La protection du creancier gagiste du fonds de commerce en droit positif rwandais( Télécharger le fichier original )par Modeste BISANGWA Université Nationale du Rwanda - Bachelor's degree in law 2005 |
D. Action paulienne ou action révocatoireLe Code Civil Rwandais ne parle de l'action paulienne que d'une manière fugitive. Aux termes de l'art. 65 CCLIII les créanciers peuvent, en leur nom personnel, attaquer les actions faites par le débiteur en fraude de leurs droits. En terme doctrinal, il s'agit d'une action paulienne conférée au créancier. L'action paulienne est un moyen de droit qui permet au créancier de réintégrer à son profit (et à son seul profit car l'acte attaqué demeure opposable aux créanciers autres que le demandeur de l'action) dans le patrimoine de son débiteur les biens qui en auraient été frauduleusement distraits65(*). L'action paulienne est une action personnelle qui a pour base, pour fondement, un quasi-délit66(*). L'idée fondamentale réside en la volonté du débiteur de se rendre insolvable ou d'aggraver son insolvabilité au préjudice de ses créanciers qui voient ainsi échapper les biens qu'ils comptaient saisir, et sur lesquels ils ont d'ailleurs un droit de gage général67(*). Ainsi, elle ne profite qu'au créancier qui en a pris l'initiative et lui confère un véritable droit de préférence68(*); l'acte attaqué reste opposable aux autres créanciers69(*). L'action paulienne ne peut être exercée que pour autant qu'une créance est exigible et certaine70(*). Dans ce cas, elle n'est pas d'un grand secours pour le créancier gagiste, car la fraude peut être exercée pendant la durée du gage, avant même que sa créance ne soit exigible. Selon DE PAGE, l'action paulienne n'est pas une mesure conservatoire mais une mesure d'exécution. Elle suppose que le créancier ait déjà discuté les biens de son débiteur, et, n'en trouvant plus assez pour se faire payer, cherche chez autrui ceux qui ont été frauduleusement soustrait de son droit de gage pour s'en faire attribuer le profit71(*). En outre, il serait difficile pour le créancier gagiste du fonds de commerce de rapporter la preuve de la complicité du cocontractant en cas d'actes à titre onéreux ce qui réduit l'action à quelque chose d'aléatoire72(*). Il faut bien avouer cependant que contrairement à l'action en revendication prévue par l'art. 12 al 2 du décret de 1937, l'action paulienne présente l'avantage d'être étendue dans le temps car, en tant qu'action personnelle, elle est soumise à la prescription trentenaire. C. Action obliqueL'action oblique nous vient de l'art. 64 CCLIII qui dispose : " les créanciers peuvent exercer tous les droits et actions de leur débiteur à l'exception de ceux qui sont exclusivement attachés à la personne". Elle est une prérogative reconnue au créancier d'agir en lieu et place et pour le compte du débiteur négligent dans le but de préserver les droits de ce dernier et, de ce fait, la consistance de son patrimoine. Ainsi, pour pouvoir exercer l'action oblique, le créancier doit justifier de 3 conditions : son intérêt à agir, l'inaction du débiteur ; enfin, l'existence d'une créance certaine et exigible73(*). Dès l'instant que ces conditions sont réunies tous les créanciers tant privilégiés que chirographaires peuvent agir, que leur titre soit, ou non, antérieur à l'acquisition du droit que le débiteur néglige d'exercer74(*). De là, le créancier gagiste sur le fonds de commerce est donc reçu à intenter une action oblique pour recouvrer une créance en souffrance, interrompre une prescription, inscrire une hypothèque ou poursuivre une instance dont le débiteur se désintéresse, etc.). Il s'agit donc des droits et actions de son débiteur qui existent dans son patrimoine et qu'il néglige de faire valoir contre les tiers75(*). Contrairement à l'action paulienne qui ne profite qu'au seul créancier qui en a pris l'initiative, l'action oblique est une mesure conservatoire dont le produit profite à l'ensemble de ses créanciers. Partant, son exercice reste sans intérêts surtout lorsqu'il y a d'autres créanciers dont les rangs sont antérieurs au sien. Le créancier ne trouve aucun incitant à l'exercice de l'action oblique dès lors qu'aucune préférence ne lui est reconnue. * 65 Voir R.C.J.B., 1995, p. 317. * 66 Voir les art. 258 et 259 CCLIII * 67H. DE PAGE, op. cit., t. 3, 1969, p. 222. * 68F. T'KINT, op. cit., n°29, p.25. * 69 Ibidem * 70 H DE PAGE, op. cit., t. 3, n° 229, p. 239. * 71 Ibidem * 72 Ibidem * 73 H. DE PAGE, op. cit., p. 216 n °191. * 74 Ibidem. * 75 Idem, p. 210. |
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