CHAPITRE I LES EFFLUENTS HOSPITALIERS : CONTEXTE,
CARACTERISATION ET ASPECTS REGLEMENTAIRES
I. Contexte
Les activités de services médicaux,
vaccinations, recherches médicales incluant les essais diagnostiques,
traitements médicaux et examens de laboratoire par exemple,
protègent, rétablissent la santé et sauvent des vies (OMS,
2000). En dépit de leur caractère humanitaire, elles
n'échappent pas, elles non plus, au double processus
«d'appropriation-désappropriation» qui caractérise
toute activité technique (BLANC, 1999). La production de biens et de
services de santé nécessite la mobilisation de ressources
naturelles. Comme c'est le cas pour toutes les activités qui mettent en
oeuvre de la matière, celles relevant du domaine de la santé sont
également génératrices de pollution et de transfert vers
les milieux naturels.
D'une façon générale, les hôpitaux
agissent à deux niveaux sur les écosystèmes aquatiques.
Ils ont une demande en eau potable importante. Parallèlement, ils
produisent des effluent liquides, pollués par des microorganismes
pathogènes, par des radioéléments et par des substances
chimiques dont certaines peuvent avoir un caractère peu
biodégradable.
La consommation minimale d'eau domestique est de 100 litres
par habitant et par jour (GADELLE, 1995), alors que la valeur
généralement admise pour les hôpitaux varie de 400 à
1200 litres par lit et par jour. Aux Etats-Unis d'Amérique la demande
moyenne en eau des établissements de santé est de 968 litres par
lit et par jour (EPA, 1989a). En France, on estime à 750 litres par lit
et par jour (soit 250 à 350 litres pour l'hospitalisation et la
technique médicale, et 350 à 450 litres pour les services
généraux) les besoins moyens en eau d'un Centre Hospitalier
Universitaire (CLIN PARIS-NORD, 1999). Dans les pays en
développement, cette consommation semble plutôt se situer autour
de 500 litres par lit et par jour (LASER et al , 1999).
A côté de cette demande élevée
d'eau potable, se rajoutent des besoins en eaux spécifiques telles que
l'eau physiologique ou stérilisée et les sérums.
Cette importante consommation en eau des hôpitaux donne naissance
à de grands volumes de rejets liquides chargés de
microorganismes pathogènes, dont certains sont multirésistants
aux antibiotiques, de substances chimiques toxiques et des radioisotopes
(LEPRAT, 1998). Bien que la consommation élevée
en eau des centres hospitaliers puisse assurer une dilution importante des
charges organiques et inorganiques des effluents des différents
services, leur rejet dans le réseau d'assainissement communal ou dans le
milieu naturel n'est pas exempté de risques pour les espèces
vivantes qui seront exposés aux substances dangereuses contenues dans
ces effluents. Les recommandations de CLIN PARIS-NORD (1999)
soulignent que « Ce facteur de dilution ne peut être la
réponse dissimulant la réalité des
problèmes : des produits toxiques pour l'homme et pour
l'environnement sont utilisés et rejetés, l'hôpital est
relié à une station d'épuration qui a ses propres
contraintes ».
1.1. Problématique des effluents hospitaliers
L'un des principaux problèmes environnementaux
posés par les effluents hospitaliers est leur rejet, au même titre
que les effluents classiques urbains, vers le réseau d'assainissement
communal sans traitement préalable (LEPRAT, 1998 ;
CLIN PARIS-NORD, 1999). Le dosage des polluants d'origine
hospitalière montre que certaines substances, particulièrement
les composés organohalogénés et les résidus de
médicaments, quittent le plus souvent les stations d'épuration
(STEP) avec peu de dégradation (RICHARDSON et
BOWRON, 1985; GARTISER et ai,
1996; KÜMMERER et a/., 1997;
HALLINGSORENSEN, 1998; SPREHE et al, 1999).
La figure 1 illustre la problématique des effluents hospitaliers.
Effluents des activités de soins et de recherches
médicales (radioéléments, désinfectants,
détergents, résidus de médicaments, ..)
Réseau d'assainissement urbain
(antagonismes et synergies entre les polluants)
Eau du robinet
N/ Réseau d'assainissement de
l'hôpital
antagonismes et synergies entre les polluants)/
Effluents
\ classiques
urbains
Stations de traitement d'eau destinée
à la Cons. humaine
Eaux de surface
Rejets domestiques
industriels de l'hôpital
Figure 1 : La problématique des effluents
hospitaliers
Les substances difficilement dégradables
relarguées par la STEP peuvent provoquer la pollution du milieu naturel
en entraînant un déséquilibre biologique. Si les conditions
écologiques permettant la croissance des organismes capables de
dégrader ces substances ne sont pas réunies, ces substances
peuvent avoir une grande pérennité dans le milieu naturel.
L'extrême diversité des rejets hospitaliers et les
différentes évolutions physiques, chimiques et biologiques qu'ils
connaissent, obligent d'une part de les caractériser de manière
approfondie sur les plans chimique, biologique,et radiologique, et d'autre part
à étudier leur devenir (transport, transformation et
dégradation) dans l'environnement.
L'objectif de ce premier chapitre est de proposer un
état de l'art sur les effluents hospitaliers afin d'identifier les
données et les paramètres nécessaires à
l'évaluation et à la gestion des risques associés à
de tels rejets.
Ce chapitre est divisé en trois parties:
1. la première propose une classification des
hôpitaux et une typologie des effluents qu'ils produisent;
2. la deuxième correspond à une étude
bibliographique sur la caractérisation des rejets liquides hospitaliers
;
3. et la troisième se consacre à l'étude
des aspects réglementaires relatifs à ces rejets liquides.
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