C- La nature des produits agricoles
1- Des produits nouveaux à la
consommation
Dans les Etats membres de la CEDEAO, il n'existe pratiquement
que des industries légères, de transformation, produisant des
biens de consommation courante. Dès lors, on court le risque d'une
stagnation des échanges, une politique communautaire de production dans
l'optique de l'industrialisation faisant défaut.
Au delà de cet aspect, il y a un autre problème
ayant trait à la nature même des produits. Nous prenons deux
exemples : le poisson et le vinaigre. Pour les populations non
côtières, l'introduction du poisson dans leur cuisine bouleverse
leurs habitudes alimentaires. De plus, un investissement important est
nécessaire pour créer une chaîne de froid en vue de
conserver ce produit, cela alourdit le prix de revient de la marchandise sur le
marché des pays sans littoral. Dès lors, le poisson est
réservé aux couches sociales plus ou moins élevées.
Ces dernières représentent une infime partie de la population, le
marché est donc réduit. A la longue, le prix de revient baissera
lorsque les investissements auront été amortis et le
marché pourra s'agrandir.
Le vinaigre entre uniquement dans les préparations
culinaires de type occidental. La cuisine traditionnelle africaine ignore ce
produit. Ici de même, il sera réservé aux citadins, encore
faudra-t-il préciser que seuls consommeront, les individus ayant des
habitudes culinaires occidentales et dont le revenu est au moins moyen. La
même conclusion que dans le premier cas s'impose. Pour accroître
les échanges de ces produits, il faudra prendre en considération
le problème publicitaire. La publicité a pour effet de
créer des besoins, d'inciter les populations à consommer les
produits.
2- Les caractéristiques de l'offre
La saisonnalité détermine l'intensité des
flux.
En effet, d'une part, les flux de produit ne peuvent pas se
raisonner uniquement en fonction des caractéristiques de prix. La
disponibilité saisonnière des produits justifie un tarissement ou
au contraire une offre excédante. Ainsi, les produits agricoles ne se
trouvent en compétition d'un pays à l'autre que pendant une
période réduite alors que pendant d'autres, seul un pays peut
approvisionner le marché. Cela se traduit immédiatement dans une
forte rigidité des flux d'importations par rapport au prix.
D'autre part, les commerçants ne raisonnent pas
toujours leurs transactions une par une, mais tendent à globaliser leur
stratégie. Ils peuvent ainsi être amenés à
réaliser une vente à perte dans la mesure où elle permet
d'assurer un bénéfice important sur une autre. Ce cas de
compensation est très fréquent en Afrique de l'Ouest en raison de
l'absence de crédit ou de marché de fret. Il est connu par
exemple que les exportateurs Nigériens de riz ou d'oignons, produits sur
lesquels ils réalisent des compensations avec les produits dont ils ne
choisissent toujours pas ni la nature, ni la qualité comme les engrais
de manière à couvrir les frais de transport pour leurs camions
lors du trajet retour. Ces stratégies de compensation ou de troc
permettent aussi de pallier l'absence de crédit, de
convertibilité de monnaie de façon formelle ou le risque de
change.
3- Les caractéristiques de la demande
La demande pour certains produits alimentaires est rigide. En
période de pénurie, on peut donc avoir des augmentations
d'importations sans que cela soit justifié par le prix ou toute
modification des coûts de transaction. Ainsi, souvent la
mesure des flux ne peut être mise en relation avec l'évolution des
conditions d'accès (prix et taxe) des produits.
La différence de qualité détermine des
comportements d'achat dont les prix rendent difficilement compte. On pourra
ainsi avoir des productions dont la minoration de prix pour une qualité
jugée inférieure ne suffit pas à doper la demande. Ce qui
complique l'analyse et la différenciation sociale et géographique
de la demande : au Niger par exemple, le riz importé est plus
apprécié des couches urbaines. La brisure pourtant plus
chère, n'est guerre demandée. A l'inverse, au
Sénégal, la brisure fait partie des habitudes et ses importations
surpassent celles des autres types de riz entier. Des normes harmonisées
de qualité doivent voir le jour au sein de la Communauté pour
résoudre cette question.
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