Ill. LA NOTION FISCALE DE GROUPE DE SOCIETES
En droit fiscal, en application du principe de la
personnalité de l'impôt, chacune des sociétés du
groupe est imposée séparément pour les différents
impôts dont elle est redevable (III-B). En corollaire, le droit fiscal,
à l'image du droit des sociétés ne considère pas le
groupe comme une structure juridique autonome (III-B).
III-A.: Le principe de l'autonomie fiscale de chaque
société membre du groupe
Chaque société membre du groupe est dotée
de la pleine personnalité et de l'autonomie fiscale. Cette autonomie se
vérifie aussi bien dans l'imposition du chiffre d'affaires, que du
revenu généré par chacune des entités.
Ainsi, par exemple, la taxe sur la valeur ajoutée est
due par une société du groupe sur son chiffre d'affaires propre
et, l'impôt sur les sociétés liquidé sur son
résultat fiscal individuel. Il n'est donc, en principe, pas tenu compte
de la nature des liens qui unissent les différentes
sociétés.
III-B.: L'absence de personnalité fiscale du
groupe
Le groupe en tant qu'unité économique est
dépourvu de la personnalité fiscale. L'une des
conséquences majeure de cette règle est le strict respect de
l'intérêt de chaque société dans l'imposition des
transactions commerciales et financières entre sociétés
groupées et, la non prise en compte de l'intérêt du groupe
dans la détermination du résultat de chaque
société(').
Une application rigide du principe de la personnalité
de l'impôt au groupement de sociétés peut être source
d'importants cumuls d'impositions, notamment dans un groupe fortement
structuré à l'intérieur duquel les différentes
sociétés entretiennent de relations d'affaires
générant des flux réels et financiers significatifs. C'est
pourquoi certains mécanismes fiscaux issus de régimes
spéciaux, permettent d'atténuer les « effets distordants du
principe de la personnalité de l'impôt »(2).
Ils concernent principalement la circulation des dividendes et
la compensation des résultats bénéficiaires et
déficitaires(3). A coté du régime fiscal des
sociétés mères et filiales des articles 12 et 98 du CGI,
il existe en droit comparé, le régime du bénéfice
consolidé, le régime du bénéfice mondial, et le
régime d'intégration fiscale(`).
(1) Voir les développements sur les flux intra-goupes de
NJIME ( H. ) Thèse : Les leviers fiscaux des opérations de
financement et d'intégration par les entreprises de leur
environnement Rouen septembre 1995.
(2) FERRAND (0) : op. cit.
(3) NJIME (H.) Thèse Rouen op. cit.
(4) Le bénéfice mondial, le bénéfice
consolidé et l'intégration fiscale sont des régimes
fiscaux présentement applicables aux groupes de sociétés,
sous certaines conditions, en droit fiscal français.
Au demeurant, l'appréhension du groupe de
société par notre système fiscal a déjà fait
l'objet d'une étude remarquable(5), qui a mis en
évidence la coexistence de règles de
déflance(6) et, de dispositions bienveillantes() à
l'égard des groupements de sociétés. Nous n'entendons pas
revenir sur ce thème.
Notre démarche vise à mener une étude
prospective du régime d'intégration fiscale sur simple option en
faveur des groupes de sociétés proposé par l'article 18 du
projet de texte modifiant l'Acte 3/72 -- UDEAC -- 153 portant harmonisation de
l'impôt sur les sociétés.
Aux termes des dispositions de l'article 18 :
« Toute société soumise à
l'impôt sur les
sociétés dans un état de la
Communauté, peut sur simple option, se constituer seule redevable dudit
impôt à raison du résultat d'ensemble réalisé
par le groupe qu'elle forme avec une ou plusieurs sociétés dont
elle détient de manière continue au cours d'un exercice, au moins
95 % des actions soit directement, soit indirectement par
l'intermédiaire de société du groupe, dès lors
qu'elle n'est pas elle-même détenue à 95 % par une autre
personne morale soumise à l'impôt sur les sociétés
dans un état de la communauté ».
L'intérêt d'une réflexion sur ce
régime d'intégration fiscale est double :
ü Il s'agira avant tout d'analyser et de préciser
les incidences pratiques de nouvelles dispositions légales ;
ü Il s'agira aussi de jeter un regard critique sur ces
dispositions, afin d'anticiper sur les dysfonctionnements latents et, sur les
dérapages virtuels en vue d'une meilleure maîtrise de ce
régime de taxation des groupes.
Aussi, allons-nous mettre en lumière l'économie
du projet communautaire d'intégration fiscale (PREMIERE PARTIE), pour
ensuite porter un jugement critique sur cette réforme (DEUXIEME
PARTIE).
(5) NDOCK LEN (A.) Le groupement de sociétés en
droit fiscal camerounais-Mémoire de DESS, université Dia,
1999.
(6) Verbo dispositions de l'article 20 du CGI relatif au
transfert indirect des bénéfices destinées à
prévenir des évasions fiscales et à normaliser les
relations financières entre sociétés d'un même
groupe.
(7) Verbo régimes de faveurs des articles 7, 8 et 9 du
CGI s'agissant des fusions, scissions, apport partiel d'actif, restructurations
d'entreprises et, articles 12 et 98 du CGI relatifs au régime fiscal des
sociétés mères et filiales.
La présente recherche ne s'est pas
réalisée sans difficultés, nous n'avons pas toujours pu
obtenir toute la documentation nécessaire à notre étude,
nous nous sommes souvent heurté à une carence de sources
d'informations à jour_
Toutefois, cette réflexion prospective est un essai de
contribution à l'instauration d'une fiscalité moderne au sein de
la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale
(C.E.M.A.C.) et, plus généralement de l'espace OHADA. Nous
espérons que les remarques suggérées dans ce
mémoire attireront l'attention des organes de décision de la
Communauté et, notre objectif sera alors atteint si lors de son
entrée en vigueur, le
texte -définitif
peaufiné grâce aux idées
développées dans cette étude. /-
Le TITRE IV du projet communautaire, relatif aux dispositions
applicables aux sociétés à statut fiscal particulier, en
son article 18 alinéa 1 'dispose que : « Toute
société soumise à l'IS dans un Etat de la
communauté, peut sur simple option, se constituer seule redevable dudit
impôt à raison du résultat d'ensemble réalisé
par le groupe qu'elle forme avec une ou plusieurs sociétés dont
elle détient de manière continue au cours de l'exercice, au moins
95 % soit directement, soit indirectement par l'intermédiaire de
sociétés du groupe, dès lors qu'elle n'est pas
elle-même détenue par 95 % et plus par une autre personne morale
soumise à l'IS dans un Etat de la Communauté ».
L'intégration fiscale est un régime de faveur, son
bénéfice est subordonné à la réunion d'un
certain nombre de conditions qui permettent sa mise en
Il convient alors d'examiner les conditions d'application du
régime (CHAPITRE I) et les effets qui y sont attachés (CHAPITRE
II).
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