant et par conséquent pas très exploité. Romain
(1988 :4) souligne cependant que Decamps (1971a :31) et les autres
reconnaissent Schickhardt comme l'un des plus grand chercheurs en ce qui
concerne l'étude sur le pidgin et le créoles. Schuchardt est
reconnu pour son article intitulé : Kreolishe Studien.
Dans cet article, l'auteur démontre que le pidgin et le
créole sont des concepts très complexes qui résultent
indépendamment des conditions sociales très particulières.
Ils ont des systèmes grammaticaux sensiblement différents de ceux
de leurs langues d'origine (Mc Whorther, 1997 :1).
Au cours des années 1950 lorsque le pidgin et les
créoles furent établis comme discipline, ils n'étaient
toujours pas un terrain prisé par des chercheurs, car le pidgin
était toujours considéré comme la langue des esclaves qui
fut introduite en Afrique par des esclavagistes. Pour aller dans le sens de ces
différentes théories, Meijer et Muysken (2009 :189)
soutiennent même que les différentes opinions sur cette langue
étaient relatives à l'esclavage. Holm (2000 :1) asserte que,
le pidgin a été en grande partie ignoré par les premiers
linguistes ; non pas en raison de leur malentendu sur son identité,
mais surtout parce que, il ne cadrait pas avec la définition puriste de
la notion de langue. Les Européens croyaient à la tradition
gréco-romaine de la rhétorique à savoir les belles
lettres, le raffinement dans le langage à l'oral et à
l'écrit, le respect de la norme syntaxique.
Par ailleurs, les linguistes considèrent, les langues
comme des entités relativement stables et fixes et non comme de langues
pouvant être « corrompu » (Holm ibid. :
2). Ceci explique pourquoi Jonathan Swift (1712 :15) cité par Jones
et Singh (2005 :1) associent les variations linguistiques à la
corruption linguistique, un processus qui selon eux devrait être
réexaminé. Ils diront même à cet effet que:
« I see no absolute reason why any language will be perpetually
changing ». (Je ne vois aucune raison absolue pour laquelle une
langue devrait connaitre des changements perpétuels).
Cette idée de Jones et Singh est cependant battu en
brèche par Thomason et Kaufman (1988 :9) qui pensent que toutes
les langues connaissent des mutations avec le temps car, une langue n'est pas
une donnée statique, inerte, incapable de changement. La langue est
vivante et pour cela, elle connait des variations suivant des
époques ; elle évolue avec l'histoire. Le même
argument sera évoqué par Campbell (2004 :291-20) qui
défend sa position lorsqu'il soutient que le changement commence
généralement par la variation et la variation est
conditionnée par des différences sociales telles que l'âge,
le genre, le statut sociale. Ceci revient tout simplement à dire que le
changement d'une langue est inévitable.
Le terme « pidgin » connait cependant
plusieurs appellations. Il est considéré comme une
langue « anormale », « langue
des illettrés », « broken
english » pour certains, « bad
english » pour d'autres. Ces multiples patronymes sont aussi
vérifiables dans le cycle de vie de cette langue. Cycle qui est
développé par Hall (2009 :171) lorsqu'il dit :
« « Normal » language does
not have life cycle. A language is not an organism, but a set of habits handed
down from one generation of speakers to another, so that the customary
expressions « mother-tongue and « daughter
language » are, at best, nothing but metaphor».
Pour l'auteur, le cycle de vie d'une langue normale dure aussi
longtemps que la communauté qui la parle, car même lorsque les
membres de cette communauté tendent à disparaitre, ceux qui
restent s'accrochent à la langue parce que cela est une marque de leur
identité. Par contre, le pidgin intervient pour un besoin
spécifique et dure aussi longtemps que le besoin se fait encore
ressentir et disparait aussi tôt une fois le manque comblé (Hall,
ibid. : 172). Cette vision négative de la langue pidgin est
aussitôt rejetée par Amadou Bissiri (2001 :771-782) lorsqu'il
dit que : le cycle de vie d'une langue normal est changeant. Gisèle
Prignitz (1998 :8) continue en ce termes : « une
langue qui génère ses propres représentations, qui se
reconnait dans sa forme et dans ses fonctions, qui suscite des discours sur le
bien- fondé de ses normes est une vraie langue. Une vraie langue
mérite d'être pise au sérieux ».
Toutcompte fait, l'on se rend compte que les origines sur
l'étude du pidgin n'ont pas été pas très facile,
pour la simple raison que les concepts sont très complexes et leurs
conditions de naissance très particulières. Naissance qui nous
amène à parler de la théorie sur les origines de cette
langue.
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