La toxicité d'un produit ne lui est pas
intrinsèque. Elle dépend de sa teneur et de la nature de
l'organisme qui l'absorbe. Certains des éléments minéraux
de la croûte terrestre, comme le cuivre, le zinc, le
sélénium, sont essentiels à l'ensemble des organismes ou
à de grands groupes d'organismes. Cependant, les éléments
ayant des fonctions biologiques reconnues (oligo-éléments)
peuvent aussi, pour des teneurs supérieures à la dose
journalière admissible (DJA) et sous une forme chimique «
biodisponible», devenir toxiques (ACADEMIE DES SCIENCES,
1998).
Au XVIe siècle, PARACELSE
énonça le principe « Solo dose fecit
venenum », largement repris depuis comme une base de la
toxicologie moderne dans les termes suivants « Tout est toxique, rien
n'est toxique ; c'est la dose qui fait le toxique » (KECK
et VERNUS, 2000). La notion dose-réponse ou effet dû à une
dose d'exposition illustre bien ce principe.
L'effet d'une substance sur la santé humaine et
animale est dépendant de la dose administrée : plus la dose
(exprimée en mg/kg de poids corporel) augmente, plus l'effet
pharmacologique est important et, en dessous d'une certaine dose, il n'y a plus
d'effet biologique mesurable. Une dose journalière admissible
peut être définie à partir de doses sans effet
issues de tests sur des animaux et moyennant un facteur de
sécurité allant de 100 à 1000. Cette dose
journalière admissible doit tenir compte des différents milieux :
sol (aliments), eau, air (KECK et VERNUS, 2000).
Selon la dose administrée, un même toxique peut
entraîner différents effets et on parle alors de
toxicité aiguë (adsorption unique d'une dose
élevée d'une substance chimique) avec un effet létal ou
sublétal, ou de toxicité chronique (exposition
à des doses faibles mais répétées pendant un temps
plus ou moins long) provoquant des troubles à apparition progressive. On
parle enfin de toxicité spéciale pour des
substances induisant à long terme des effets sur la reproduction ou des
cancers (KECK et VERNUS, 2000).
BARBAULT (1993) considère
l'évaluation du risque des produits chimiques pour l'environnement de
l'homme comme la principale application de l'écotoxicologie. Par contre,
RIVIERE (1998) avance que la différence est importante
entre écotoxicologie et évaluation du risque. Les relations entre
écotoxicologie et évaluation du risque sont à double sens,
c'est l'écotoxicologie qui fournit les bases
scientifiques et les données qui permettront
l'évaluation du risque, mais inversement, ce sont les résultats
de l'évaluation du risque qui créent et génèrent
les études écotoxicologiques.
Les substances chimiques ne sont pas les seuls dangers
environnementaux : les changements climatiques, les modifications de paysages
ruraux, etc., sont des menaces pour les écosystèmes existants
(RIVIERE, 1998). Cette assertion met en évidence deux grandes classes de
risques :
a- les risques événementiels,
aigus, ponctuels, accidentels ou catastrophiques. Cette classe de
risque peut endommager plusieurs écosystèmes et provoquer des
pertes élevées en vie humaine et animale. Parmi les grands
exemples de cette classe on peut notamment citer :
· la pollution de l'air due à l'oxyde de soufre dans
la Vallée de la Meuse (1930),
· la pollution du riz par le cadmium à Toyama au
Japon (1950),
· l'explosion du réacteur de Seveso en Italie (1976)
entraînant une toxicité aiguë et chronique à la
dioxine,
· l'explosion du réacteur n° 4 de la centrale
électronucléaire de Tchernobyl en Russie (1986)
b- les risques chroniques dus à
l'accumulation de nuisances et de pollutions. Ces risques sont une fonction de
l'exposition permanente à des doses faibles de polluants. Les exemples
de cette classe peuvent être :
· la pollution atmosphérique due aux effluents
gazeux des incinérateurs d'OM,
· la pollution des écosystèmes aquatiques par
les lixiviats de décharges d'OM,
· la pollution au mercure de la baie de Minamata au Japon
par la compagnie Chisso (1932-1968)
· la pollution au plomb et au mercure des milieux
naturels (air, sol, eau) de la ville de Port-au-Prince en Haïti par les
rejets liquides des usines de fabrication de peinture,
· la pollution aux métaux lourds, aux
composés organohalogénés, aux résidus de
médicaments et aux microorganismes multirésistants des milieux
naturels (air, sol, eau) par les effluents hospitaliers.
La tendance actuelle est de regrouper tous ces dangers
potentiels sous le terme général de stresseurs ;
de la même manière, les individus, milieux ou
écosystèmes susceptibles d'être affectés par ces
stresseurs seront désignés sous le terme général
d'éléments à risque ou de récepteurs
(RIVIERE, 1998).
Parmi les différents stresseurs susceptibles d'avoir
des effets sur les milieux naturels et les espèces vivantes, ce travail
slntéresse uniquement aux polluants chimiques et microbiologiques
communément retrouvés dans les effluents des services
hospitaliers.
L'objectif de ce deuxième chapitre est de
présenter les différentes méthodes d'évaluation des
risques sanitaires et écologiques.
Le Chapitre II est divisé en quatre parties:
· la première se consacre à une
présentation sommaire du domaine scientifique de l'évaluation des
risques sanitaires et écologiques;
· la deuxième présente les différentes
modèles élaborés pour d'évaluation des risques
sanitaires et écologiques ;
· la troisième se consacre aux méthodes
quantitatives d'évaluations des risques microbiologiques ;
· la quatrième traite de la caractérisation
des incertitudes.