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De la souveraineté permanente de la RDC sur ses richesses et ses ressources naturelles: examen de l'Article 09 de la Constitution du 18/02/2006

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par Guillain Cirhuza Koko
Université catholique de Bukavu - Licence en droit public 2007
  

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CHAPITRE Ier : CLARIFICATION CONCEPTUELLE

Le droit, disait Remy CABRILLAC, constitue une science24 dont la rigueur repose sur la précision de langage (...). Un terme juridique employé à la place d'un autre terme du langage courant peut emporter des conséquences aussi fondamentales qu'indésirables. Cette impeccable citation est pleinement justifiée à l'égard de l'article 9, objet du présent travail. Il dispose : « L'État exerce une souveraineté permanente notamment sur le sol, le sous-sol, les eaux et les forêts, sur les espaces aérien, fluvial, lacustre, et maritime congolais ainsi que sur la mer territoriale congolaise et sur le plateau continental. Les modalités de gestion et de concession du domaine de l'Etat visé à l'alinéa précédent sont déterminées par la loi».

Pour procéder à son examen, deux problèmes essentiels vont nous préoccuper tout au long de ce chapitre, d' une part l'analyse de l'alinéa 1er dudit article, (qui pose le principe de la souveraineté permanente..), d'autre part l'analyse du second alinéa, (qui prévoit que les modalité25s de gestion et de concession du domaine public de l'Etat...).

En effet, une analyse minutieuse et combinée de ces deux alinéas révèle ici une inadéquation des termes, voire même une lacune causée par l'emploi des termes « modalités de gestion et de concession du domaine public...» à l'alinéa 2ème, précédé de l'expression « l'Etat exerce une souveraineté permanente... » à l'alinéa 1er. Il semble y avoir dans l'esprit du législateur, une confusion entre les termes souveraineté et propriété ; si bien que l'on ne sait plus déterminer exactement avec l'art.9 de cette nouvelle constitution, si le sol, le sous-sol et les mines demeurent une propriété inaliénable, exclusive et imprescriptible de l'Etat Congolais ou non. C'est là le noeud du problème.

24 Remy CABRILLAC, Dictionnaire du vocabulaire juridique, 2ème édition, Litec, Paris, 2004, p VII, (in avant propos).

25 Guy FEUER et Hervé CASSAN, op. cit. p22.

D'où, pour replacer les mots à leurs juste place, de manière à en avoir une idée précise, claire et nette, il nous paraît mieux indiqué de préciser en 1er lieu le sens et la portée du principe de la souveraineté permanente (section1ère), ensuite confronter cette notion face à la loi BAKAJIKA (section 2ème), à la loi du 20 juillet 1973(section3), mais également avec la notion de suzeraineté et celle de domanialité, (section 4 et 5). Enfin, nous distinguerons ce principe de ses notions voisines, avant de proposer une nouvelle formulation dudit article, dans une conclusion partielle de ce chapitre. Tout ceci dans le but de les clarifier et de savoir si ces notions s'équivalent ou peuvent être employées l'une à la place de l'autre.

Section 1ère : DE LA SOUVERAINETE PERMANENTE

Comme nous l'avons annoncé dès le début de ce travail, l'alinéa 1er de l'article sous examen consacre le principe de la souveraineté permanente des Etats sur leurs ressources naturelles. Ce principe a été proclamé deux fois par les résolutions1803 (V) et la résolution 3281 sur les droits et devoirs économiques des Etats. Il convient donc, dans la présente section, de pouvoir dégager le sens et analyser ce principe à travers son évolution, son contenu (§1), ses caractères (§2), son étendue (§3) ainsi que ses notions voisines. En procédant de la sorte, notre objectif n'est rien d'autre que de savoir le sens que le législateur congolais entend donner à l'article 9.

§ 1. Évolution et contenu du principe

I. Evolution d'ensemble

I.1. Origine

La théorie de la souveraineté permanente des Etats sur leurs richesses et ressources naturelles est d'origine latino-américaine.

C'est le Chili qui, en 1952, a amorcé le débat dans le cadre des Nations Unies. Par la suite, on a vu se développer toute une argumentation touchant aux problèmes politiques, économiques et juridiques relatifs à cette notion.

Dans un premier temps, ce principe a été façonné dans un cadre historique précis, notamment celui de la décolonisation et ayant une finalité bien précise. Les pays du tiers monde ont ensuite cherché à faire admettre la notion par les pays développés en acceptant divers compromis au sein de l'O.N.U. Une commission chargée de l'étude de ce principe fut institué par l'A.G. et abouti à la proclamation de la résolution 1803(XVII).

I.2. Étapes marquant l'évolution du principe.

Dans l'ensemble, cette évolution traduit le souci de « des internationaliser» les compétences économiques de l'État. Souci tactiquement compréhensible : les États en développement comme les Etats socialistes de l'époque cherchent à définir leur place dans les relations internationales, par opposition aux Etats qui dominent aujourd'hui les rapports économiques internationaux. Pour ce faire, il leur paraît opportun de supprimer les limitations, imposées par un Droit International Public d'origine européenne, à leur droit de réglementation interne et à une utilisation discrétionnaire de leurs richesses naturelles. Ils sont parfois rejoints dans cette entreprise par des Etats développés qui y voient le moyen soit de résister plus efficacement à la domination américaine, soit de dégager les règles d'une nouvelle discipline économique spécifique aux relations entre pays développés (exploitation de l'idée de dualité des normes).

Les principales étapes sont marquées par l'adoption des textes

suivants :

- Le 1er texte important est la résolution 626 (VI) de 1952 qui, bien que les Etats "occidentaux" se soient abstenus lors de son adaptation, paraît rétrospectivement bien anodine : elle insiste sur la "nécessité de maintenir le courant des capitaux dans des conditions de sécurité et dans une atmosphère de confiance mutuelle et de coopération entre les États". L'intérêt de cette résolution tient à l'habitude qui s'est prise depuis lors, de réaffirmer régulièrement le principe de la souveraineté sur les ressources nationales. Et donc, dans un 1er temps, les pays du Tiers-monde ont cherché à faire admettre la notion par les pays développés en acceptant divers

compromis, note HERVE Cassan26 dans son ouvrage très célèbre cité précédemment.

- La 2èmeétape, est marquée par l'adoption de la résolution 1803 (XVII) de1962. Elle correspond à une phase de compromis entre les synthèses défendues par les États occidentaux, ceux des pays socialistes et du Tiers Monde, en particulier. Le droit de nationaliser la propriété étrangère y est affirmé clairement, mais son exercice est entouré de certaines restrictions.

- La 3ème phase, quant à elle est ponctuée de durcissements successifs du Tiers Monde et trouve un point d'aboutissement dans la charte de droits et devoirs économiques des États de 1974. En son article 2, §II, il rappelle que "chaque État détient et exerce librement une souveraineté entière et permanente sur toutes ses richesses, ses ressources naturelles et activités économiques y compris la possession, le droit de les utiliser et d'en disposer". L'ONU a adopté en tout plus de 80 résolutions concernant ce principe et a créée une commission chargée de son étude qu'elle a chargée de procéder à une enquête approfondie concernant la situation du droit de souveraineté permanente sur les richesses et les ressources naturelles.

Depuis cette période, la situation est plus complexe. Les pays développés ont accepté l'insertion de ce principe dans le droit positif, mais ils contestent vigoureusement les conséquences externes que certains pays en développement veulent en tirer dans l'exercice de leur politique, notamment en matière de nationalisation.

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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille