L'efficience des patrimoines d'affectation en droit privé( Télécharger le fichier original )par Romain Coquet Université de Bretagne occidentale - Master 2 Droit privé fondamental 2012 |
C- L'autonomie relative de la fondation d'entreprise1- La responsabilité des membres du conseil d'administrationLe conseil d'administration peut prendre toutes les décisions conformes à l'intérêt de la fondation d'entreprise. Il décide ainsi des actions en justice et des emprunts, vote le budget et approuve les comptes549(*). Le président du conseil d'administration dispose également de pouvoirs propres. Il peut ainsi demander l'autorisation de modification des statuts de la fondation au regard de l'article 10 alinéa 1er du décret de 1991. Le président peut décider de l'opportunité d'une action en justice sauf dispositions statutaires ou décisions des organes délibérants de la fondation d'entreprise550(*). En revanche, la fondation d'entreprise est dépourvue de but lucratif, ainsi sa gestion est désintéressée. Les membres du conseil d'administration exercent donc leurs fonctions à titre gratuit551(*). Ils peuvent engager leur responsabilité civile en raison des fautes commises dans leur gestion. En vertu de l'article 1992 alinéa 1er du Code civil, « le mandataire répond non seulement du dol, mais encore des fautes qu'il commet dans sa gestion ». Néanmoins, il convient de tempérer cette affirmation puisque les administrateurs mandataires ne sont pas rémunérés pour leur mission. L'article 1992 alinéa 2 du Code civil dispose ainsi que « la responsabilité relative aux fautes est appliquée moins rigoureusement à celui dont le mandat est gratuit qu'à celui qui reçoit un salaire ». Dans la pratique, c'est au président du conseil d'administration qu'il incombe d'intenter une action en responsabilité. Par ailleurs, la fondation d'entreprise est responsable des fautes de gestion commises par le président à l'égard des tiers. La fondation d'entreprise peut également engager sa responsabilité pénale, à l'instar de toute personne morale552(*). Elle peut subir une peine d'amende ou la dissolution. Au regard de l'article 121-2 alinéa 3 du Code pénal, « la responsabilité pénale des personnes morales n'exclut pas celle des personnes physiques auteurs ou complices des mêmes faits ». 2- Le double contrôle de la fondation d'entrepriseLe contrôle interne de la fondation d'entreprise est assuré par un commissaire aux comptes, dont la nomination et celle de son suppléant est obligatoire553(*). Le commissaire aux comptes attire l'attention du président ou des membres du conseil de la fondation d'entreprise « sur tout fait de nature à compromettre la continuité de l'activité qu'il a relevé au cours de sa mission »554(*). Il demande au conseil d'administration d'en délibérer et assiste à la réunion. Si le commissaire aux comptes constate que la continuité de l'entreprise demeure compromise, il établit un rapport spécial adressé à l'autorité administrative. Celui-ci encourt une peine de cinq ans d'emprisonnement et d'une amende de 75 000 € s'il donne ou confirme des informations mensongères sur la situation de la personne morale. Il en est de même si le commissaire aux comptes ne révèle pas au procureur de la République les faits délictueux dont elle a connaissance555(*). En outre, le préfet dispose d'un pouvoir général de surveillance fondé sur la loi du 23 juillet 1987. L'article 19-10 de la loi précise à ce titre que « l'autorité administrative s'assure de la régularité du fonctionnement de la fondation d'entreprise ». Elle peut ainsi se faire communiquer tout document et procéder à toute investigation utile. Ce contrôle administratif s'accompagne d'une obligation d'information à la charge de la fondation d'entreprise. Les membres de la fondation doivent informer le préfet, dans les trois mois, de tout changement survenu dans son administration ou sa direction556(*). Pour légitimer ce contrôle, Michel Pomeyaffirme ainsi que l'exercice d'une activité d'intérêt général par le financement privé justifie le contrôle de l'autorité administrative557(*). L'article 19-9 de la loi du 23 juillet 1987 précise en outre que la fondation d'entreprise doit établir chaque année un bilan, un compte de résultat et une annexe. Si elle ne respecte pas cette obligation, la fondation est condamnée à une amende de 9000 €558(*). Les fondations d'entreprise qui reçoivent au moins 153 000 € de dons annuels doivent publier leurs comptes et le rapport du commissaire aux comptes au Journal officiel. La loi du 30 décembre 2009 vise ainsi « tout organisme bénéficiaire de dons de personnes physiques ou morales ouvrant droit, au bénéfice des donateurs, à un avantage fiscal »559(*). Dès lors que la fondation d'entreprise atteint ce seuil, elle semble donc être astreinte à une telle obligation de certification des comptes. Enfin, les fondations d'entreprise dont le montant du chiffre d'affaires hors taxes dépasse 18 millions d'euros ou qui comptent trois cents salariés sont tenues d'établir une situation de l'actif réalisable et disponible et du passif exigible, un compte de résultat provisionnel, un tableau de financement et un plan de financement560(*). * 549 Article 19-5 alinéa 1er de la loi du 23 juillet 1987 modifié par la loi du 4 juillet 1990 * 550Civ 1ère 07/11/1995, n° 1995-002879. * 551 Article 19-4 alinéa 3 de la loi du 23 juillet 1987. * 552 L'article 121-2 alinéa 1er du Code pénal précise que « Les personnes morales, à l'exclusion de l'Etat, sont responsables pénalement, selon les distinctions des articles 121-4 à 121-7, des infractions commises, pour leur compte, par leurs organes ou représentants ». * 553 Article 19-9 de la loi du 23 juillet 1987 modifié par la loi du 1er août 2003. * 554 La fondation d'entreprise peut à ce titre faire l'objet d'une procédure d'alerte prévue aux articles L 612-1 à L 612-5 du Code de commerce. * 555 Article L 820-7 du Code de commerce. * 556 Article 9 du décret du 30 septembre 1991. * 557 M. POMEY, « Traité des fondations reconnues d'utilité publique », PUF, 1980, n° 2160, préc. * 558 Selon l'article L 242-8 du Code de commerce, « est puni d'une amende de 9000 euros le fait, pour le président, les administrateurs ou les directeurs généraux d'une société anonyme, de ne pas, pour chaque exercice, dresser l'inventaire et établir des comptes annuels et un rapport de gestion ». * 559 Article 4-1 de la loi du 23 juillet 1987 modifié par la loi du 30 décembre 2009. * 560 Article L 612-2 du Code de commerce. |
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