V. DISCUSSIONS
Le paludisme reste un fardeau dans diverses régions du
monde. Si les infections symptomatiques sont diagnostiquées et
traitées, le portage asymptomatique reste mal connu et constitue un
frein pour les stratégies d'élimination du paludisme. Aussi,
cette étude sur l'épidemiologie du paludisme et la virulence
parasitaire chez les enfants gabonais vivants à Lastoursville (milieu
Rural) est la première qui évalue d'une part la prévelance
de l'infection plasmodiale asymptomatique et symptomatiques et d'autre part le
polymorphisme génétique des gènes Pfmsp1 et Pfmsp2
dans cette localité.
La moyenne d'âge des enfants asymptomatiques plus
élevée que celle des enfants symptomatiques observée dans
cette étude pourrait s'expliquer par le fait que l'étude a
été réalisée au sein d'une zone
d'endémicité palustre, et l'âge est considéré
comme étant l'un des facteurs en corrélation avec la
prémunition dans les zones d'endémie palustre. En effet les
jeunes enfants sont plus vulnérables, mais les adultes et les jeunes
adolescents ayant acquis une forme d'immunité après plusieurs
expostion au parasite sont plus susceptibles d'avoir présenté des
infections asymptomatiques-'--[34]. Ils peuvent servir de réservoir de
transmission car l'immunité anti palustre acquise conduit à une
persistance de l'infection asymptomatique ou à des infections
symptomatiques faibles qui sont souvent moins prises en charge par rapport aux
infections aigues qui apparaissent chez des jeunes enfants [35] De plus, nos
résultats corroborent ceux d'études antérieures ayant
montrés que les enfants asymptomatiques sont souvent plus
âgés que les enfants symptomatiques [35] -'--[34]
Une prévalence d'infection plasmodiale
élevée a été observée dans l'ensemble de la
population, cette observation est comparable à celles déjà
décrites dans notre région d'étude
- [36]
[37]. Ceci pourrait être dû au niveau socio économique bas
et de connaissance sur le paludisme des personnes vivant en zone rurale
conduisant à une utilisation moins effective des moyens de
prévention, lesquels ont un impact significatif sur la circulation de
Plasmodium et la réduction de la prévalence de
l'infection plasmodiale. De plus La proportion d'enfants fébriles
portant une infection à plasmodiums falciparum. était
significativement plus élevée que celle des enfants non
fébriles. Cette observation Pourrait également s'expliquer par
l'acquisition d'une prémunition avec l'âge chez les jeunes
adolescents et les adultes vivants en zone endémique contrairement aux
enfants de moins de cinq ans qui sont plus susceptibles de développer un
paludisme [38]. Ces résultats diffèrent de ceux obtenus dans
une étude réalisées au Cameroun en milieu rural qui
énonce une prévalence significativement élevée chez
les enfants asymptomatiques (30,7%) comparés aux symptomatiques (17,8%),
aussi cela pouvait être du à un faible échantillon des
asymptomatiques par rapport aux enfants symptomatiques pour notre étude.
[39]. Les prévalences des infections asymptomatiques enregistrées
dans cette localité restent néanmoins non négligeables,
car les personnes atteintes d'infections plasmodiales asymptomatiques sont des
réservoirs silencieux du parasite et posent un sérieux
défi aux efforts de lutte contre la maladie en raison de leur
capacité à maintenir la transmission au sein de la population
à un faible niveau.
L'analyse du profil génétique de Plasmodium
falciparum., obtenu après PCR, en fonction du type d'infection,
peut fournir des informations utiles sur les caractéristiques de
certains clones parasitaires spécifiques afin de concevoir des
stratégies d'intervention ciblant les facteurs de virulence [40].
De façon globale, les résultats de notre
étude ont montré que les trois familles alléliques K1,
Mad20 et Ro33 du gène Pfmsp-1 et les deux familles
alléliques 3D7 et F7 du gène Pfmsp-2 étaient
présentes dans les échantillons analysés. La famille
allélique 3D7 étant la plus fréquemment rencontrée.
Des études réalisées au Gabon, au Burkina Faso et en
Côte d'Ivoire ont décrit une fréquence élevée
des familles alléliques K1 et 3D7[41] [42]. Aussi une étude
menée à Libreville a montré que la diversité
allélique de la famille Mad20 augmente avec la
sévérité de la maladie
[43] La famille allélique RO33
était la plus fréquente dans les isolats d'enfants symptomatiques
par rapport aux asymptomatiques,. Cette famille allélique pourrait jouer
un rôle important dans la survenue du paludisme, du moins au Gabon. Ceci
est différent des données décrites dans la
littérature car les familles allélique K1 et 3D7 ont souvent
été associées à l'infection symptomatique [44] que
RO33. La fréquence des familles alléliques F7 et 3D7
n'était pas différente entre symptomatiques et asymptomatiques,
ce qui prouve qu'il n'existerait pas des variant spécifiques de
Pfmsp2 qui pourraient être associés au statut clinique. Ces
résultats sont appuyés par des études qui ont
montré qu'il n'y avait pas d'association entre les familles
alléliques F7 ou 3D7 et le type d'infection [45] . A l'inverse, une
autre étude a rapporté une fréquence de la famille
'allélique F7 deux fois plus élevée dans les isolats
symptomatiques par rapport aux asymptomatiques [46]. Cependant, d'autres
études sont nécessaires pour clarifier l'interprétation de
ces résultats.
Un polymorphisme génétique élevé
à modéré au sein des familles alléliques des
gènes Pfmsp1et 2 a été observé dans les
isolats de Lastoursville (23 allèles) pour Pfmsp-1 et 8
allèles pour Pfmsp-2). Nos résultats sont
inférieurs à ceux décrits à Libreville (30
allèles), à Dielmo au Sénégal (33 allèles)
en 1995 et au Burkina Faso en 2009 (41 allèles) mais identiques à
ceux de Bakoumba près Franceville (25 allèles) en 1999 [47] [12]
--[48]. Cette diversité allélique pourrait s'expliquée par
le fait que la diversité génétique de P. falciparum
varie aussi bien d'une région à une autre et au sein d'une
même population [47]. Certains génotypes étaient communs
entre symptomatiques et asymptomatiques, parmi ceux-ci l'allèle F7_200
était en proportion plus importante dans les isolats symptomatiques,
contrairement aux autres allèles qui n'ont présenté aucune
différence significative entre les deux groupes. Cela suggère
que cet allèle pourrait avoir un lien avec la survenue de
symptômes et donc la virulence. Par ailleurs, certains génotypes
F7, différents ont été uniquement retrouvés dans
les isolats asymptomatiques et d'autres génotypes différents de
K1 et Mad20 ont été mis en évidence dans les isolats
symptomatiques uniquement. Ces résultats confortent l'idée selon
laquelle, certains clones parasitaires pourraient être responsables de
l'état clinique d'un individu. Cependant, le lien entre l'état
clinique et un génotype quelconque de P. falciparum reste un
sujet à controverse. Car, de nombreuses études ont montré
que la présence d'épisodes palustres subséquents pourrait
être due à de nouveaux parasites infectieux
[49].
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