2.2.4. Le thriller
Les excès des tueurs psychopathes imposent un trop
grand nombre de topoï* à ceux qui désirent innover. Les
déviances humaines peuvent aussi être intégrées dans
un genre qui ressurgit, le thriller, mettant en scène des meurtriers
sous l'angle d'une intrigue policière : de Pulsions (1980) de
Brian de Palma à Seven (1995) de David Fincher en passant par
Le Silence des Agneaux (1990) de Jonathan Demme ou plus
récemment Meurtres à Oxford (2007) d'Alex de la Iglesia.
Pour caractériser le thriller, il faut prendre un peu de giallo, un
soupçon de film noir, un brin de scènes gores, et un important
background policier. Si le récent succès de ce genre est
clairement apparent, celui-ci n'est cependant pas nouveau, de nombreux films
relevaient de ce style depuis le début du siècle, flirtant entre
fantastique et policier. Ce qui différencie le thriller du film
d'horreur consiste en l'objet du film, son essence-même, repérable
aisément dans le schéma narratif. Le thriller se conçoit
comme une extrapolation de genre policier, intégrant des
éléments d'horreur dans le scénario, qui sont
principalement d'ordre esthétique mais ne font pas réellement
avancer l'action. En ce sens le coeur du film n'est pas la production de
l'horreur et les scènes sanglantes qui y sont distillées peuvent
être qualifiées de gratuites.
Malgré cela, il peut souvent sembler difficile de
distinguer le thriller et le film d'horreur. En effet de nombreux films
horrifiques présentent également une enquête
policière agrémentée de scènes effrayantes ou gores
qui peuvent paraître plus périphériques. Les gialli et les
slasher movies, malgré leur répétitivité
basée sur les meurtres en série, mettent souvent en scène
des représentants de la loi, des shérifs aux
détectives privés improvisés en passant
par des policiers désabusés et débordés par les
évènements1. Souvent tournés en ridicule,
impuissants face à un phénomène ou un être qui
dépasse l'entendement et la logique, ils ne sont souvent pour rien dans
le dénouement de l'histoire, voire même sont partie prenante des
crimes2. Le défi face aux forces de l'ordre que
représentent les crimes perpétrés dans les films d'horreur
ou les thrillers renforce le sentiment horrifique, surtout lorsqu'il n'y a pas
de happy end et que la possibilité d'un recommencement est
esquissée. Cette tendance est de plus en plus prégnante au sein
des productions, ce qui leur permet de se positionner à la fois sur les
deux créneaux -horreur et thriller- dans l'espoir d'attirer un public
plus étendu. Le public amateur du genre policier pourra ainsi se porter
sur un thriller, malgré des éléments repoussants dans la
description des meurtres dont il n'est pas friand en soi. En même temps,
on voit émerger un public particulier à ce genre de films, comme
en littérature on voit se multiplier les thrillers dotés de
détails croustillants (de Maxime Chattam à Patricia Cornwell)
sans aller jusqu'à l'horreur ni au fantastique. Le thriller peut donc
exister en dehors de l'horreur, même s'il lui emprunte certains
éléments, sans être un film d'horreur épuré,
procédant plus du schéma policier que de l'épouvante.
Le Silence des Agneaux de Jonathan Demme (1990)
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