L'institutionnalisation du pouvoir et l'émergence de l'état en République Démocratique du Congo : 1960-2006( Télécharger le fichier original )par Corneille YAMBU -A- NGOYI Université de Kinshasa - DES 2005 |
II. Le rôle de l'institutionnalisation dans la pérennité du pouvoir et de l'Etat.L'institutionnalisation assure la permanence et la continuité du pouvoir de l'Etat. la durée et la permanence du pouvoir et de l'Etat ne sont pas garanties sans l'institutionnalisation. Pour que le pouvoir subsiste et se transmette, il faut qu'il dépasse le stade individuel pour atteindre celui d'impersonnalisation. Reprenant Bossuet, il écrit : « O princes, vous mourrez, mais votre Etat doit être immortel »81(*). Sans l'institutionnalisation, les gouvernements ainsi que les sociétés qui se veulent Etats ne sont que les phénomènes éphémères dans l'histoire. Dans une société étatique, le pouvoir institutionnalisé, existe en lui-même, indépendamment de ses supports. La personne, le collège, l'Assemblée, le peuple en corps assurent l'autorité, mais ne se confondent pas avec elle. Tel individu, telle collectivité peuvent perdre le pouvoir. Il ne cessera pas d'exister en lui-même82(*). C'est aux cimes de cette noble pensée que les acteurs politiques africains et congolais doivent se hisser. C'est pourquoi nous écrivons. III. Processus d'institutionnalisation et rôle du pouvoir institutionnalisé dans la formation de l'Etat.Au début du siècle Max Weber, cité par D. Chagnollaud, a donné une définition célèbre de l'Etat entendu comme « une entreprise politique de caractère institutionnel dont la direction administrative revendique avec succès, dans l'application de règlements, le monopole de la violence physique, légitime »83(*). L'Etat est ainsi une forme de pouvoir particulière, mais qui n'a pas existé de tout temps en occident84(*) mais qui a connu un processus lent de formation. A. Processus d'institutionnalisation.Comme l'observe Marcel Prélot, l'institutionnalisation est le fruit d'un long processus historique85(*). De même G. Burdeau rappelle que l'institution étatique ne s'est pas affirmée tout d'un coup sur le plan des réalités juridiques ; elle ne s'est pas apparue à un moment précis, ayant réalisé d'emblée la plénitude et ses attributions et la perfection de sa technique. Avec D. Chagnollaud, il y a lieu de rappeler le processus d'institutionnalisation constatée dans les transformations sociales (la décomposition de la féodalité), économique (le développement de rapports marchands), politiques (la volonté de pouvoir des princes), religieuses (la séparation progressive du pouvoir temporel, accordé par l'Etat, du pouvoir spirituel de l'Eglise)86(*). L'aboutissement du processus d'institutionnalisation s'est traduite par l'émergence de notamment quatre principes qui ont profondément transformé les rapports du pouvoir et des gouvernés : 1°. - La dissociation progressive de l'Etat de la personne de ses dirigeants (princes, monarques).Désormais, les gouvernants exercent une fonction au nom de l'Etat dont ils sont les organes. Sous la monarchie, la personne du roi se confond avec l'Etat (d'où la formule prêtée à Louis XIV, « l'Etat c'est moi »). Nous pensons que cette situation comme nous le verrons dans la seconde partie est similaire, celle des sociétés traditionnelles africaines et des certains pays africains contemporains, la République Démocratique du Congo inclus. Mais, en occident, il s'est opéré avec le temps la distinction même relative entre le roi et la couronne, entre le patrimoine du premier et celui de la seconde, entre la fonction et son titulaire (ainsi des règles organisant la succession monarchique qui assurent la continuité de la fonction royale au delà de la disparition physique du monarque)87(*). * 81 Prélot, (M.), op.cit, p. 16. * 82 Prélot, (M.), op.cit, p. 16. * 83 Chagnollaud, (D.), op.cit, p. 7. * 84 idem * 85 Prélot, (M.), op.cit, p. 16. * 86 Chagnollaud, D., op.cit, p. 6. * 87 Idem. |
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