Dans la lignée des travaux du BIPE
(Société d'études économiques et de conseil en
stratégie), l'équipe de recherche propose d'effectuer un examen
de clusters aéronautiques de l'Aéropôle et de la TFZ selon
les prescriptions de la méthodologie d'analyse prospective pour
créer des clusters dynamiques comme illustrée dans la Figure
25.
Le postulat de base de ce nouveau processus part du constat
selon lequel les méthodologies traditionnelles d'analyse1 et
les processus usuels de développement de clusters ne garantissent pas
l'aboutissement à des clusters dynamiques, innovants et capables de se
renouveler.
1 Le processus traditionnel : (1) Étape 1:
état des lieux, SWOT (2) Étape 2: évaluation du potentiel
(3) Étape 3: définition d'une vision consensuelle (4)
Étape 4: définition d'un plan d'action (5) Étape 5: mise
en oeuvre du plan d'action.
Prospective des marchés :
° Marché
géographique ° Marché pertinent
Prospective applications
Prospective technologie
Prospective sectorielle
Vision
Etat des lieux
Gouvernement
Prospective acteurs
Source : BIPE (2004)1
Figure 25. Apport de la prospective
Ci-après, les différentes étapes de cette
méthodologie d'analyse prospective :
Etape 0. Identification des acteurs
présents à savoir les institutionnels étatiques (MICMNE,
Régions du Grand Casablanca et Tanger, ONDA, OFPPT, CRI...), le GIMAS et
les entreprises du secteur, centres de connaissances (universités,
écoles d'Ingénieurs et centres de formation...), CFCIM et fonds
Hassan II.
Etape 1. Prospective d'organisation
industrielle des entreprises de la filière aéronautique marocaine
par une analyse à la fois de la chaîne de valeur globale et du
cycle de vie des clusters aéronautique de l'Aéropôle et la
TFZ.
Etape 2. Synthèse SWOT du Diagnostic
(forces/faiblesses, opportunités/menaces).
Il convient de souligner que la présente étude
peut servir de base pour alimenter les étapes 0, 1 et 2 de «la
méthodologie prospective«. En effet, l'investigation terrain
(Cf. Partie. II, Chapitre. I et II) et le diagnostic stratégique (Cf.
Partie. II, Chapitre. III, Section. 1) ont mis en exergue l'importance des
acteurs les plus influents du secteur. Egalement, ces phases ont permis de
positionner la filière dans la CVG à la
1 WAELBROECK-ROCHA, Elisabeth.
L'apport des méthodologies prospectives pour créer des
clusters dynamiques. Ottawa : BIPE. 7ème conférence TCI, Le
28 septembre 2004.
charnière entre «fabricant de composants« et
«équipementier« et de situer les clusters aéronautiques
de l'Aéropôle et la TFZ au sein du CVC respectivement aux phases
d'«émergence-croissance« et d'«embryonnai
re-émergence«. Finalement la phase du développement
stratégique (Cf. Partie. II, Chapitre. III, Section. 1) en usant d'un
outil SWOT adapté, a dégagé les forces/faiblesses
et les opportunités/menaces de la filière aéronautique en
général et les clusters de l'Aéropôle et la TFZ en
particulier. Néanmoins, «la méthodologie
prospective« invite à compléter l'analyse par une
«prospective des acteurs« susceptible de dégager un
système de gouvernance à même d'assurer un meilleur
pilotage stratégique des clusters dynamiques dans le cadre
d'une vision partagée. D'où l'intérêt
d'intégrer les étapes 3 et 4.
Etape 3. Prospective des acteurs en
répondant à certaines questions clés :
· Qui cherche quoi ?
· Quelles alliances peuvent se nouer entre acteurs ?
· Comment organiser la gouvernance ?
· Quels sont les scénarios envisageables et quel
système de gouvernance à adopter ?
Les objectifs escomptés par «la prospective des
acteurs« du cluster étant de :
· Faciliter l'appropriation par tous les acteurs de la
vision.
· Construire un système de gouvernance permettant
d'inscrire le cluster dans la durée.
· Favoriser l'émergence d'un cluster dynamique,
capable d'évoluer dans le temps et de se renouveler.
Par ailleurs, il faut prendre en compte les
éléments suivants :
· Éviter les biais liés aux acteurs
dominants.
· Identifier les alliances naturelles entre acteurs et les
zones de consensus.
· Identifier les conflits potentiels et les divergences.
· Tenir compte des stratégies `cachées' de
chacun et éviter qu'elles ne perturbent le système.
· Créer une gouvernance équilibrée et
pérenne.
En outre, l'appréhension des objectifs1 des
acteurs du cluster par une méthode de «jeux d'acteurs«
s'avère primordiale et ce selon une démarche en 7 étapes
:
· Recensement des acteurs clés pertinents.
· Identification des enjeux stratégiques et des
objectifs associés.
· Hiérarchisation des objectifs prioritaires par
acteur.
· Repérage des convergences/divergences entre
acteurs.
· Évaluation des rapports de force entre acteurs.
· Intégration des rapports de force dans l'analyse
des convergences /divergences.
· Recommandations.
C'est ainsi que la méthode de «jeux
d'acteurs« permet la représentation synthétique d'une
réalité complexe. Dans ce sens, deux tableaux peuvent être
définis. Le premier tableau représente les positionnements des
acteurs pertinents sur chaque objectif identifié (décrypter les
jeux d'acteurs et faire une représentation graphique des convergences et
divergences). Par contre, le deuxième représente les
influences/dépendances deux à deux entre acteurs.
Par voie de conséquence, cette méthode
présente l'avantage à la fois de définir un système
de gouvernance approprié pour le cluster et d'éviter des biais
dans les recommandations, ce qui constitue le préalable pour aborder
l'étape suivante.
Étape 4. Définition d'une vision
facilitatrice de l'appropriation par les acteurs :
Le but ultime étant de dégager des
scénarii à partir d'une vision partagée en prenant en
considération les relations pouvant s'établir entre les acteurs.
Pour chaque scénario possible, il y a lieu d'évaluer les besoins
du cluster en termes d'équipements structurants, d'identifier les
acteurs principaux et les fonctions clés, d'apprécier
l'efficacité de l'organisation territoriale et d'examiner la pertinence
aussi bien des choix des applications que du système de gouvernance.
1 Quelques objectifs d'acteurs : (1) Diminution
des coûts via le partage de ressources (2) Accroître le nombre de
clients, le volume des ventes (3) Avoir l'accès aux technologies (4)
Attirer de nouvelles entreprises dans la région (5) Créer des
emplois (6) Diminuer la concurrence (7) Mieux connaître les
clients/fournisseurs (8) Améliorer l'offre d'infrastructure
économique de base (lobbying) (9) Créer une `image', labelliser
la région (10) Améliorer l'accès au, et les conditions de,
financement (11) Développer des programmes de formation adaptés
aux besoins des entreprises (12) Mutualiser les efforts de R&D.
Dés lors, il est possible de déterminer le
scénario «souhaitable« et la structure de gouvernance qui lui
correspond, sachant pertinemment que le système de gouvernance le plus
approprié découle de la vision et vice versa.
Étape 5 : Définition du plan
d'action.
Étape 6 : Mise en oeuvre du plan
d'action.
Enfin, dans le cadre de la «prospective
stratégique«, il est vivement souhaitable de faire appel
à des avis externes (chercheurs, consultants, ...etc.) afin
d'éviter le risque de myopie et biais d'appartenance.
En somme, si les recommandations déclinées en
plans d'actions pourraient améliorer la compétitivité de
la filière aéronautique marocaine moyennant des stratégies
de clusters en faveur de l'Aéropôle et de la TFZ, il n'en demeure
pas moins que la réussite d'une telle politique dans le cadre d'un
partenariat stratégique entre Etat-régions-clusters, est
tributaire de la définition des contours d'une vision
partagée et d'un système de gouvernance
intégrant les différents stratégie des acteurs en
présence. A ce titre, l'adoption d'une analyse prospective
semble offrir un outil idoine pour évoluer vers des
clusters aéronautiques dynamiques au Maroc.
Conclusion
Le diagnostic réalisé et les recommandations
formulées dans le présent chapitre ont pour objectif de
développer un secteur aéronautique marocain compétitif.
Ces recommandations interpellent plus précisément les
entreprises, les associations professionnelles et les pouvoirs publics. Le
présent chapitre consacré au développement
stratégique a poursuivi deux objectifs principaux.
D'abord, l'analyse précédente suggère
que la filière marocaine est positionnée au stade de
sous-traitance de «composants« dans la CVG. La
compétition exacerbée à ce niveau invite les STs marocains
à consolider davantage cet acquis. Il n'est plus question de se
contenter d'optimiser le triptyque CQD et flexibilité de la production
mais d'actualiser le niveau de compétences en introduisant de nouveaux
thèmes relatifs à l'ingénierie de la valeur et l'analyse
de la valeur.
De même, il apparaît que les efforts
marketing et de veille technologique sont d'autant plus
prégnants, que la filière, a enclenché un mouvement
d'évolution progressive vers le stade
d'«équipementier«. Ce stade requiert des
compétences relationnelles- spécifiques avec les DOs
majeurs.
Ensuite, le positionnement des clusters de
l'Aéropôle et de la TFZ identifiés
précédemment, à des phases différentes du CVC,
plaide pour l'adoption de politiques publiques en faveur des clusters (PPC) eu
égard à la spécificité de chaque phase selon une
approche reengineering.
Finalement, si les recommandations,
opérationnalisées sous forme de plans d'action pratiques
interpellant les différents acteurs, pourraient améliorer la
compétitivité de la filière aéronautique marocaine
moyennant des stratégies de clusters, il n'en demeure pas moins que la
réussite d'une telle politique dans le cadre d'un partenariat
stratégique entre Etat-régions-clusters, est tributaire de la
définition de contours d'une vision partagée et d'un
système de gouvernance selon une méthodologie
d'analyse prospective.
Conclusion deuxième partie
Dans cette seconde partie, après avoir
opérationnalisé le cadre théorique décrit
précédemment en un modèle conceptuel, le
déploiement de la démarche d'investigation terrain, a
débouché sur les résultats quantitatifs et qualitatifs de
la recherche. Enfin, une démarche de développement
stratégique, basée sur un diagnostic du secteur, a permis de
dégager des pistes d'amélioration pour une meilleure
compétitivité de la filière marocaine.
En effet, 38 firmes opérant dans le secteur
aéronautique furent approchées par le questionnaire. Le taux de
réponse enregistré (31,58%) ainsi que la
représentativité (géographique et par activité) des
firmes ayant répondu favorablement à notre requête, sont
fort satisfaisants. Pour ce qui est de la dimension qualitative de la
recherche, des guides d'entretien ont été administrés en
face à face aux différents intervenants du secteur et à un
panel représentatif de firmes. Par la suite, les résultats fruits
du déploiement de ces outils, ont constitué le socle de base du
développement stratégique du secteur aéronautique.
Par ailleurs, Il en ressort que la filière marocaine
est positionnée au stade de sous- traitance de
«composants« dans la CVG. La compétition
exacerbée à ce niveau invite les STs marocains à
consolider davantage cet acquis. De même, il apparaît que les
compétences marketing et de veille technologique sont si
prégnantes, que la filière a enclenché un mouvement
d'évolution progressive vers le stade
d'«équipementier«.
En outre, le positionnement des clusters de
l'Aéropôle et de la TFZ, à des phases différentes du
CVC, plaide pour l'adoption de politiques publiques en faveur des clusters
(PPC) en fonction de la spécificité de chaque phase selon une
approche reengineering. Cependant, la réussite d'une telle politique est
tributaire d'une analyse prospective afin d'évoluer
vers des clusters aéronautiques dynamiques au Maroc.
Finalement, ces recommandations ont été
opérationnalisées, sous forme de plans d'action pratiques
destinés aux différents acteurs de la filière, et ce dans
l'objectif de développer une sous-traitance aéronautique
marocaine de classe mondiale.