II) De l'approche dyadique à l'approche
relationnelle
Le succès de la notion de relation consommateur- marque
signifie que le regard porté tant sur le consommateur que sur la marque,
a considérablement évolué au cours des deux
dernières décennies. L'analyse des pratiques de consommation a en
effet largement évolué du fait notamment de la prise en compte
croissante des facteurs émotionnels, hédoniques et affectifs.
Ainsi, la consommation n'est plus réduit au seul acte d'achat, mais
englobe un ensemble d'activités débordant le champ du «
marchandisable » et renvoyant à des pratiques identitaires par
lesquelles les individus manipulent, et échangent du sens et des valeurs
au-delà de l'aspect strictement fonctionnel des biens et services.
Corollairement, le regard porté sur la marque a également
évolué d'une approche considérant la marque
essentiellement comme un signe de différentiation et d'identification
vers une conception holiste (dépendant du domaine tout entier du
marketing) dans laquelle on considère la marque comme une machine
narrative dont la fonction est de produire et de transmettre du sens. La valeur
d'une marque peut donc se comprendre comme une chaîne de
bénéfices couvrant l'ensemble des noeuds de contact (regarder,
toucher, acheter, préparer, ranger, jeter, etc.) impliqués dans
l'expérience de consommation du produit ou de service. La relation peut
alors se lire comme une chaîne de valeur se décomposant en
différentes étapes qui sont liées à la
création et au développement de la valeur de la marque dans le
temps. Cette chaîne de valeur montre que les interactions entre la marque
et le consommateur, peuvent se comprendre sous forme essentiellement,
temporelle, dynamique et symbiotique. En effet, plutôt que de
considérer d'une part, le consommateur et d'autre part, la marque
(c'est-à-dire le sujet et l'objet selon un geste caractéristique
de la pensée occidentale), l'emphase (insistance) peut être mise
sur l'alchimie consommateur-marque quitte à substantialiser cette
relation en abandonnant une vision purement dyadique et transactionnelle.
Heilbrun (2003) fait une synthèse de ce travail sous forme de tableau
que nous vous proposons
D'UNE APPROCHE DUELLE À UNE APPROCHE RELATIONNELLE DE LA
MARQUE
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Approche duelle Approche
relationnelle
- Substantialisation des acteurs et de l'objet (le bien).
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- Substantialisation de la relation entre les acteurs (le
lien).
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- Analyse de la prise de décision du consommateur (choix
de la marque).
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- Analyse de l'ensemble du processus de consommation : prise de
décision, utilisation, activités post-achat
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- Emphase des études sur les comportements: (essai, achat,
ré-achat).
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- Emphase sur les attitudes à l'égard de la marque
(confiance, attachement, engagement voire addiction).
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- Rôle considéré prépondérant
de l'information et des processus cognitifs.
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- Intégration des dimensions affectives, des
émotions et des représentations imaginaires
véhiculées par les marques.
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- Utilisation de modèles essentiellement probabilistes.
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- Introduction de méthodes plus impressionnistes
(éthologie, ethnologie, socio-sémiotique).
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- Accent sur la transaction entreprise
nsommateur.
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- Accent sur la relation consommateur-marque
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- Approche essentiellement DÉCISIONNELLE du
consommateur-acheteur
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- Approche essentiellement EXPERIENTIELLE de
l'individu-consommateur
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Source : inspiré de Dupuy et Thoenig (1989) ; Filser
(1996).
L'approche relationnelle va de paire avec l'abandon d'une
vision strictement comportementale et décisionnelle de l'achat pour
comprendre la consommation comme un ensemble d'attitudes, d'émotions et
de représentations susceptibles de fournir une expérience. Dans
un ouvrage, McKenna (1997) définit d'ailleurs la marque comme une «
expérience active» signifiant ainsi que la marque devient un prisme
de
perception du monde voire dans certains cas un partenaire de
l'environnement familier et affectif des consommateurs.
Ainsi, avec ce partenaire, les consommateurs vont entretenir
un certain nombre de rapport dont la qualité et la nature
dépendront essentiellement du degré de corrélation qu'il y
aura entre la marque et le consommateur. Ceci sera développé au
niveau de cette nouvelle section.
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