i) La crise d'Airbus et la vigueur de l'euro accentuent-t-elles
la production hors zone euro ?
L'industrie aéronautique européenne est
confrontée à une perte de compétitivité due
à la fois à la parité monétaire et au coût de
la main d'oeuvre qui ont pour conséquence le renchérissement de
ses exportations d'avions2. Dans ce contexte difficile et suite aux
problèmes de production de l'A380, la direction d'Airbus a
dévoilé un nouveau plan de restructuration en huit points
étalé sur quatre à cinq ans baptisé «Power
8«3.
Selon l'étude4 du CRI du Grand Casablanca,
les solutions retenues dans le cadre de ce plan de restructuration5
se résument à couvrir le risque de change, d'acheter plus hors
zone euro et de faire des gains de compétitivité via les
sous-traitants. Ce plan de réduction des coûts devrait aussi
permettre d'accélérer les délais moyens de
développement des programmes et d'engendrer de profonds changements
organisationnels menant vers une entreprise
étendue6.
En principe, la crise d'Airbus n'affecterait pas
négativement les sous-traitants
aéronautiques
marocains7. Plus encore, «selon les experts c'est une
opportunité très
1 COULON, Dédier et al. Mission
Aéronautique. Casablanca : UPLINE SECURITIES-DECISION Etudes &
Conseil, 2007. 41 p. Rapport UPLINE SECURITIES DECISION-CRI Grand
Casablanca.
2 Avec un dollar continûment faible et face
à des coûts de production majoritairement en euros, les marges
perçues sur la vente d'appareils facturés en billets verts se
réduisent et pénalisent les futurs investissements
nécessaires au développement de la future famille de
long-courriers (A350XWB , le successeur de l'A320).
3 Ce dispositif a pour but de compenser l'ensemble
des 4,8 milliards d'euros de perte cumulée par le programme du
«Super Jumbo« lié aux dépassement des coûts, au
glissement des livraisons et aux compensations financières
destinées aux compagnies clientes, mais aussi, et surtout, pour
améliorer la compétitivité de l'avionneur européen
face à son concurrent direct. «Power 8« devrait permettre des
économies annuelles durables d'au moins 2 milliards d'euros à
partir de 2010.
4 COULON, Dédier et al. Mission
Aéronautique. Casablanca : UPLINE SECURITIES-DECISION Etudes &
Conseil, 2007. 41 p. Rapport UPLINE SECURITIES DECISION-CRI Grand
Casablanca.
5 Le plan prévoit la suppression de 10.000
emplois sur quatre ans, dont 4.300 en France et 3.700 en Allemagne, ainsi que
des projets de cessions ou des partenariats industriels pour six de ses sites
de production notamment avec Latécoère, Segula Technologies.
6 Louis Gallois a précisé «Le
concept d'entreprise étendue signifie que nous aurons des accords de
long terme avec les nouveaux partenaires en matière de design et de
production. Nous discuterons avec eux de la localisation de la production, nous
échangerons des technologies«.
7 Selon Jocelyne Terrien, responsable service de
presse du Groupe Safran «les plans d'Airbus sont sans effet sur les
développements du Groupe Safran et de sa filiale Aircelle au Maroc. En
effet, il s'agit de réorganisations internes à Airbus, et le
programme de production n'est pas changé«.
favorable au Maroc à condition de savoir la saisir en
se positionnant«1. Selon ce raisonnement, le secteur
aéronautique vit actuellement une mutation profonde. Les constructeurs
se désengagent de la production pour se concentrer sur la marque, le
produit et le marketing. La production est ainsi laissée à des
partenaires lourds pour les accompagner. Cette tendance est confirmée
par Hamid Benbrahim ElAndaloussi2, consultant mondialement reconnu
en matière d'aéronautique et à l'origine de
l'intérêt manifeste du Groupe Safran3, au Maroc.
ii) La maintenance : Un créneau porteur
Sur un autre registre, la stratégie de
développement du secteur touristique au Maroc dans le cadre de la
«vision 2010« porte sur l'acheminement de 10 millions de touristes
à l'horizon 2010. Dans ce dessein, le Maroc s'est orienté dans
une politique de libéralisation de son espace aérien. Cette
stratégie d'ouverture se confirme par l'entrée en vigueur de
l'accord d'Open Sky entre le Maroc et l'UE, donnant lieu à de nouvelles
perspectives notamment avec l'arrivée dans le ciel marocain des
compagnies low cost européennes telles que Ryanair ou Easy
Jet4.
Ceci doit engendrer de facto un fort besoin en maintenance
des compagnies nationales et internationales en sus d'une demande de plus en
plus importante de celles de l'Afrique subsaharienne.
Dans ce secteur éminemment technique et sensible qu'est
l'aéronautique, le Maroc a
su développer une tradition dans la
maintenance. Elle fait figure d'exemple pour le
continent. «Le centre
industriel de la RAM est un pôle d'excellence de très haut
1 FENNASSI, Bensalem. Crise d'AIRBUS :
Opportunité très favorable au Maroc, Le Matin
Supplément économie, 2007, no 13 180, p. 8
2 Selon cet expert, les problèmes que vit
Airbus sont plutôt des problèmes de redéfinition
stratégique. Les produits d'Airbus sont appréciés par le
marché. L'avionneur reste en substance, une référence
mondiale. En général un avion a besoin de 10 ans pour être
conçu, puis une durée de vie de 30 à 40 ans. «Donc,
nous sommes en présence d'une industrie de long terme. Pour pouvoir
durer, il est indispensable d'avoir une efficacité économique et
industrielle«, précise M. Benbrahim. L'avionneur américain
Boeing n'est plus qu'à 25% de taux de fabrication, le reste est
désormais fait à l'extérieur. Airbus, non sans retard,
suit aussi la tendance. De 75% actuellement, la société a pour
objectif de le ramener à 50%. «Le reste se ferait chez les
partenaires à des prix les plus bas possibles mais aussi avec un
transfert d'une partie de ses risques«, estime M. Benbrahim. FENNASSI,
Bensalem. Crise d'AIRBUS : Opportunité très favorable au
Maroc, Le Matin Supplément économie, 2007, no 13 180, p.
8.
3 Aircelle, Labinal, Teuchos, SMES sont des filiales
de ce groupe implantées au Maroc.
4 MINISTERE DU TOURISME MAROCAIN. Vision
2010 [en ligne],
http://www.tourisme.gov.ma
(consulté le 18.02.2007).
niveau«. Quant au deuxième centre de maintenance
de la place SMES1, il verrait sans doute son activité
accroître avec l'arrivée de ces nouvelles
compagnies2.
Ainsi, les centres de maintenance du Maroc se tournent
clairement vers le Sud et les pays africains, dépourvus de telles
infrastructures. Ils comptent également sur des commandes de leur maison
mère en sous-traitance mais aussi sur la venue de nouvelles compagnies
notamment les low cost3.