La répression des infractions se rapportant aux violences sexuelles dans le contexte de crise de la Justice congolaise : Cas du Viol( Télécharger le fichier original )par Leslie MOSWA MOMBO Université de Nantes - Diplôme Universitaire de 3ème cycle en Droit Fondamentaux 2007 |
Section II. Le cadre juridique nationalEn RDC, le viol constitue une infraction poursuivie devant la justice militaire (A) et la justice civile (B). Jadis, ce crime ne figurait pas dans l'ancien code pénal militaire de 1972. Comme palliatif, le Code pénal ordinaire était appliqué aux militaires, auteurs de crime de viol. Le législateur voulant combler cette lacune, introduit cette infraction dans le nouveau code militaire datant de 2002. Tout comme le Code pénal militaire, le Décret du 30 juin 1940 portant Code pénal Congolais accusait également des lacunes en matière d'infraction de viol. Ces lacunes se sont révélées devant la difficulté de qualifier et de poursuivre les crimes de violences sexuelles et particulièrement le viol commis avec brutalité au moyen d'objets autres que l'organe masculin ainsi que celui commis sur des victimes de sexe masculin. La législation pénale congolaise se présentait ainsi comme inopérante, inefficace, insuffisante et dépassée devant ces crimes de viol. Il devenait impérieux pour le législateur congolais d'adopter une définition du viol qui reflétait les principes internationaux les plus avancés et notamment certains des aspects les plus progressistes de la jurisprudence récente135(*). A. La Justice militaire1. le Code de justice militaire de 1972En RDC, les crimes commis par les membres des forces armées congolaises étaient qualifiés et punis selon la loi n° 72/060 du 25 septembre 1972 portant code de justice militaire jusqu'à la fin de l'année 2002. Les mouvements rebelles oeuvrant à l'Est du pays tels que le RCD - Goma et le RCD - ML ont également soumis leurs troupes au code de 1972 durant les conflits armés. Cependant, à notre grande surprise, il y a lieu de relever qu'il n'existait pas dans le Code de justice militaire de 1972 de disposition traitant des violences sexuelles. Lors des poursuites, cette lacune était comblée par l'article 1er dudit Code qui disposait que le Décret du 30 juin 1940 portant Code pénal Congolais est également applicable aux membres des forces armées. Selon les Conventions de Genève de 1949 et le Statut du Tribunal pénal International auxquels la RDC a adhéré, le gouvernement congolais a l'obligation de s'assurer que ses codes pénaux punissent les auteurs de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité, dont le viol et les violences sexuelles, conformément aux dispositions des traités136(*). Quoique les autorités aient adopté en novembre 2002 un nouveau code de justice militaire et un code pénal militaire très peu de poursuites ont été engagées contre les forces armées régulières ou les groupes rebelles pour crimes de violence sexuelle. 2. le Code de justice militaire de 2002Pour rappel, le viol ne figurait pas comme infraction dans la loi n° 72/060 du 25 septembre 1972 portant code de justice militaire. Il a fallu attendre l'adoption d'une nouveau Code pour voir apparaître l'infraction. En effet, la loi n° 24/2002 du 18 novembre 2002 portant Code pénal militaire en son article 169, paragraphe 7 dispose que « le viol, l'esclavage sexuel, la prostitution forcée, la grossesse forcée, la stérilisation forcée et tout autre acte de violence sexuelle de comparable gravité sont considérés comme des crimes contre l'humanité passibles de la peine de mort ». Bien que l'article 169, paragraphe 7 constitue un grand pas en avant vers la lutte contre le viol commis par les militaires, il ne vise cependant que les actes perpétrés dans le cadre d'une attaque générale ou systématique contre la République Congolaise ou la population civile. Les cas de viols individuels ne sont malheureusement pas visés par ce texte de loi mais ceux - ci pourront être poursuivis conformément au Code pénal ordinaire. Toutefois, les dispositions sur « les violences ou sévices graves » en temps de guerre ou d'état d'urgence (punis de la peine de mort)137(*) et sur « les actes arbitraires ou attentatoires aux droits et libertés » (punis jusqu'à quatre ans de prison)138(*) pourraient servir de point de départ aux poursuites contre les militaires, auteurs de violences sexuelles. En conclusion, le nouveau code pénal militaire demeure lacunaire en matière de viol et de violences sexuelles car n'intégrant pas toutes les dispositions des Conventions de Genève de 1949 et du Statut du Tribunal Pénal International y relatives. Pour pallier à cette lacune, la RDC a mis en chantier un projet de loi de mise en oeuvre du Statut du Tribunal Pénal International pour assurer la conformité du droit congolais avec ces instruments internationaux. * 135 Amnesty International, « République Démocratique du Congo. Violences sexuelles : un urgent besoin de réponses adéquates », 26 octobre 2004, p. 17. * 136 Human Rights Watch, « En quête de justice : Poursuivre les auteurs de violences sexuelles commises pendant la guerre au Congo», Rapport, mars 2005 Vol. 17, No. 1(A), p.30. * 137 Loi n° 24/2002 du 18 novembre 2002 portant Code pénal militaire, Articles 103. * 138 Idem, Article 104. |
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