4.1.2.2 La réticence des PTF à procéder
à une responsabilisation intégrale des acteurs locaux
Les collectivités locales sont appelées, dans le
nouveau contexte de décentralisation au Bénin et en tant que
maîtres d'ouvrage, à devenir les principaux acteurs et pilotes des
projets de développement menés sur leur territoire. Elles ne
peuvent y parvenir qu'en s'appuyant sur les organisations de la
société civile et en mettant en place un système de bonne
gouvernance qui met en confiance les intervenants externes. A contrario,
ceux-ci devront, dans leur démarche d'intervention, intégrer le
changement de contexte et accepter de libérer l'espace au profit du
conseil communal et des organisations locales. Les intervenants externes
gagneraient, à moyen et à long terme, à responsabiliser
dès à présent les instances élues et les acteurs
locaux sur la mise en oeuvre des projets de développement et à se
concentrer plutôt sur le renforcement des capacités de ces
derniers.
Or, nous avons constaté, au cours de notre
enquête, que des réticences subsistent encore sur le terrain dans
le sens de l'entière responsabilisation des acteurs locaux. Certains
PTF/ONG internationaux continuent d'avoir leurs animateurs propres ou leurs
équipes de gestion des projets impliqués directement dans la mise
en oeuvre des projets sur le terrain, limitant ainsi l'apport des acteurs
locaux à la mobilisation sociale et à la libération des
contreparties financières. D'autres PTF/ONG, tout en posant des pas
décisifs en matière de responsabilisation des acteurs locaux,
n'investissent pas suffisamment de moyens dans le renforcement leurs
capacités et n'intègrent pas assez le paramètre
«temps », comme un élément crucial à ce
processus d'apprentissage sur le tas (l'impact en matière de
renforcement des capacités des acteurs s'observe sur une durée
moyenne de 5 ans).
Partant de ces réalités, il est recommandable
que les intervenants externes dans les 3 communes touchées par notre
étude, et ceux des autres communes en général, appuient
les conseils communaux à assumer leurs compétences afin de
créer un environnement favorable au développement. Ce choix
permettra de donner aux conseils communaux toute leur légitimité
à travers leurs pleines compétences à prendre en charge
les questions de développement de leurs communautés. Nous
reconnaissons toutefois que ce choix qui consiste à privilégier
les conseils communaux comme la porte d'entrée dans le
développement local doit se faire en toute synergie avec les autres
acteurs locaux (organisations et associations locales, populations et autres
leaders).
Eu égard à ce qui précède,
nous proposons que soit adoptée une démarche progressive de
responsabilisation des acteurs locaux soutenue par une gestion
concertée. Prenons l'exemple d'un forage identifié par une
communauté comme prioritaire et pour lequel le conseil communal a
recherché le financement d'un partenaire.
1. Un premier temps de responsabilisation peut consister
à conduire l'ensemble du processus avec le conseil communal et les
organisations locales, depuis l'appel d'offre jusqu'à la
réception de l'ouvrage en identifiant dans une démarche
participative et concertée de gestion du projet (partage de rôle).
Par exemple, le conseil communal et les représentants des organisations
de base peuvent procéder au choix de l'entrepreneur. Les PTF et le
conseil communal peuvent cosigner le contrat avec l'entrepreneur et
régler les modalités de virement en fonction des circonstances.
Le suivi des travaux et l'apport de certains agrégats peuvent être
de la responsabilité du conseil communal. La mobilisation de la main
d'oeuvre peut être de la responsabilité des organisations locales
sous l'égide du conseil communal, etc. Le renforcement des
capacités peut précéder chaque étape ou se
dérouler concomitamment dans l'action sous la responsabilité des
PTF/ONG.
2. Si tout se déroule normalement, les PTF peuvent
passer à une seconde phase de responsabilisation. Celle-ci peut
consister à donner l'entière responsabilité au conseil
communal sur un autre petit projet en transférant les fonds
nécessaires à sa conduite dans son compte. Le conseil communal
conduit l'ensemble du processus en identifiant, par lui-même, les
principaux acteurs à responsabiliser au niveau local et en identifiant
également ses propres faiblesses en matière technique. Cet auto
diagnostic des capacités lui permettra de solliciter auprès des
PTF concernés, des appuis en renforcement des capacités
appropriés à ses besoins. Les PTF joueront ici un rôle de
suivi et/ou de contrôle a posteriori puis d'accompagnement
technique.
3. Une phase supérieure peut consister à
responsabiliser le conseil communal sur plusieurs projets et/ou programmes
intersectoriels de façon à lui permettre d'avoir une vue
synoptique de l'ensemble des actions de développement menées sur
son territoire et à en proposer une mise en synergie cohérente.
Ceci suppose : (i) que le conseil communal connaisse, par un diagnostic
approfondi, les compétences existantes par secteur sur son
territoire ; (ii) qu'il existe une parfaite collaboration entre les
organisations locales et le conseil communal et que chacun s'engage
à jouer franc jeu ; (iii) qu'il existe un mécanisme fiable de
contrôle au niveau du conseil communal ; (iv) qu'il existe un cadre
de coordination et de concertation fonctionnel. Nous estimons que les PTF/ONG
et les conseils communaux, s'ils se décident, peuvent ensemble mettre en
place cet environnement favorable à une mise en oeuvre coordonnée
des projets de développement et impulser une dynamique aux PDC au niveau
de notre zone d'étude.
|