La procréation médicalement assistée( Télécharger le fichier original )par Pierre Léon André DIENG Université Cheikh Anta DIOP de Dakar - DEA en Droit de la Santé 2005 |
B / Les limites apportées à la nullitéC'est le cas notamment lorsque la personne qui avait droit d'invoquer la nullité renonce à le faire. Par exemple, le mari stérile qui n'avait pas consenti à l'acte de PMA fait par sa femme. Par là, il procède ou peut procéder à une renonciation tacite ou expresse. C'est un acte abdicatif. Par suite, la PMA est expurgée de son irrégularité de façon rétroactive comme s'il n'avait jamais été nul, comme s'il avait toujours été valable. Cette confirmation demeure possible que si l'acte (consentement vicié) relève de la nullité relative parce qu'on ne peut déroger par des conventions aux règles de l'intérêt général, comme la rémunération du praticien ou du tiers donneur. On peut également invoquer comme limite la prescription extinctive pour le non exercice de l'action en nullité dans le délai imparti ou l'immixtion d'un tiers non intéressé à l'acte (mouvements opposés aux PMA, groupes religieux). C'est autour de l'analyse du contenu du projet de parentalité artificielle que se dessinent les véritables objectifs qui ont amené le législateur à définir une réglementation. SECTION II - LES OBJECTIFS DE LA REGLEMENTATIONDE PARENTALITE ARTIFICIELLEIls visent cumulativement à assurer la sécurisation du statut de l'enfant né artificiellement (paragraphe 1) et à garantir le contrôle juridique de l'exercice de la PMA (paragraphe 2). Paragraphe 1 - La sécurisation du statut de l'enfant artificielLe législateur vise à promouvoir une réelle insertion sociale à l'enfant ainsi procréé (A) et à consolider sa protection légale (B). A / - L'insertion sociale de l'enfant procrééElle se fait par l'établissement d'une filiation nouvelle (1) et par une vocation à être successible (2). 1°/ L'établissement d'une filiation nouvelle En fait de filiation nouvelle, les législateurs occidentaux visent à assimiler l'enfant procréé à un enfant légitime issu d'une procréation naturelle. C'est dire que l'enfant est assimilé à un enfant issu directement du couple qui lui a, ainsi, donné vie au sens complet du terme. L'établissement de la filiation intervient de plein droit, par mention du nom du mari de la femme dans l'acte de naissance, de sa nationalité et de son insertion dans sa nouvelle famille. De la même manière, la preuve de l'éloignement ou de l'impuissance ne saurait prospérer (art. 191 à 194 CF). « Ainsi la filiation légitime rattache juridiquement l'enfant à ses père et mère qui sont dans les liens du mariage » 4(*)3. Tel semble être l'attitude du Sénégal qui devrait chercher à faire coïncider la filiation juridique à la filiation artificielle, même si aucun texte n'est encore pris en l'espèce. La filiation artificielle est ainsi assimilée à la filiation biologique, voire naturelle. Si le Sénégal n'accepte que les PMA homologues au sein du couple hétérosexuel marié, l'Occident privilégie en plus la PMA hétérologue et celle reposant sur le concubinage. Si la première situation peut se voir appliquer la « position sénégalaise » pour un couple marié, la seconde n'est pas assujettie à une présomption de paternité. Il faut, par suite, une déclaration écrite avant le recours à la PMA. Cette même déclaration ou consentement est requis du couple hétérologue qui a recours aux services d'un tiers participant. La loi, d'un autre côté, assure la vocation de successible à l'enfant. 2°/ La vocation à être successible
Avec la PMA, l'enfant légitimé par un nom et une nationalité détient une vocation héréditaire, c'est-à-dire il est appelé par la loi à avoir une existence de successible au moment de sa conception (s'il naît vivant et viable par la suite) [art. 399 alinéa 1er CF]. Et le principe dans les successions de droit commun, c'est que tous les enfants légitimes du couple succèdent à leurs parents de façon égalitaire (art. 520 à 522 CF). C'est dire que l'enfant artificiel n'est ni un enfant naturel, ni un enfant adopté. Mais le débat persiste dans la doctrine surtout avec le recours du tiers participant. Toutefois, le législateur français semble avoir déjà «prédit» le cas de l'enfant artificiel et tranche le débat en assimilant l'enfant naturel ou adopté à l'enfant légitime en matière successorale (art. 757 c.civ.fr). Au Sénégal, le débat successoral entre enfant naturel, enfant adopté et enfant légitime n'a jamais été tranché de façon nette par le législateur complaisant avec le droit musulman, on peut craindre que l'avènement de ce troisième « casuistique » que constitue l'enfant artificiel ne ravive les passions 4(*)4. En outre, il existe un privilège moyenâgeux de masculinité qui n'a pas son pendant dans le monde actuel fait d'égalité démocratique et surtout juridique. Quand bien même, l'enfant bénéficie d'autres formes de protection légale. B / - Le bénéfice d'une protection légale 1° Les législateurs occidentaux ont prévenu sur les cas de désistement post-PMA en déclarant irrecevables toutes les contestations ultérieures de filiation artificielle projetée. C'est dire que le désaveu de paternité ou de maternité (dans le cas hétérologue) ne peut plus prospérer en la matière lorsque la PMA est déjà réalisée et a permis la venue au monde d'un enfant. La demande en désaveu n'est pas recevable si le conjoint a consenti à l'acte de PMA, sauf réserve de l'hypothèse où l'enfant n'est pas issu de la pratique artificielle (le cas d'une tromperie sur un enfant issu des oeuvres de l'épouse et d'un amant), à condition de rapporter la preuve qu'il n'est pas le père. En l'espèce, ce sont les modes ordinaires de la preuve qui opèrent (art. 197 et s. CF). 2° Par suite, le ou les conjoint(s) récalcitrant(s) pour honorer leurs engagements s'exposent à voir leur responsabilité retenue pour inexécution de « l'accord » de PMA sollicité. Nous étudions plus loin le régime de la responsabilité. Retenons, sur cette même lancée, que la PMA vise aussi un objectif de contrôle juridique de l'exercice de la PMA. * 43 Pierre L. A. Dieng « La dignité de l'enfant », mémoire maîtrise, 2003, p.19 * 44 Pierre L. A. Dieng, id., pp. 62-64 |
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