La procréation médicalement assistée( Télécharger le fichier original )par Pierre Léon André DIENG Université Cheikh Anta DIOP de Dakar - DEA en Droit de la Santé 2005 |
Paragraphe 2 - Les grands chantiers juridiques à entreprendreLa procréation médicalement assistée mériterait fort bien la promotion d'un traité afin de mettre un terme aux disparités entre États (A). Au Sénégal, l'adoption d'un code de la recherche et des pratiques médicales nouvelles est vivement souhaitée non seulement pour la PMA mais pour toutes autres activités, notamment médicales (B). A / - La promotion d'un traité C'est en pensant aux conséquences inévitables de la pratique que la réclamation d'un traité au niveau mondial trouve toute son actualité et tout son intérêt. On peut même l'envisager, d'abord, aux niveaux continental, régional et sous régional afin de mieux réduire à la base les problèmes relatifs à l'exception culturelle que l'on retrouve sur l'international. Ainsi, la promotion d'un traité est vivement recommandée pour la zone ouest-africaine, voire pour tout le continent africain, à l'image de la convention-cadre de bioéthique du Conseil de l'Europe8(*)9. Mais la promotion d'un tel traité doit être un tremplin pour une convention stricto sensu marquée par le juridique. Il doit s'agir d'un document ambitieux qui s'attacherait aux grands principes comme l'accès équitable aux applications de la biologie et de la recherche, l'importance du consentement des personnes, l'interdiction de faire du corps humain et de ses parties des sources de profit, la limitation des possibilités d'intervention sur le génome humain aux seules fins de prévention et de thérapeutique. Le respect de la vie privée doit s'accommoder des valeurs culturelles sociétales du modèle de parentalité unanimement reconnu dans toutes les civilisations. C'est avoir la suite de ses ambitions à l'instar du parlement européen qui a adopté le 16 mars 1989 la « Résolution sur la fécondation in vitro et in vivo » relative aux procréations hétérologues9(*)0, d'où la pertinence pour le Sénégal (et toute l'Afrique à travers leurs institutions) de s'activer pour l'adoption d'un code de la recherche et des pratiques médicales nouvelles. B / - La pertinence de l'adoption d'un code de la recherche et des pratiques médicales nouvelles L'absence d'un cadre juridique uniforme pour la médecine est la source possible de toutes les dérives et des abus incommensurables préjudiciables à la santé des sénégalais souvent mal informés et victimes d'un paternalisme médical et paramédical dégradant de leur dignité. Ainsi, les termes de référence en vue de la pré-élaboration doivent impliquer la participation de tous les acteurs sociaux : le citoyen doit être vu comme un partenaire-patient participant librement et non plus comme une personne assujettie à des manipulations pour réaliser, tout simplement, un code sur lequel il ne va avoir aucune emprise. Il doit être pris comme un individu coopérant de façon efficace à l'amélioration des thérapeutiques médicales. Ce code doit favoriser l'introduction du droit humanitaire et du droit effectif à la santé ( le respect des droits des patients) avec toute sa gamme de régime de responsabilité et de sanctions, du rôle plus significatif et prépondérant d'un comité d'éthique doté d'une capacité de censure, de saisine juridictionnelle (à l'instar du Procureur de la République, le garant de l'ordre public et des bonnes moeurs) et d'une exigence qui impose des consultations préalables et obligatoires dudit comité et qu'on ne le limite plus à des considérations purement consultatives. Cette obligation de sécurité doit être renforcée par l'application du principe de précaution pour prévenir les risques en matière de santé et, plus est, en matière de PMA. L'objectif est la maîtrise ou le contrôle de la part d'incertitude, c'est-à-dire que, en cas de risque potentiel pour la santé issu d'une incertitude scientifique, la précaution postule d'agir sans attendre que l'existence de ce risque soit confirmée par la preuve scientifique. Ce risque est donc celui que l'on qualifie de « potentiel », c'est-à-dire un risque virtuel qui n'est pas concrètement un risque, qui n'est pas certain mais qui peut généralement se produire9(*)1. Pour ce faire, les acteurs (les chercheurs, les laboratoires, les banques de gamètes, les sujets à des expérimentations etc.) devront souscrire à une police d'assurance obligatoire à la PMA9(*)2. Le Sénégal pourrait, sur cette même lancée, s'appuyer d'une part sur le rapport adressé au Président de la République français et d'autre part sur le code de la recherche de ce même pays9(*)3 dont le livre II, notamment le titre II et particulièrement le chapitre III, porte sur les activités et la recherche biomédicales. Le code doit, enfin, être un moyen de prévention à l'encontre de certains comportements. Nous pensons que l'avènement de la PMA suscite des interrogations légitimes mais un judicieux encadrement juridique permet d'en faire un cadre d'épanouissement pour les véritables couples infertiles ou stériles entrant toujours dans le modèle parental des valeurs culturelles que le Sénégal se refusera, en tous temps, d'aliéner pour ne pas perdre son âme laquelle constitue, en définitive, son originalité et sa grande force au sein de la communauté internationale. * 89 id., précité, p.54 * 90 Roberto Andorno, id., précité, p.257 in fine, p.258 in limine litis * 91 Ousseynou Sy, mémoire maîtrise « La protection de la santé face au droit de l'OMC », année 2000/2001, Faculté de droit UCAD, p.18 * 92 Revue française d'études américaines « Le système de santé en question », n°77, juin 1998 * 93 Code de la recherche et rapport, in Internet : http://www.recherche.gouv.fr/discours/2004/legisrecherche.htm |
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