1.2.2 Un marché aéronautique incertain pour
les entreprises wallonnes
Le marché de l'aéronautique s'appuie sur deux
piliers intimement liés : l'aviation civile et la défense. C'est
un marché globalement en difficulté. Même si ces
difficultés sont antérieures aux attentats du 11 septembre, elles
ont été amplifiées et révélées par
ces événements. Ces difficultés sont dues à
différents phénomènes.
Dans le secteur civil, la dérégulation du
transport aérien a modifié considérablement les
règles du jeu et entraîné une pression importante sur les
prix. Les compagnies aériennes font face à de nouveaux entrants
et à de nouvelles logiques de marché, elles prennent plus
difficilement le risque d'investir à long terme. Les tendances servant
de base pour la planification des investissements ne se sont pas
confirmées, la montée du nomadisme dans le travail ne se traduit
pas nécessairement par une augmentation des transports en avion et les
taux de croissance prévus ne se réalisent pas,
particulièrement aux USA. Le «mini boom« qu'a connu le secteur
à la fin des années 90 semble bel et bien être
terminé, et les événements du 11 septembre freinent la
reprise.
Dans le secteur de la défense, les années 90 ont
été marquées par des désinvestissements importants
et des baisses de budget de la plupart des pays développés. Dans
ce secteur, le 11 septembre aura plutôt un effet de reprise.
Dans ce contexte difficile, les entreprises sont soumises
à des pressions importantes et sont obligées de repenser leur
mode de fonctionnement pour rester à la pointe des avancées
technologiques et continuer à améliorer leur productivité.
A ces deux niveaux, l'industrie aéronautique européenne accuse un
retard par rapport à son principal concurrent américain. Le
rapport STAR 211 fait état d'un décalage de 10% dans
les résultats en termes de productivité et d'un décalage
plus important encore au niveau de l'innovation technologique.
1 C'est un rapport «STAR 21«
présenté par un groupe d'experts à la commission
européenne sur l'état et les perspectives du secteur
aéronautique européen.
1.2.3 La montée des Nouvelles Formes d'Organisation
dans le secteur
Afin de parer à la double contrainte d'augmentation de
la productivité et d'amélioration de la capacité
d'innovation, les grands avionneurs européens favorisent un mode de
conception et de production baptisé «avion
virtuel«1. Il s'agit d'associer, dès la phase de
R&D, les acteurs impliqués dans les principales phases de la
chaîne de valeur à savoir la conception, la production et la
distribution.
L'idée est de mettre fin à des processus
jusqu'ici séquentiels pour aller vers des processus
intégrés et donc de raccourcir les cycles de
conception-production, et ce en s'appuyant sur une gigantesque base de
données commune et d'une plate-forme de travail collaboratif. En
impliquant dès le début les principaux interlocuteurs (marketing,
production, ingénieurs, etc.), les allers-retours entre les
étapes du processus sont évités et les contraintes et
spécificités de chaque étape sont prises en compte
dès le démarrage du projet. Cette nouvelle façon de faire
va demander un changement profond dans l'organisation interne des entreprises
impliquées dans le cycle de conception-production, mais également
dans les rapports que ces entreprises entretiennent entre elles. Au niveau
technologique, une telle démarche appelle une grande
interopérabilité des systèmes d'information des
différentes entreprises concernées et une interdépendance
de plus en plus grande des systèmes productifs.
Il faut savoir que, ces dix dernières années, le
concept unificateur du secteur était principalement le respect des
normes de qualité par l'ensemble des intervenants. Il va progressivement
se déplacer vers l'aspect technologique, le recours à des outils
TIC puissants pour raccourcir et améliorer les cycles de
conception-production.
Par ailleurs, des mouvements de circulation du personnel
à l'intérieur de la filière aéronautique sont
constatés. Le DO peut être amené à
«détacher« du personnel qualifié (ingénieur
commercial, R&D, qualité, etc.) chez son ou ses sous-traitants pour
répondre à des besoins ponctuels de compétences. Le
mouvement inverse existe aussi : le sous-traitant détache du personnel
qui va travailler dans les installations du donneur d'ordres. Les
problèmes soulevés par cette mise à disposition semblent
se situer davantage dans le chef du personnel détaché. Ce
1 Également appelée Ingénierie
Concourante. Voir Partie. I, Chapitre. 1, Section. 1.
personnel, dont une des missions est le transfert de
compétences vers le personnel du sous-traitant ou du donneur d'ordres,
pourrait craindre à terme de perdre son métier, si le personnel
de l'entreprise hôte développe des compétences
spécifiques.
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