A / - La circulation des produits du corps humain
La circulation des enfants est remplacée par la
circulation des substances.
A l'heure actuelle, la circulation des substances est rendue
possible par l'extériorisation partielle de la capacité
reproductrice des corps. La fusion des gamètes, pouvant avoir lieu en
éprouvette, avait remplacé la circulation des enfants
(c'est-à-dire les transports d'un enfant d'un foyer à un autre).
Ce ne sont plus désormais que les substances procréatives qui
circulent par le canal de la logique biomédicale. La perspective du
développement de la procréation médicalement
assistée défie les lois de la biologie et met en cause les
principes de l'indisponibilité du corps humain, ceux de l'état
des personnes et les principes de la déontologie médicale et de
la recherche expérimentale.
Par une alchimie juridique les textes de loi, qui ont toujours
réaffirmé que le corps humain ne saurait en aucune façon
faire l'objet d'une quelconque disposition, sont soudainement frappés
d'impuissance face aux fréquentes atteintes résultant des
concessions onéreuses et dons effectués sur des parties ou des
produits du corps humain. Or, il a toujours été avancé que
les produits d'origine humaine n'ont pas de prix et ne peuvent donc être
ni achetés ni vendus. Autrement la démarche juridique aurait
dû décider, face à de telles
« agressions », que les gamètes qui sont des
produits du corps humain, ne peuvent en cela faire l'objet d'une disposition de
la part de la personne même dont ils sont issus. Mais récemment la
France a pris 26 décrets d'application le 06 août 2004, relatifs
à la bioéthique dont le premier d'entre eux a mis en place un
dispositif transitoire autorisant l'importation de cellules souches
embryonnaires humaines, en attendant la création en 2005 d'une Agence de
biomédecine. On le voit bien que la circulation des produits du corps
humain qui, en principe, est interdite semble devenir une norme juridique qui
entre en contrariété avec les règles existantes. Ce
même esprit semble guider la licéité des conventions sur le
corps humain.
B / - La licéité des conventions sur le
corps humain
La diversité des conventions possibles en
matière de PMA n'a pas dérogé à la règle du
caractère licite de leur établissement. Que ce soit le
consentement, l'objet et la cause qui constituent des conditions de fond de
validité de tout accord, on a eu du mal à comprendre les
justifications juridiques qui les ont insérés dans un dispositif
légal, fut-il un dispositif spécial et isolé par rapport
à l'ensemble des normes en vigueur dans un pays. Tout au plus, la loi a
atténué le domaine contractuel en excluant la pratique de la
gestation pour autrui, la rémunération du donneur de
gamètes et toutes clauses de donneurs
quant à l'utilisation finale des dons. Tout au plus, le
donneur peut simplement solliciter que son don soit au bénéfice
d'un couple stérile. De même, les cellules cédées
ainsi que leurs dérivés ne sauraient davantage, servir de
prétexte aux héritiers du donneur pour exiger des droits.
Malheureusement, la loi n'a considéré que partiellement l'aspect
contractuel par rapport à toutes les autres variantes contractuelles,
notamment, la convention de cryoconservation des gamètes qui a
donné l'existence aux banques de cellules reproductives, ou la
convention d'établissement de recherche biomédicale sur les
embryons surnuméraires. Ce paradoxe a été même au
centre du débat de la campagne électorale des
présidentielles fédérales américaines du 2 novembre
2004. En effet lors d'une déclaration tenue à Hampton (Etat de
New Hampshire) à la mi-octobre 2004, le candidat démocrate,
John Kerry, a plaidé pour la relance de la recherche
publique sur les cellules souches embryonnaires, jugée prometteuse pour
lutter contre certaines maladies (Alzheimer, Parkinson ou diabète).
Alors que le candidat président républicain sortant,
George Bush, avait interdit, en août 2001, le financement public
au nom de la vie et de l'humanité de l'embryon. Il est évident
que si le challenger John Kerry entend financer la recherche embryonnaire, non
seulement il reconnaît le caractère déshumanisant de la
cellule souche embryonnaire humaine, mais en plus les subventions publiques ne
seront pas désintéressées, c'est-à-dire que par des
conventions conclues avec les laboratoires et instituts de recherche, l'Etat
fédéral sera le premier bénéficiaire de son
« investissement ». Dès lors, on ne saurait comment
les Etats peuvent très sérieusement interdire ou contrecarrer
d'autres conventions très voisines de la PMA qui heurteraient les
consciences.
Au sortir de l'analyse de la résurgence des enjeux de
la PMA, le contrepoint de la volonté de procréer artificiellement
va consister pour le législateur à mettre en oeuvre un cadre
approprié, à imposer son rôle qui est de pallier aux
conséquences et constats qu'occasionne la PMA en l'organisant et non de
permettre qu'elle se réalise dans le silence et la pénombre.
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