Deuxième paragraphe : Sanction inappropriée
du défaut de la formalité de publicité
Outre l'exigence de la formalité de dépôt,
l'article 16 du C.S.C. soumet les actes et les délibérations
ayant pour objet les cessions de parts sociales à la formalité de
publicité.
La publicité doit être effectuée dans le
délai d'un mois à compter de
l'inscription95 de l'acte ou du
procès-verbal de la délibération au registre du
commerce96. Elle est faite par une insertion au
J.O.R.T. et dans deux journaux quotidiens, dont l'un, étant
publié en langue arabe. Les formalités de publicité sont
effectuées par le représentant légal de la
société et sous sa
responsabilité97.
L'inobservation des formalités de publicité
expose les dirigeants sociaux qui en ont la charge à une sanction
d'amende de trois-cents à trois-mille
dinars98 et entraine la nullité de l'acte
sous réserve de la régularisation prévue par le
C.S.C.99.
95 Les rédacteurs du C.S.C. auraient
dû préciser que la publicité doit être
effectuée dans le délai d'un mois à compter de
l'inscription ou du dépôt de l'acte ou du
procès verbal de la délibération au registre du commerce
étant donné que la cession doit faire l'objet d'un
dépôt et non pas d'une inscription au registre du commerce.
96 Article 16 in fine du C.S.C.
97 Article 15 du C.S.C.
98 Article 20 du C.S.C.
99 Article 17 du C.S.C.
Cette sanction de nullité prévue par l'article
17 du C.S.C. en cas d'inobservation des formalités de publicité
suscite les remarques suivantes :
D'abord, une question d'ordre terminologique s'impose. Il
s'agit de savoir si les formalités de publicité dont
l'inobservation entraine la nullité de l'acte de cession englobent-elles
le dépôt et la publicité ou concernent-elles seulement la
publicité100. En principe, on entend par
formalités de publicité l'ensemble des formalités
imposées par la loi lors de la constitution de la société
ou de la modification des statuts et au cours de la vie sociale,
destinées, selon les cas, soit à créer la
personnalité juridique de la société, soit à rendre
opposable aux tiers les modifications intervenues dans les statuts ou dans la
liste des organes de la société, soit à informer des
résultats financiers de l'exercice101.
Or, le législateur semble méconnaitre cette définition
unanimement reconnue. Il distingue nettement le dépôt de la
publicité dans le cadre du deuxième titre du premier livre du
C.S.C. déjà intitulé « l'immatriculation et la
publicité des sociétés ». De plus, il prévoit
des sanctions différentes en cas de défaut d'accomplissement de
ces formalités. Cette démarche du législateur semble
être futile pour deux raisons au moins. D'une part, ce
démembrement des formalités de publicité vise
l'aggravation de la sanction prévue pour le défaut de
publicité ce qui est vivement contestable. D'autre part, cette approche
porte atteinte à l'harmonie du C.S.C. qui renferme désormais des
dispositions qui se
100 DAHDOUH, Habib ; LABASTIE-DAHDOUH,
Christine. Op. cit., p.466.
101 CORNU. Op. cit., p.651.
contredisent. En effet, le législateur ne maintient pas
sa position de démembrement des formalités de publicité
dans le cadre de l'article 302 du C.S.C. qui fait référence aux
formalités de publicité prévues à l'article 163 et
suivants du même code puisque lesdits articles englobent le
dépôt et la publicité102.
Ensuite, la sanction de nullité de l'acte de cession
pour défaut de publicité représente une sanction
disproportionnée par rapport à la faute commise. En effet,
l'exigence de la publicité puise sa raison d'être dans la
protection des intérêts des tiers qui ne peuvent pas avoir
connaissance de l'acte de cession s'il n'est pas
publié103. Or, cet objectif est
déjà atteint par la sanction d'inopposabilité de l'acte
aux tiers en cas d'inobservation de la formalité de dépôt
au registre du commerce. Il serait plus adéquat de sanctionner le
défaut de publicité par la même sanction prévue pour
l'inobservation de la formalité de dépôt à savoir
l'inopposabilité aux tiers ou de prévoir une autre sanction telle
que la suspension de l'acte104.
Il faut aussi rappeler que la sanction de nullité est
une sanction inappropriée puisque l'inefficacité de l'acte va
s'étendre
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103 La cour de cassation tunisienne
déclare, bizarrement, le contraire. Elle estime que l'exigence de
publicité ne vise que la protection des intérêts de la
société elle même. On ne peut guère admettre cette
position tout en considérant cet arrêt comme singulier.
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aux parties elles-mêmes105.
Or, les parties n'ont pas besoin de la publicité pour connaitre un acte
qu'elles ont conclu ou auquel elles ont participé. Aussi peut-on penser
que la nullité résulte d'une erreur du
législateur106. De plus, cette sanction
s'avère une démarche illogique car, paradoxalement, alors qu'elle
tente de protéger les tiers, elle peut leur occasionner de graves
préjudices vu qu'elle est d'effet rétroactif et qu'elle aboutit
à considérer que l'acte de cession n'a jamais
existé107. C'est pour cette raison que le
législateur a pris le soin de préciser dans l'article 18 du
C.S.C. que les représentants légaux de la société
ne peuvent se prévaloir à l'égard des tiers de la
nullité visée par l'article 17 du même code.
En droit français, la Cour de cassation a
considéré que l'inobservation des formalités de
publicité concernant la cession des parts sociales n'entraine pas la
nullité de la cession, mais seulement son inopposabilité aux
tiers108.
Il faut noter, en outre, que cette nullité est relative
puisqu'elle résulte de l'inobservation d'une condition de la
validité du contrat et non d'une condition de sa
formation109. D'ailleurs, le défaut de
publicité ne touche pas à l'ordre public, il ne concerne que des
intérêts privés et notamment ceux des tiers. Il s'ensuit
que cette nullité ne peut utilement être invoquée que par
ceux qu'elle a pour
105 BARREAU-SALIOU,
Catherine-Thérèse. Les publicités
légales : information du public et preuve des actes. LGDJ., Paris :
1990, p.8.
106 GUYON. Op. cit.,
n°936.
107 Art. 325 et 336 du C.O.C.
108
Cass. Com. 23
juin 1987, Bull. Joly 1987, § 216, p.632.
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109
objet de protéger110 et
qu'elle peut faire l'objet d'une
régularisation111.
Enfin, le législateur cherche à contenir la
nullité dans des limites raisonnables en réservant la
possibilité d'un recours à la régularisation. À cet
égard, l'article 108 du C.S.C. prévoit que lorsque la
nullité de la société ou des délibérations
postérieures est fondée sur une violation des règles de
publicité, toute personne ayant intérêt à la
régularisation peut mettre la société en demeure d'y
procéder dans le délai de trente jours. À défaut de
régularisation dans ledit délai, tout intéressé
peut demander au juge des référés la désignation
d'un mandataire chargé d'accomplir les formalités.
Ce penchant pour la régularisation est renforcé
par les dispositions de l'article 107 du C.S.C. qui prévoit dans son
dernier alinéa que le tribunal saisi d'une action en nullité
peut, même d'office, fixer un délai pour permettre de couvrir la
nullité. Il ne peut prononcer la nullité moins de trois mois
après la date de l'exploit introductif d'instance.
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