La protection du tiers contractant en cas de prête-nom en droit rwandais( Télécharger le fichier original )par François Xavier HABAKURAMA Université Nationale du Rwanda - Licence en droit 2008 |
SECTION I. DETERMINATION DES TIERSSous cette section, nous allons voir les tiers éventuels dans la convention de prête-nom, puis les conflits susceptibles de surgir entre tiers qui peuvent impliquer l'intérêt d'un tiers. §1. Tiers éventuels dans la convention de prête-nomAu sens précis de l'art. 80 de la loi portant modes et administration de la preuve, les tiers sont des personnes qui n'ont pas figuré au contrat ni par elles-mêmes ni par représentants, et qui ne tiennent des parties aucun droit les faisant les ayants cause. Bien que le code civil rwandais n'énumère pas les tiers qui font l'objet dans l'art. 203 CCLIII, pour les connaître, nous avons consulté la doctrine étrangère. Selon F. CHABAS, il existe trois catégories des personnes susceptibles d'être tiers : les ayants cause à titre particulier, les créanciers chirographaires ainsi que les penitus extranei57(*). Donc, de notre conviction, le législateur rwandais dans un article 80 de la loi portant mode et administration de la preuve devrait mentionner les ayants causes à titre particuliers puisque ils doivent être au courant des actes juridiques posés par leur auteur. A. Ayants cause à titre particulier On désigne d'ayant cause à titre particulier, toute personne qui acquiert un droit considéré individuellement, non pas comme fraction d'une masse patrimoniale58(*). L'acheteur qui achète un seul objet, un ayant cause à titre particulier du vendeur ; les créanciers hypothécaires d'une des parties sont des ayants cause à titre particulier. Toute personne en concluant un contrat, qui a fait confiance à l'acte apparent et compté sur la situation qu'il créait, est un ayant cause à titre particulier également. Tel est le cas de ceux qui ont acquis des droits réels du propriétaire apparent59(*). Il est d'autant remarquable que les ayants cause particuliers sont des tiers au sens de l'article 203 CCLIII. Donc à mon avis, il est évident pour reconnaître que les tiers concernés dans l'article précité, les ayants cause à titre particulier y font parties. H. MAZEUD, J. MAZEUD et F. CHABAS montrent que les ayants cause particuliers doivent être protégés à un double titre. D'une part, dans des cas exceptionnels, ils sont tenus par l'acte qu'a conclu leur auteur. A titre d'exemple, l'acquéreur d'un immeuble est tenu d'exécuter les obligations résultant des baux passés par son vendeur. Il doit donc être prémuni contre la fraude dans un acte apparent60(*). D'autre part, les contrats passés par leur auteur, lorsqu'ils ne lient pas les ayants cause particuliers, leur sont opposables. Il ne faut donc pas qu'un ayant cause particulier, par exemple un acquéreur, puisse être trompé sur l'existence de tels contrats. En tout cas, la protection accordée par l'article 203 CCLIII aux ayants cause particuliers est parfaitement justifiée. Ils ont traité et fixé les conditions de leur accord, en tenant compte de la situation apparente. Ils ne doivent pas avoir à souffrir des conséquences d'un acte qui leur a été dissimulé, même si le but de la convention de prête-nom n'est pas frauduleux à leur égard. Les parties, qui ont créé l'apparence, doivent seules pâtir d'une situation dont elles sont responsables. Les créanciers chirographaires, ainsi nommés par opposition aux créanciers privilégiés ou hypothécaires, sont ceux qui n'ont pas de sûreté réelle en garanti de leur créance61(*). Ils jouissent d'un simple droit personnel et se contentent de leur titre de créance. Bien que l'objet de leur créance soit dans la plupart du temps particulier, ils sont des ayants cause universels des débiteurs, puisque l'art.1 sur le régime hypothécaire dispose que le droit personnel est garanti par un droit de gage général, sur tout le patrimoine du débiteur62(*). C'est ce gage qui fait que le créancier chirographaire soit un ayant cause universel. Les créanciers chirographaires des parties, contre lesquelles la convention de prête-nom est souvent dirigée, sont des tiers au sens de l'art. 30 de la loi portant mode et administration de la preuve. Les contrats conclus par leur débiteur, leur sont opposables. Ils peuvent bénéficier ou souffrir indirectement des conséquences de ces contrats passés par leur débiteur selon qu'ils augmentent l'actif ou le passif de leur patrimoine63(*). De notre conviction, la raison de la protection des créanciers chirographaires découle du fait que le patrimoine du débiteur fait le gage général de ses créanciers. Alors tout fait tendant à diminuer le patrimoine du débiteur affecte la chance d'être payé pour ses créanciers chirographaires. En notre cas de prête-nom, les parties peuvent être animé par l'intention de frauder les droits des tiers en simulant par interposition des personnes. Les penitus extranei sont des tiers qui n'ont de rapport juridique actuel avec aucun des contractants. Ces personnes ne présentent pas un grand intérêt pratique pour les tiers véritables, car ils sont étrangers aux contrats comme aux contractants. Cependant, ils doivent être protégés dans les rares espèces où le contrat leur est opposable. Ils figurent alors au rang des tiers de l'article 30, loi sur la preuve précitée64(*). En notre sens les penitus extranei sont protégés comme tout autre tiers visé par l'article 203 CCLIII. Après avoir explicité brièvement les tiers visés par l'art.203 CCLIII, il est temps alors de voir les conflits qui peuvent surgir entre les tiers. * 57 F. CHABAS, op.cit., p. 924. * 58 Encyclopédie juridique, Dalloz, op.cit., p. 6, no53 * 59ibidem * 60 H. MAZEAUD, J. MAZEAUD et F. CHABAS, op.cit., p. 929. * 61 Encyclopédie juridique, Dalloz, op. cit.,p.7 no54 * 62 Art. 1, Le décret portant régime hypothécaire du 15 mai 1922 modifié par le décret du 28 mars 1949 B.O., 1949, p. 831, rendu exécutoire par O.R.U., no42/128 du 27 août 1948 B.O.R.U., 1949, p. 468. * 63 F. CHABAS, op.cit., p. 930. * 64 A. M. NGAGI, op. cit., p. 104 (inédit). |
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