Les contes et les mythes en pidgin : facteur d'éducation de l'enfant dans la société africaine traditionnelle dans la région du sud- ouest (BUEA)( Télécharger le fichier original )par Anne OBONO ESSOMBA Université de Yaoundé I - Doctorat en littérature orale et linguistique 2014 |
Chapitre VI : LES ACTEURS ET LE CADRE DE L'EDUCATIONVI.1. LES ACTEURS DE L'EDUCATIONSous le terme « acteurs de l'éducation» nous nommons tous ceux qui de près ou de loin participent ou influencent d'une manière ou d'une autre l'enfant dans son processus éducatif. Notons ici que ces acteurs ont un rôle prépondérant et déterminant dans la formation et l'assise du caractère, du comportement et de la personnalité des enfants. Ils ont la lourde tâche, non seulement, de montrer à l'enfant tout ce qui est utile dans la formation de son moi social mais aussi, par un système dualiste de sanction et de récompense, de conseil et déconseil, ils façonnent ce moi social d'une façon non pas latente mais manifeste en stricte conformité avec le permis, ce que la société reconnaît comme valeur positive, ce qu'elle admet comme conduite à tenir et propose comme modèle à suivre. Ce rôle est d'autant plus important lorsqu'on sait que c'est pendant l'enfance que se fonde tout l'être d'un individu, de sorte qu'il est communément pensé et admis que: l'enfant est le père de l'homme. Ainsi toute perspective de changement social qui se voudrait solide, devrait s'opérer sans nul doute à cette phase de la vie de l'homme. Certains contes et mythes, il est utile de le dire, serviront de guide pour apprécier le poids de ces acteurs qui sont: La famille à travers les parents (père; mère et la marâtre comme c'est le cas dans plusieurs de nos contes), les grands parents et les autres membres de la famille (oncle, tante); la société enfantine qui constitue la classe d'âge de l'enfant; la société globale et enfin ne l'oublions pas, l'enfant lui-même qui est un acteur principal dans sa propre éducation. VI.1.1. La familleLa famille aux dires de nombreux sociologues est la cellule de base de toute société humaine, c'est un microcosme social au sein duquel chaque membre possède un rôle bien déterminé, en fonction de la place qu'il y occupe. C'est au sein de cette cellule que s'effectue pour l'enfant, l'essentiel des fondements de son éducation et où on lui montre de façon très projective, la vie telle qu'elle est vécue dans la grande instance qu'il est convenu de nommer la communauté. C'est aussi, en ce lieu que la personnalité sociale de l'enfant se forme pour s'accomplir plus tard (tel qu'il est pensé comme projet) au sein de la communauté traditionnelle. En Afrique, la notion de famille est différente de la conception qu'elle revêt dans la société occidentale. Si elle se résume au fameux « triangle oedipien»19(*)en Europe, en Afrique par contre : « C'est le groupe étendu qui constitue indépendamment des systèmes qui le régissent, la cellule de base de la société, la personne morale fondamentale et le milieu éducatif le plus immédiat» (P.Erny, 1972 :55). C'est ainsi que dès sa naissance, l'enfant est confronté très vite à une ambiance de convivialité, de solidarité dans laquelle semble se baigner tous les membres de la famille. Très tôt, il sera informé sur l'attitude qu'il devra avoir face aux différents membres de la famille. Famille qui est réglée elle-même par et autour du groupe, de parenté20(*). C'est pourquoi, outre l'enseignement généalogique: « l'une des premières notions que les enfants apprennent est celle des limites familiales en deçà desquelles ils ne pourront se marier. La règle essentielle est que deux personnes ne peuvent se marier si elles appartiennent au même lignage» (MbalaOwono, 1990 :33). Par cet enseignement, l'enfant est éduqué comme dans le conte bassa: la jeune fille désobéissante(Beling-Nkoumba, 1985 :61-64) sur tous les membres avec qui il possède les liens de sang et sur tous ceux avec qui il entretient une relation d'alliance. C'est ainsi qu'en Afrique, l'enfant peut posséder plusieurs familles: une qui se confine à son père, sa mère et ses frères et soeurs s'il y en a, une dont les individus proviennent de la famille de son père et de sa mère et, parfois une autre constituée des individus d'une autre famille qui s'est alliée à la sienne et par extension, il est membre de la famille étendue que constitue le groupe social tout entier. Cette famille élargie est très importante lorsqu'on sait qu'en Afrique, la solidarité au sein de la cellule familiale est primordiale, de sorte que, lorsque les parents viennent à disparaître, on ne voit pas d'un mauvais oeil que les enfants aillent vivre auprès de l'un des membres de la famille étendue. Comme c'est le cas dans le conte Dylim's children. C'est pourquoi les parents très tôt apprennent à leurs enfants, le respect des membres de la famille et, ces derniers ont en retour, un droit de regard, voire une certaine responsabilité dans l'éducation de ces enfants. Mais, comme nous allons le voir dans cette partie consacrée à la famille, chacun des membres exerce une influence certaine sur l'éducation de l'enfant. Nous consacrons ici le rôle des parents (le père, la mère, la marâtre) puis nous verrons dans la famille, le rôle des grands parents et ensuite les autres membres qui sont souvent l'oncle ou la tante. Loin d'être de simples géniteurs, les parents sont ceux-là qui pourvoient au bien-être physique, moral, intellectuel et social des enfants. Leur importance est d'autant plus grande qu'en Afrique on a toujours tendance à dire « c'est l'enfant de tel ... ». Ceci pour signifier en bien ou en mal que les enfants ne sont que le produit de l'éducation que leur donne ceux-ci. Dans une large mesure, les enfants ne sont que le résultat palpable de l'être même des parents, de leur manière d'agir et d'être, leur vision du monde et la façon dont ceux-ci perçoivent le monde. Cet être constitutif des parents va jouer sur la manière dont les tous petits, devenus grands élèveront ou éduqueront à leur tour leurs enfants. C'est pourquoi « le surmoi de l'enfant (. . .) ne se forme donc non pas à 'image des parents, mais à l'image du surmoi de ceux-ci, il s'emplit de tous les jugements de valeur qui subsistent à travers les générations » (G.Rohein,1961 :94-95). Essayons à présent de voir le rôle des différents parents. Le père dans nos sociétés africaines à prépondérance patriarcales. Il est un patriarche, c'est le chef de famille, celui à qui on doit soumission, obéissance et déférence. L'exemple de Kouma, dans le conte L'union fait la force, qui règne avec prestance sur une foule de femmes, d'enfants et de petits enfants en est un exemple illustrateur. Le père est le garant du respect des traditions et normes sociales au sein de la famille. En quelque sorte il est comme le délégué de la société auprès de la famille. Dans nos familles africaines patriarcales, c'est par lui que l'enfant a sa personnalité sociale, son nom et même certains acquis qui pourront l'intégrer au sein de la société des adultes (une femme, une case). Sa position dans la famille, lui confère des responsabilités qui vont, de son rôle de pourvoyeur aux besoins économiques à celui de responsable morale de tout ce qui peut affecter l'intégrité physique, morale de son épouse et surtout de ses enfants. Ces rôles dépassent le cadre même de sa propre vie en tant qu'il doit s'assurer avant sa mort, de ce qu'il aura laissé pour ses enfants et son épouse le nécessaire à leur survie et à leur plein épanouissement. Si de nombreuses études ont été faites sur le père dans nos sociétés traditionnelles, force est de reconnaître que son rôle est parfois ambivalent, d'autant plus qu'une analyse brève de notre corpus de contes et mythes, nous amène à lui reconnaître un caractère extrémiste : il est soit bon soit mauvais, présent ou absent, responsable ou irresponsable. Ainsi d'un côté, nous avons l'image de ce que l'on peut convenir d'appeler: de bons pères que nous retrouvons dans les contes comme L'union fait la force ou encore La jeune fille désobéissante qui ont pour principal objectif l'éducation de leurs enfants selon les normes et valeurs traditionnelles. Nous verrons par exemple le père dans Les mauvais génies du champ de mil, qui ne recule même pas devant les forces surnaturelles (les mauvais génies) pour protéger la vie et la santé de sa fille. Le père dans le conte Noana et ses soeurs, n'hésite pas à jeter sa méchante épouse dans le puits où elle avait voulu faire périr les jeunes orphelines Noana et ses soeurs. De même soucieux de l'avenir de sa progéniture le père n'hésite pas avant de mourir (même s'il est pauvre), à donner des conseils utiles pour une vie harmonieuse (Kourna dans L'union fait la force), ni à laisser un héritage qui mettra sa progéniture à l'abri de certains besoins le père dans le conte (Les trois frères). Dans Tout n'est pas d'être l'aîné, encore faut-il avoir du bon sens, le père revient même après sa mort, sous les traits d'un être surnaturel afin d'essayer l'améliorer les conditions de vie de son fils aîné qu'il avait laissé pauvre et indigent. Dans un tout autre cadre, le père, comme c'est le cas dans le conte 1dodokwam, l'enfant maillet, se montre irresponsable, méchant, n'hésite pas à abandonner ses enfants (Ndodokwam et sa soeur aînée) sans protection et surtout sans s'inquiéter de ce qu'ils deviendront. Le père dans The orphan boy, est même cofrustrateur aux côtés de sa méchante épouse. Il n'hésite pas à la demande de cette dernière, à envoyer son fils à la recherche de jeunes lionceaux sachant pertinemment, qu'il pourrait y laisser sa vie. L'absence du père est cause d'un malaise existentielle pour les enfants, surtout, lorsqu'ils doivent faire face comme c'est le cas dans Noana et es soeurs à la méchanceté et la cruauté de leur marâtre. Dans L'orpheline et la vieille femme, le père est même tellement absent que le sort de l'orpheline dépend même des forces du destin. Cette absence consacre, le malheur de la jeune orpheline au point où elle devient le jouet de la marâtre qui fait d'elle ce qu'elle veut. La présence enfin du père, aux côtés de sa femme n'est souvent pas évoquée ceci marque quelque peu le poids du patriarcat dans la société traditionnelle africaine. Qu'en est-il du rôle de la mère ? Il n'y a pas souvent de mots pour décrire l'importance qu'une mère a pour sa fille, pour son mari et surtout pour ses enfants car ces derniers sont la condition du bonheur d'une femme de sorte qu'être mère est un titre qu'on porte fièrement. Aussi dit-on qu' « il faut être mère pour être pleinement femme » (Dong Aroga, cours LINA). La mère est la gardienne de l'équilibre, le socle sur lequel repose le bien être affectif des enfants et, elle est plus qu'un parent: l'âme de la famille, elle constitue le modèle de conduite, d'agir et d'être auquel les enfants et surtout veulent souvent ressembler. Si son importance dans les sociétés matriarcales21(*) africaines est prépondérante, force est de reconnaître que ces sociétés sont rares aujourd'hui. Dans nos contes en effet, si la femme mère se trouve au milieu d'une société patriarcale et machiste, son rôle et sa présence parfois effacés ne sont qu'un mirage. Car contrairement à une pensée souvent occidentale qui fait de la femme africaine un martyre, c'est elle « qui prend les décisions importantes au sujet de ses enfants, de famille, de son entourage immédiat » (F.Bebey, 1992 :41). Son rôle est d'une importance capitale car c'est par elle que se dénouent les drames, c'est elle qui rompt les forces d'inerties et les forces du mal. Dans le conte mauvais génies du champ de mil, c'est la vigilance de la mère qui sauve la fille du paysan, car c'est lorsqu'elle avertit son mari des agissements des mauvais génies que son mari s'engage à les faire périr. La défunte mère de Noana et soeurs dans le conte qui porte leur nom avertit son mari des agissements de sa méchante épouse, ce qui pousse le mari à se venger de cette dernière. C'est ainsi que, sa présence est admise et convenue comme immortelle, ceci parce que même sa mort dans l'imagerie populaire africaine ne la dérobe à la vie. Ile est partout, son lien qui se crée depuis la conception de l'enfant, jusqu'à sa mort ne se rompt jamais. C'est donc ainsi que, nous avons vu que, même morte elle revient sous une forme ou une autre à la rescousse de son enfant en danger. Le conte oku The orphan boy où la mère (défunte) du jeune orphelin joua un rôle indubitable dans la réussite de ce dernier dans la quête du tambour au pays des enfers en est un exemple illustrateur. Lorsque la mère est présente aux côtés de ses enfants comme dans Les cadetsD'IDIRIWONG, elle joue son rôle originel c'est-à-dire son rôle de protectrice s'inquiétant à chaque instant de la vie de ses enfants. C'est ainsi que lorsque Addias et Bidias révélèrent à leur mère leur voeu d'aller à la rescousse de leur soeur aînée IDIRIWONG, elle ne peut s'empêcher de leur dire de ne pas y aller de peur de les perdre. Lorsqu'elle est mourante, son intuition malgré son indigence prend le pas et guide les enfants vers la sécurité bienfaitrice qu'elle ne peut leur assurer physiquement (la mère dans Dylim's children). Enfin, même après avoir été obligée d'agir mal, à l'encontre de ses enfants, comme c'est le cas dans NDODOKWAII, l'enfant maillet, une sorte de lien indestructible rappelle la mère auprès de ses enfants. · La marâtre La marâtre, dans les contes est l'épouse du père pour les enfants nés d'un autre mariage. Nous avons voulu la ranger dans le rôle de parent parce qu'elle est souvent emmenée à jouer ce rôle en l'absence de la véritable mère des enfants, qui par la force des choses, a été prise par la force intransigeante qu'est la mort. Dans les contes elle constitue l'un des parents de l'orphelin et joue un rôle d'amélioratrice involontaire du sort de ce dernier. Sa méchanceté, sa cruauté et même sa jalousie comme c'est le cas dans L'orpheline et la vieille femme la conduit à faire travailler les enfants de sa coépouse morte jusqu'à épuisement. Mais ce qu'elle ignore souvent, c'est que l'orphelin ou l'orpheline subit ainsi une initiation au terme de laquelle celles-ci triomphent souvent de leurs peurs, de leurs faiblesses, et de leur infantilité pour devenir un être mûr. C'est le cas du jeune orphelin dans le conte The Orphan Boy qui devient Chef de son village auterme d'une épreuve où il était prédestiné à une mort pensée et mise en projet par la méchante épouse de son père. La punition, à une telle méchanceté, c'est la stérilité, ou la douleur d'assister impuissamment à la mort de ses enfants après leur naissance (les enfants de la marâtre dans le conte; Noana et ses soeurs) ou, encore le malheur de ne mettre au monde que des enfants méchants, paresseux qui ne sont rien d'autres que son exacte réplique. Plus que décidée d'empêcher les enfants du premier lit d'hériter de leur père, elle est prête à tout même à vendre son âme au diable mais fort heureusement, même au pays des morts, les mères défuntes arrivent par quelques moyens que se soient à vaincre le mal et à provoquer la mort de la marâtre qui est une négation de idéal humain dans la société traditionnelle. Ø Les grands-parents Les grands-parents sont les parents des parents de l'enfant. Du fait de leur âge généralement très avancé et par conséquent et des sagesses engrangées, ils sont ceux-là qui transmettent aux tout-petits, les traditions, les normes et habitudes du groupe. Parce qu'ils connaissent sur les bouts des doigts les ancêtres en tant qu'ils sont dans une période de vie transitoire, ils sont ceux-là qui sont reconnus comme ceux qui ont la dextérité et les moyens d'enseigner la généalogie et les limites de la famille. Se situant entre un passé idéalisé et un présent à parfaire les grands parents parce qu'ils n'ont souvent rien à faire réclament souvent leurs petits enfants. Ainsi, en est-il de la grand-mère dans le conte Oku The orphan Boy qui alla demander, son petit-fils à son père après la mort de sa mère. Ce voeu pour les grands-parents de rester auprès des enfants n'est pas gratuit. Considérés comme des « bibliothèques humains », c'est à eux qu'incombe le rôle d'enseigner la tradition orale notamment à travers les contes, les devinettes et les fables. Les rapports des enfants avec les grands-parents sont souvent des relations proches de celles qu'ont les enfants avec leur classe d'âge. Ces relations sont marquées par une sorte de complicité, d'amitié doublée de respect et d'amour. Dans le conte The orphan boy, le jeune orphelin qui avait été chargé par son père (convaincu par sa méchante femme) de ramener de jeunes lionceaux alla se confier comme à un confident en qui on a toute confiance, à sa grand-mère qui, émue, lui donna des conseils sages et protecteurs qui l'aidèrent, à la grande déception de la marâtre, à réussir sa mission. Par ailleurs, il est communément admis qu'en Afrique, les grands-parents sont des forces protectrices contre tous les malheurs qui peuvent affecter la vie des enfants. Ils sont ceux sans qui la vie n'aurait pas de sens. C'est dans ce sens que dans un entretien avec François Champion, Lydie Dooh-Bunya: romancière camerounaise, parlant justement de l'importance des grands-parents dans la famille africaine, affirma : « Je me dis que si tous les enfants du monde avaient eu, ne serait-ce que pendant un laps de temps, des grands-parents comme moi j'en ai eu, il y aurait pour eux une telle richesse d'affection que beaucoup de choses ne pourraient pas les atteindre cruellement. »22(*) Les grands-parents ont donc un rôle indéniable dans l'éducation de l'enfant dans la société traditionnelle africaine. Ø Les autres adultes membres de la famille Au nombre des membres de la famille l'oncle et la tante sont souvent pour les enfants des confidents. Nous n'avons pas voulu dissocier leur rôle ici, parce que malgré ce qu'on pense, qu'on soit dans une société matriarcale ou patriarcale, ceux-ci constituent le soutien que les enfants recherchent lorsqu'ils sont attristés. La seule motivation qui guide les enfants à aller vers eux, à cette période, c'est qu'ils savent que seuls les frères ou les soeurs de leurs parents, parce qu'ils ont grandi ensemble, parce qu'ils ont des liens de sang, ont le privilège indéniable d'influencer leur décision. En ce qui concerne l'oncle, surtout dans les sociétés matriarcales, son rôle est même souvent égal à celui du père et celui-ci est d'une grande importance lorsque le tout petit devenu un homme, émet le voeu de prendre femme. Ses conseils et son poids influencent alors grandement les pourparlers de mariage. Si par malheur les parents venaient à disparaître, c'est à l'oncle ou la tante qu'on confie la charge d'éduquer les enfants, de les faire passer de leur état d'incomplétude à l'état de plénitude. Dans le conte Dylim's children, Dylim qui savait que sa mort était déjà imminente, du fait de sa grande maladie, donna une graine de melon à ses trois enfants et leur recommanda de la planter et d'aller habiter, après sa mort, là où la graine aurait arrêté de pousser. Connaissant la portée de la poussée d'une tige de melon elle savait que ses enfants iraient habiter chez la seule personne susceptible de s'occuper d'eux: sa soeur Kfukfu, leur tante. Cette dernière ne sachant pas qui étaient ces enfants les maltraita jusqu'au jour où, après avoir surpris leur chant, elle comprit que c'était les enfants de sa soeur Dylim disparue. Prise par une grande contrition, par le poids du lien de sang qui pesait désormais sur ses épaules, elle prit la ferme résolution de s'occuper de ses neveux avec le plus grand soin. Comme nous le voyons, le poids du sang qui lie une tante à ses neveux est un poids difficile à porter. Ce poids est réel d'autant plus que faire du mal à son neveu ou à sa nièce pour l'oncle ou la tante est un grand sacrilège, une transgression morale lourde. Si donc, la plus grande partie de l'éducation de l'enfant se passe au sein de la cellule socio-éducative que constitue la famille, celle-ci est loin d'en être le seul acteur. Comme nous allons le voir, la classe d'âge de l'enfant est une continuation de ce processus d'intégration de l'enfant dans la société traditionnelle. * 19Terme signifiant la triade : père, mère et enfant * 20 Relation de consanguinité ou d'alliance qui unit les individus d'une famille entre eux * 21 Les sociétés matriarcales sont celles ou le système social politique et juridique repose sur l'autorité prépondérante des femmes dans la famille et ou celles-ci occupent des fonctions politiques importantes. * 22 Interview de François Champion sur Lydie Dooh-Bunya in Notre librairie, « Enfants d'hier, enfant d'aujourd'hui »nN0 51, décembre 1979, P .33. |
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