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Dynamique des relations verticales et clustering : Quelle stratégie pour une sous-traitance aéronautique marocaine compétitive ?

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par Makram KHABBACHE, Zakaria BENHAR et Soufyane ETBER
Institut Supérieur de Commerce et d'Administration des Entreprises - Cycle Supérieur de Gestion ( Executive MBA ) 2007
  

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Conclusion générale

L'industrie aéronautique est constituée de quelques avionneurs mondiaux (duopole Boeing et EADS), d'un nombre relativement limité de systémiers, motoristes et équipementiers internationaux et de nombreux fournisseurs de composants et sous- équipements. Elle se distingue par un caractère hautement stratégique et un marché en pleine expansion. Néanmoins, le caractère cyclique de l'activité dans un environnement concurrentiel ouvert ainsi que les contraintes liées à l'organisation productive, ont introduit un certain nombre de tendances, notamment le désengagement progressif des Etats, la concentration et l'internationalisation des acteurs industriels, ainsi que de profondes mutations des stratégies des compagnies aériennes. Ces tendances ont contraint les grands DOs mondiaux à réorienter leurs stratégies dans le sens à la fois d'une réduction drastique du nombre de fournisseurs directs et d'une externalisation accrue notamment vers les pays émergents.

Dans cette optique, le Maroc de par ses atouts, a capté l'attention des investisseurs internationaux. Conscient de ces nouveaux enjeux, le Maroc a érigé ce secteur en un des moteurs de croissance et de développement dans le cadre de sa nouvelle stratégie industrielle «Programme Emergence«.

Par ailleurs, le Maroc est confronté sur ce créneau à une rude concurrence, notamment de la part de la Tunisie qui dispose d'un tissu aéronautique assez étoffé et des pays de l'Europe de l'Est qui ont une tradition aéronautique reconnue. Ceci invite les pouvoirs publics marocains en particulier et les différents acteurs de la filière en général, à s'interroger sur la stratégie à adopter pour assurer une meilleure compétitivité à la filière aéronautique marocaine.

Des conclusions d'étape

L'outil de développement stratégique de la présente recherche (voir Figure 6), s'inspirant de la «Competence-Based View«, suggère que la performance des STs est tributaire de l'acquisition des compétences technologiques et organisationnelles, de l'existence d'une dimension d'apprentissage organisationnel et de l'inscription dans un registre relationnel de partenariat vertical avec les DOs, moyennant un processus d'évolution graduelle. C'est ainsi qu'un ST peut incrémenter son statut, au

sein de la chaîne de valeur globale, en empruntant la trajectoire de développement industriel.

Une stratégie cluster serait aussi une réponse idoine à la problématique de la recherche. En effet, les espaces clustérisés, en tant que sources d'externalités positives et vu les possibilités d'apprentissage organisationnel qu'ils offrent, constituent un champ propice au développement d'une sous-traitance aéronautique marocaine compétitive de classe mondiale.

Et si la recherche a d'une part, réfuté le lien entre le degré d'exigence et le profil du ST ; et d'autre part, n'a pas validé complètement les hypothèses de départ concernant la contribution des degrés de dépendance, influence et clustering dans l'acquisition des compétences technologiques et organisationnels du ST, il n'en demeure pas moins qu'elle a mis en évidence d'autres résultats fort intéressants relatifs au positionnement de la filière marocaine dans la «Chaîne de Valeur Globale« et des clusters identifiés dans le «Cycle de Vie du Cluster«.

Ce travail de recherche a permis de dresser le profil «idéal« du sous-traitant marocain, de situer la filière dans la «Chaîne de Valeur Globale« de l'industrie aéronautique, de positionner les agglomérations à forte concentration aéronautique dans le «Cycle de Vie du Cluster«, et enfin de proposer par voie de conséquence des recommandations leur permettant d'évoluer aussi bien au sein de la CVG que dans le CVC.

En effet, l'étude a révélé que la filière marocaine est positionnée au stade de sous- traitance de «composants« dans la CVG. La compétition exacerbée à ce niveau invite les STs marocains à consolider davantage cet acquis. Il n'est plus question de se contenter d'optimiser le triptyque CQD et flexibilité de la production mais d'actualiser le niveau de compétences en introduisant de nouveaux thèmes relatifs à l'ingénierie de la valeur et l'analyse de la valeur. De même, il apparaît que les efforts marketing et de veille technologique si prégnants, que la filière a enclenché un mouvement d'évolution progressive vers le stade d'«équipementier«. Ce stade requiert des compétences relationnelles- spécifiques avec les DOs majeurs dans un cadre de partenariat vertical.

Par ailleurs, la recherche a permis de situer les agglomérations d'entreprises opérant dans l'aéronautique dans le cycle de vie du cluster. C'est ainsi que la TFZ est à une phase qualifiée d'«embryonnaire à émergence« alors que l'Aéropôle est à une phase qualifiée d'«émergence à croissance«. En outre, il convient de souligner la prédisposition des STs marocains à s'insérer dans des clusters en vue de bénéficier du levier de l'apprentissage inter-organisationnel source d'un avantage concurrentiel sûr. Ceci plaide pour l'adoption de politiques publiques en faveur des clusters (PPC) en fonction à la spécificité de chaque phase selon une approche reengineering.

Dans cette optique, la mise en place d'une politique de cluster devient une priorité. Cette stratégie permettra de catalyser les échanges, aussi bien entre les sous- traitants marocains eux mêmes qu'avec les institutionnels, et améliorera par voie de conséquence le profil du ST marocain. L'une des externalités positives offerte par le cluster est la mutualisation des efforts visant la formation et le développement des ressources humaines ainsi que la promotion de la R&D.

Un tel scénario gagnant est tributaire d'une analyse prospective en vue de créer des clusters dynamiques. Celle-ci permettrait à travers la prospective des acteurs de définir à la fois un système de gouvernance et une vision appropriée qui susciterait la plus large adhésion dans ces clusters. A cet égard le GIMAS a un rôle primordial à jouer, tant par sa forte implication que par sa participation effective à une structure de gouvernance/animation efficace et efficiente du cluster.

Les résultats de la recherche et son ancrage dans la réalité du terrain ont confirmé l'efficience de la démarche méthodologique poursuivie pour l'élaboration de ce travail de recherche.

Cette démarche méthodologique en cinq phases (voir Figure 1) empruntée par l'équipe de recherche, peut être considérée comme pertinente dans la mesure où elle a permis (1) de valider la problématique de départ, (2) de dégager un modèle conceptuel ad hoc et de l'opérationnaliser par la suite afin d'aborder le terrain. Par la suite, (3) la filière aéronautique marocaine a été diagnostiquée en premier lieu par l'identification des compétences organisationnelles et technologiques détenues en interne, et l'analyse de l'environnement externe en second lieu, et ce conformément aux prescriptions du MRC. (4) Après avoir positionné au préalable la filière

aéronautique marocaine dans la CVG et situé l'Aéropôle et le pôle aéronautique de la TFZ dans le CVC, un scénario gagnant propose l'inscription du secteur dans des stratégies de clusters. Enfin, cette démarche est couronnée par (5) une phase de rédaction obéissant à des normes reconnues dans les sciences de gestion1. Egalement, Les propositions suggérées par cette étude - conçues davantage comme des interrogations qui portent sur la meilleure façon de développer le secteur aéronautique - ont fait l'objet d'une large communication auprès des professionnels, institutionnels et chercheurs2. En outre, afin de procurer à la recherche une dimension internationale, une conférence-débat est prévue au profit des professionnels nationaux et internationaux le 25 Janvier 2008 à Marrakech à l'«Aeroexpo Maroc« (premier Salon International Des Industries et Services Aéronautiques au Maroc).

Les résultats qui seront présentés dans cette recherche sont le fruit d'une enquête à grande échelle réalisée auprès de 38 sous-traitants aéronautiques marocains et six (06) principaux acteurs du secteur sur la période s'étalant du mois de mars au mois d'août 2007. 31,58% des entreprises ont répondu favorablement au questionnaire. Pour ce qui est du guide d'entretien 14 entrevues ont été réalisées avec les principaux protagonistes et également avec un échantillon représentatif de la filière.

Le déroulement de ce travail a été mené non sans difficultés. Dans les développements qui suivent nous en citons les plus saillantes :


· La recherche intervient à un moment où la gouvernance du GIMAS n'était pas accessible à cause d'un agenda surchargé (salons du Bourget et de l'«Aeroexpo Maroc«, missions d'études, projet de l'IMA...). Pour contrecarrer cette difficulté, les principaux thèmes relatifs au guide d'entretien adressant le GIMAS, ont été alimentés par les propos des responsables de l'association qui se sont exprimés sur le secteur aéronautique marocain à l'occasion d'une conférence-débat organisé le 22 mai 2007 par la CFCIM. En complément, des membres du GIMAS ont été sollicités directement afin de saisir au mieux la vision du groupement. Par

1 L'Institut Supérieur de Commerce et d'Administration des Entreprises, l'Ecole Polytechnique de Montréal et la Haute Ecole de Gestion de Genève.

2 Les résultats préliminaires de la recherche ont fait l'objet de conférences débats et de présentations à l'Académie Internationale Mohammed VI de l'Aviation Civile (ONDA), CRI du Grand Casablanca, CFCIM.

conséquent, le planning de la recherche (Cf. Annexe. IV) n'a pas subi de modifications majeures.

· L'absence d'une définition consensuelle des activités relevant du secteur aéronautique, ainsi qu'une base de données unifiée regroupant toutes les entreprises de la sous-traitance aéronautique, ont rendu difficile la tâche de l'identification de la population cible de la recherche . Ainsi, l'équipe de recherche a procédé au croisement de listes émanant de différents acteurs publics et privés (MICMNE, ONDA, GIMAS,..) pour construire un fichier aussi exhaustif que possible.

· Le taux de retour enregistré suite à l'envoi du questionnaire par voie électronique à l'ensemble des 38 entreprises du secteur n'a pas atteint le seuil escompté. Dès lors, les chercheurs ont opté pour «le face à face« pour garantir un taux de réponse en conformité avec les standards académiques, ce qui a valu naturellement un investissement conséquent en termes de temps et de coût.

· La littérature dénote d'une richesse quant aux formes organisationnelles qui régissent la sous-traitance aéronautique, néanmoins elle s'est focalisée davantage sur les pays industrialisés à forte tradition aéronautique, occultant au passage, de proposer une grille de lecture des nouveaux réseaux de sous- traitance dans les pays émergents. L'avènement de ces réseaux, rappelons-le, s'inscrit dans le sillage des mouvements d'externalisation et d'internationalisation opérés par les sous-traitants majeurs cette dernière décennie. Ceci a incité l'équipe de recherche, à consentir un effort pour modéliser les nouveaux réseaux de sous-traitance dans les pays émergents.

· Les limites d'applicabilité de la méthode de régression linéaire pour un échantillon d'une taille réduite, appellent à plus de prudence quant au maniement des résultats quantitatifs. Pour ce faire, lors des phases d'interprétation et de discussion des résultats, l'équipe a pris le soin d'intégrer les constats, fruits de l'investigation documentaire et de l'analyse qualitative.

Des pistes de recherche

L'ensemble des résultats enfin laisse entrevoir des perspectives de recherche intéressantes à plusieurs égards. En effet, la recherche nécessiterait des prolongements tant pour approfondir certains concepts que pour tenter d'apporter des éléments de réponse complémentaire à certaines interrogations.

Les efforts de clarification pourraient ainsi porter sur la notion de «Compétences« détenues en interne par la firme ou partagées dans des plates-formes cognitives et organisationnelles. Si la notion de «Compétences clés« (technologiques et organisationnelles) s'est avérée pertinente dans l'explication de la performance du ST, il n'en demeure pas moins que des auteurs1 du MRC ont souligné la nécessité de confronter chacune d'entre elles aux quatre conditions, dites VRIS (Valorisable, Rare, non Imitable, non Substituable) afin d'identifier les «compétences distinctives« permettant de conférer à la filière aéronautique marocaine un avantage concurrentiel.

Les résultats trouvés confirment que le passage2 à des modes plus étroits de partenariat vertical, opère un changement positif dans le profil du ST et contribue de facto à l'amélioration de la performance. Egalement, la compétitivité du ST est tributaire de son insertion dans des espaces clustérisés, qui requiert une capacité à entretenir des relations proactives aussi bien avec le tissu industriel environnant qu'avec les institutionnels. Ces dynamiques inter-firmes, renvoient à des compétences relationnelles inter-organisationnelles. Par ailleurs, sur un registre intra-firme, des auteurs3 ont souligné le rôle prépondérant d'une dimension sociale portée par l'individu dans la construction et/ou la mise en place d'un profil proactif chez le ST. A ce titre, la conduite du changement, la communication intra-firme, la

1 - ATAMER, Tugrul et CALORI, Roland. Diagnostic et décisions stratégiques. Paris : Dunod, 2003.

- BARNEY, J.B. Gaining and sustaining competitive advantage, Addison-Wesley, Reading, Massachusetts, 1997.

- HAMEL, G. Competition for competence and inter-partner learning within international strategic alliances. Strategic Management Journal, 1991.

2 Un tel processus d'évolution graduelle nécessitant la construction et la reconfiguration des compétences, s'effectue, rappelons-le, lentement et difficilement.

3 - PERSAIS, E. Les compétences Relationnelles peuvent-elles devenir Stratégiques ?, Annales des Mines : Gérer et Comprendre, vol. 68, p. 37-48, 2002.

- MILBURN P., La Compétence Relationnelle: Maîtrise de l'Interaction et Légitimité Professionnelle, Revue Française de Sociologie, n°1, vol. 43, p. 47-72, 2002.

gestion des connaissances, sont autant de dimensions qui contribuent à la réalisation d'un objectif socialement bien défini. Pour cela, il est suggéré, dans le cadre de programmes de recherche ultérieures, d'étendre cette analyse en incorporant une troisième catégorie de compétences : «Les compétences relationnelles«.

Et si les pistes d'amélioration suggérées par la présente étude pourraient améliorer la compétitivité de la filière aéronautique marocaine moyennant des stratégies de clusters en faveur de l'Aéropôle et de la TFZ, il n'en demeure pas moins que la définition des contours d'une vision partagée et d'un système de gouvernance et d'animation intégrant les différents stratégie des acteurs en présence, semble offrir un outil ad hoc pour évoluer vers des clusters aéronautiques dynamiques. Dès lors, l'équipe de recherche propose de réexaminer dans le cadre des travaux ultérieurs, les stratégies clusters dans la lignée des prescriptions de la méthodologie d'analyse prospective dans l'optique de développer au Maroc des clusters dynamiques, innovants et capables de se renouveler.

Finalement, l'équipe de recherche estime que la démarche construite dans le cadre de la présente thèse (modélisation des réseaux de sous-traitance aéronautique des pays émergeants, outil de développement stratégique adapté, MRC décliné sur des clusters... etc.), pourraient être généralisée, par une approche de Benchmarking, sur les recherches qui se pencheront sur la compétitivité des autres secteurs du programme «Emergence«.

L'ensemble de ces questionnements interpelle tout autant les chercheurs que les praticiens et les institutionnels. Cette convergence d'intérêt devrait inciter à mener davantage de travaux dans ces directions.

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon