L'institutionnalisation du pouvoir et l'émergence de l'état en République Démocratique du Congo : 1960-2006( Télécharger le fichier original )par Corneille YAMBU -A- NGOYI Université de Kinshasa - DES 2005 |
§3. Le pouvoir politiqueReprenant l'une de définitions du dictionnaire selon laquelle le pouvoir c'est la « puissance » ou « l'autorité », nous rappelons que comme tel,ce fait est considéré par tous comme l'un de trois éléments constitutifs ou l'une de trois conditions d'existence de l'Etat outre le territoire et la population. Mais plus que les deux autres, les publicistes y voient la genèse de la manifestation de tout Etat. A ce sujet, l'affirmation de Marcel Prélot est intéressante lorsqu'il dit que « la primauté du pouvoir, dans la formation de l'Etat, se retrouve dans tout le cours de son existence. Elément formateur, le pouvoir est aussi le facteur permanent de cohésion de la société politique, puisque celle-ci est une association obligatoire pour ses membres, qui lui appartiennent d'ordinaire, non par adhésion, mais par situation »54(*). Pour mieux comprendre le sens du pouvoir dont nous parlons , voyons ce qu'en dit Georges Burdeau : « la puissance, c'est le pouvoir de commander de telle sorte que l'on soit obéi » ce n'est pas dit-il, le droit ni la possibilité de commander, c'est simplement le phénomène qu'exprime l'exécution de l'ordre donné55(*). Il explicite : « quels que soient les motifs de l'obéissance, qu'elle soit provoquée par la crainte d'une sanction ou par l'adhésion à la substance du commandement, elle implique la puissance de celui qui l'obtient ». Dans ce même ordre d'idées, Alain56(*) constate avec regret bien sûr, que « si le pouvoir n'est pas résolu à forcer l'obéissance, il n'y a plus de pouvoir. Si le citoyen ne comprend pas et n'approuve pas ce puissant mécanisme bien avant de le craindre, il n'y a plus d'ordre ». L'avantage d'une telle assertion dans la poursuite de notre pensée, c'est de fournir un élément d'appréciation et de vérification théorique et plus tard empirique tout simple. Supposons que de l'entendement de tous, il y ait d'Etat sans puissance ou pouvoir, entendu comme « capacité » de commander et de se faire « obéir » sur tout son territoire et par tous, il devra s'en suivre que la collectivité sociale où ce phénomène se morcelle et s'effrite au point que se forment les îlots de « sujétion - obéissance » perde sans polémique son essence étatique. Il importe de s'en souvenir tout le long de notre étude. C'est à juste titre alors que Treitschke57(*) a dit : « l'Etat est la puissance suprême ». cette formule demeure vraie dans la mesure où même si l'Etat n'est pas que force et même qu'il doit se passer d'elle, il faut qu'au cas où une épreuve de force surviendrait, il puisse avoir le dernier mot. En ce sens, il faut reconnaître avec Ihering que « le caractère de l'Etat est d'être une puissance supérieure à toute autre volonté se trouvant sur un territoire déterminé. Cette puissance est, et doit être, pour qu'il y ait un Etat, une puissance existant sur le territoire considéré... Avant que cette condition soit remplie, toutes les autres sont anticipées ; car pour les remplir, l'Etat doit exister et il n'existe que lorsque la question de puissance est résolue »58(*). Etant susceptible de degrés, la puissance peut être partagée, de même étant un état de fait et non une qualité de droit dans la société, elle est l'objet des fluctuations relatives aux circonstances. Fondée sur la force, elle peut se trouver en présence d'une force égale ou supérieure avec laquelle, elle doit composer ou devant laquelle elle doit s'incliner, fondée sur l'astuce ou la ruse, elle peut s'effriter devant la manoeuvre clairvoyante d'un sage, fondée sur la richesse, elle peut disparaître avec celle-ci. L'oscillation perpétuelle entre les pouvoirs distincts selon que leur puissance s'accroît ou diminue créée par leur rivalités dans un milieu social, est un obstacle majeur à l'éclosion d'un Etat stable. Il convient de reconnaître que les sociétés occidentales ont résolu la question du pouvoir tandis que tel que nous allons le voir la plupart des société africaine subsahariennes, se recherchent encore dans cette voie. * 54 Prelot, (M.), op.cit, p. 12. * 55 Burdeau, (G.), op.cit, p. 99. * 56 cité par Burdeau, G. idem * 57 Cité par Burdeau, G., ibidem. * 58 Ihering, Der Zwech im Recht, T. 1, 1880, p. 311, cité par Burdeau, G., op.cit, p. 100. |
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