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Le service public de l'electricité en droit camerounais


par Philippe Gérald MBANG EVEZO'O
Université d'Ebolowa - Master Recherche en droit public 2023
  

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B- LA PBOBLEMATIQUE DE L'ETUDE

Toute activité scientifique se justifie par la recherche de la révélation du "vrai51"'. Cette recherche correspond aux questions du "pourquoi ?" et du "comment ?". La première question renvoie à la formulation de la problématique (1) et la seconde correspond à la méthode (2).

1- Reformulation de la problématique

D'après Gaston BACHELARD, « Il faut savoir poser des problèmes. Et quoi qu'on dise dans la vie scientifique, les problèmes ne se posent pas d'eux-mêmes. C'est précisément ce sens du problème qui donne la marque du véritable esprit scientifique52 ». Il ressort clairement de cette citation que le problème est fondamental dans l'analyse d'un sujet, et qu'il faut être capable de bien le formuler. A cette capacité, il faut ajouter le relativisme qui est une preuve de la scientificité d'un sujet. Il le dira d'ailleurs plus

51 M. KAMTO, « L'utilité des savoirs scientifiques », op.cit., p.1.

52 G. BACHELARD, La formation de l'esprit scientifique, 5 eme éd, J. VRIN, Paris, 1934 p.257

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tard : « comme on le sait, ce n'est pas à propos de la figure du monde, comme astronomie générale, que la relativité a pris son essor. Elle est née d'une réflexion sur les concepts initiaux, d'une mise en doute des idées évidentes, d'un dédoublement fonctionnel des idées simples53 »

Avant de poser une quelconque question, il est d'une impériale nécessité de préciser que le service public de l'électricité soulève un certain nombre de problèmes dont l'étude reste une aubaine dans la mesure ou le doit public tel qu'il a été conçu autrefois ne présente plus les mêmes caractéristiques à ce jour. Il est progressivement transformé au contact d'un certain nombre de facteurs parmi lesquels la concurrence et la régulation économique. Ainsi, au professeur Marie-Anne Frison-roche de penser que « le service public industriel et commercial n'est jamais qu'une déclinaison du concept général de service public et, malgré son régime teinté de droit privé, se démarque encore des relations entre particulier, marquées par l'intérêt prive54 ». En effet, le débat théorique sur la pertinence d'ouvrir ou non les industries de réseaux à la concurrence a largement tourné en faveur des défenseurs d'une libéralisation des services publics industriel et commercial dans la plupart des secteurs concernés. De ce qui précède, l'étude sera faite autour de la question de savoir : qu'es ce qui caractérise le service public de l'électricité en droit camerounais ?

Cette question nécessite une consultation des dispositions normatives internes afin de dégager une réponse à la problématique.

2- La réponse à le problématique

Toute question scientifique nécessite une réponse par l'hypothèse de la recherche (a) dans le strict respect d'une méthode donnée (b).

53 G. BACHELARD, Le nouvel esprit scientifique, Paris, PUF, 1971, P. 47.

54 Marie-Anne Frison-roche, libre propos sur le service public marchand dans la perspective de la régulation des réseaux d'infrastructure essentielle, DJA 10/95, Ed. Francis Lefebvre

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L'hypothèse de recherche

En conformité avec l'idée selon laquelle la science du droit appartient au groupe des sciences empiriques ayant pour fonction de décrire son objet par des positions variées55, notre étude ne saurait s'écarter d'une telle règle générale. C'est pourquoi notre travail s'articule autour d'une hypothèse. Celle-ci se définit comme l'idée directrice formulée en des termes tels que la recherche puisse fournir une réponse à la question posée. Il s'agit donc d'une « réponse anticipée que l'on formule à la suite de la question spécifique de recherche56 » . A cet effet, elle a vocation à présenter en substance de manière succincte, les grandes lignes et articulations devant être développées57. Chaque articulation constitue un élément de la réponse et contribue à la résolution de la difficulté connue dans la problématique58 .

Nous pouvons donc librement dire que le service public de l'électricité se caractérise par son ouverture à la concurrence.

La réponse ainsi formulée exige une justification argumentée. Cette justification doit se faire au moyen d'une méthode donnée afin d'atteindre le résultat.

b- La méthode de recherche

Toute étude scientifique se construit autour d'une méthode. Elle est considérée comme « l'ensemble des opérations intellectuelles par lesquelles une discipline cherche à atteindre les vérités qu'elle poursuit, les démontre, et les vérifie59 » . Dérivant du mot grec "méthodos60"' , l'étymologie du mot "méthode" est composée de "meta" (vers) et de "hodos" (chemin). A cet effet, la méthode est le chemin qui mène vers un résultat.

55 M. TROPER, Pour une théorie juridique de l'Etat, P.U.F., 1994, p.40.

56 G. MACE, F. PETRY, Guide de l'élaboration d'un projet de recherche en sciences sociales, P.U.L., Laval, 2000, p.24.

57 G. T. FOUMENA, Le juge administratif et la preuve : contribution à l'étude de la construction jurisprudentielle du droit de la preuve au Cameroun, Thèse de Doctorat PhD en Droit Public, 27 juin 2015, Université de Yaoundé 2, p.56.

58 Bid

59 M. GRAWITZ, Méthodologie des sciences sociales, 11 e éd., Dalloz, Paris, 2001, p.351

60 A. DAUZAT, J. DUBOIS et H. MITERAND, Nouveau dictionnaire étymologique et historique de la langue française, 5ème éd, Paris, Librairie-Larousse, 1971, p.461.

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Dans le cadre de cette étude, il est question de valider l'hypothèse de la recherche retenue au moyen de la méthode juridique, et du raisonnement dialectique.

Une étude juridique se soumet aux exigences d'une méthode applicable au fond du travail. Les sciences juridiques ont pour objet le droit tel qu'il est et non tel qu'il devrait être61. Cet objet n'est rien d'autre que l'affirmation du positivisme juridique comme méthode de fond. Il est donc question pour nous de ressortir les explications mais aussi les applications dans le cadre de notre étude.

Sous l'axe de l'explication, le positivisme s'appréhende sous trois angles. D'abord, il désigne une idéologie en ce sens qu'il est « une certaine prise de position en face d'une réalité donnée62 » Ensuite, il désigne l'analyse du droit comme une théorie. Il est à cet effet perçu comme « la manière d'en donner une explication globale63 » . Enfin, le positivisme juridique renvoie à une méthode64. A la lecture de ces trois définitions, la première sera exclue de notre étude en raison du parti-pris caché derrière le jus naturalisme65. Or, la neutralité axiologique commande une analyse objective de l'état de droit. D'où le recours à l'argumentaire juridique.

Sous l'axe de l'application, le positivisme juridique s'observe sous deux angles à savoir la dogmatique et la casuistique. La dogmatique ou l'exégèse des textes est une méthode née dans la Rome Antique. Elle fut fondée par les glosateurs, et consiste à l'interprétation et l'analyse du droit positif.

Tout compte fait, Plusieurs méthodes s'offrent à nous pour parvenir à nos objectifs. Il s'agit de la méthode juridique dans ces deux composantes que sont l'exégèse ou dogmatique et la casuistique. À côté de ces méthodes, la méthode comparative s'impose ici d'elle-même. Il faut dire en effet, que le juriste africain semble se situer au carrefour de plusieurs mondes, de fait il a une vocation naturelle au droit comparé. En réalité, la science appliquée dans les États africains porte en elle-même le germe de la

61 M. TROPER, C. GRZEGORCZYK et F. MICHAUT, Le positivisme juridique, Paris, LGDJ, Coll. "La pensée juridique moderne". 1993, p.244.

62 N. NOBBIO, Essais de théorie du droit, Paris, LGDJ- Bruylant, Coll. "La pensée juridique", 1998, p.24.

63 Ibid.

64 N. NOBBIO, op.cit. p. 24.

65 6 Le jus naturalisme est un courant de la science juridique qui commande l'expression en jugement des valeurs sur une réalité juridique donnée

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comparaison. Ainsi toute réflexion portant sur le service public de l'électricité, se résout en un incessant pèlerinage de l'esprit entre la réalité observable localement et le répertoire d'où a été tiré telle notion ou tel concept66. Une étude sur la spécificité du service public de l'électricité au Cameroun ne fait donc pas exception. Il est clair donc qu'un « zeste de droit comparé 67 » soit devenu « indispensable dans toute recherche.

Pour ne pas fragiliser ces méthodes et leur donner par là même la possibilité de produire leurs pleins effets, nous comptons les soutenir par la technique documentaire. Cette technique permet au chercheur de prendre connaissance de tout ce qui a été écrit sur le sujet qu'il a choisi. Il s'agira ainsi de consulter librement les ouvrages, les périodiques, les articles, les cours et voire même les sites internet. Tant il est vrai que de nos jours, une recherche quelle qu'elle soit, ne peut valablement se faire sans l'apport de l'internet. La recherche s'inscrira aussi dans une perspective interdisciplinaire très stimulante pour une théorie des règles juridiques68, il faut dire que l'analyse du droit dans l'action économique ne peut s'accommoder d'une analyse dans un cadre strict. Ainsi pourrons-nous recourir au besoin à la théorie économique. À ce propos, Max Weber, estimait déjà que la théorie économique, se trouve sur le plan de l'évènement réel et non sur celui de la norme idéale applicables, puisqu'elle se donne pour objectif de saisir de façon concrètes, les rapports sociaux69. L'analyse économique du droit revêt alors ici un fort intérêt70. Elle applique dès lors des concepts issus de la science économique ou développés par elle à des phénomènes juridiques. Dès lors notre travail entend adopter un plan binaire traditionnel dans la recherche juridique.

66 V. VANDERLINDEN (J.), Les systèmes juridiques africains, Paris, PUF, coll. « Que sais-je ? », 1983, p.6.

67 PFERSMANN (O.), « Le droit comparé comme interprétation et comme théorie du droit », RIDC, 2001, n°2, p.275.

68 JEAMMAUD (A.), « Conclusion : L'interdisciplinarité, épreuve et stimulant pour une théorie des règles juridiques », in KIRAT (T.) et SERVERIN (E.) (dir.), Le droit dans l'action économique, Paris, CNRS éditions, 2000, pp.219-231

69 3 WEBER (M.), Économie et Société, t.1 Les catégories de la sociologie, trad. DE DAMPIERRE (E.), Paris, Plon, 1971, pp.321 et Ss

70 FRISON-ROCHE (M.-A.), « L'intérêt pour le système juridique de l'analyse économique du droit », LPA, n°99, 2005, pp.15-22

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Il sera question du service public de l'électricité que l'on range dans la catégorie des services publics en réseaux71 s'est vu influencé par les exigences du marché72. En fait il est descendu dans un système dans lequel s'échangent librement des biens et des services ; et grâce à la pression concurrentielle duquel s'ajustent l'offre et la demande

pour l'établissement du prix de marchés, prône le libéralisme économique, qui induit alors une abstention de l'État dans l'économie pour mieux satisfaire les besoins de la population. Il se caractérise donc par son ouverture à la concurrence ou libération après une longue évolution sous monopole.

71 Moise Arnaud NNA AMVENE, la régulation des services publics de réseaux en droit camerounais, thèse de doctorat, Université de ngaoundere,2020, pp 13-14

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LES MODALITES D'OUVERTURE A LA CONCURRENCE DU SERVICE PUBLIC DE L'ELECTRICITE

PREMIERE PARTIE :

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De prime abord, la concurrence est, à l'origine, une notion plus économique que juridique. Elle a été définie comme une situation de compétition économique qui se caractérise par l'offre, par plusieurs entreprises distinctes et rivales, de produits ou de services qui tendent à satisfaire des besoins équivalents, avec pour les entreprises, une chance réciproque de gagner ou de perdre les faveurs de la clientèle73 . La notion de concurrence traduit donc un rapport entre des entreprises commerciales qui se disputent la clientèle, chacune visant à en attirer et conserver le plus grand nombre74.

Corollaire du principe de la liberté du commerce75, la libre concurrence laisse à chacun des acteurs économiques la possibilité d'accéder au marché à l'effet de produire et vendre des biens et services sous réserve du respect des conditions légales. Son importance dans le fonctionnement harmonieux du marché dans une économie libérale a justifié l'adoption d'un cadre législatif au niveau national communautaire et régional (chapitre 1). Ce cadre légal qui traduit la volonté du législateur camerounais d'introduire l'exercice de la concurrence dans le secteur de l'électricité implique que des acteurs privés et publics puissent désormais participer aux activités du service public de l'électricité. Il procède alors à une séparation des métiers, instituant ainsi et pour chaque métier, un régime d'autorisation (chapitre 2)

73 Professeur Catherine-Thérèse BARREAU, Concurrence et Consommation, Cours magistral

74 KALIEU ELONGO (Y. R.), Droit Privé économique (Concurrence, Consommation), Cours magistral, Faculté de droit et de sciences économiques de l'Université Omar Bongo, Libreville, 2013

75 3 La loi du 10 août 1990 a été modifiée par la loi n° 2015/018 du 21 décembre 2015 régissant l'activité commerciale au Cameroun

LA JUSTIFICATION D'UN CADRE JURIDIQUE DE L'EXERCICE DE LA CONCURRENCE EN DROIT CAMEROUNAIS

CHAPITRE 1

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Le choix affirmé pour nous d'étudier la question de la justification d'un cadre légal de l'exercice de la concurrence au Cameroun peut paraitre inapproprié pour d'aucuns dans le cadre de cette partie de notre modeste travail. Il convient alors d'en préciser le bien fondé de notre choix. En effet, "Ubi societas ibi jus"76. Cette maxime latine rappelle que le droit est, par essence, une discipline contextualisée. Considérant que tout phénomène juridique se situe dans l'espace, l'étude de la règle de droit doit prendre en compte cette dimension spatiale. Ainsi, partant du fait que la libération économique implique l'ouverture à la concurrence , on serait tenté d'affirmer selon Lionel Zevounou77 que l'exercice de la concurrence est un droit dont la consécration mérite de s'adapter à l'environnement. Ainsi justifie t-on l'existence d'un cadre législatif et règlementaire au niveau national (section1) mais aussi, prise en compte des normes communautaires et internationales (section 2)

SECTION 1 : LES INSTRUMENTS NORMATIFS NATIONAUX DE
L'EXERCICE DE LA CONCURRENCE

Les instruments normatifs désignent l'ensemble des textes juridiques adopté par l'Etat du Cameroun sur lesquels reposent l'exercice de la concurrence. De de fait, A côté de ces textes qui peuvent être considérés comme le cadre législatif phare78 de l'encadrement de la concurrence au Cameroun (paragraphe 1), il existe des règlementations spéciales qui entretiennent des liens plus ou moins étroits avec les problématiques de concurrence (paragraphe 2).

76 Gérard CORNU, vocabulaire juridique,12eme Ed. Paris, PUF

77 Lionel Zevounou, le concept de concurrence en droit, thèse de doctorat, Université paris ouest Nanterre la défense, 2010

78 François Modeste, opérationnalisation de l'observatoire de la concurrence et de la compétitivité du groupement inter-patronal du Cameroun, Livrable N° 1 : développement d'un cadre opérationnel de collecte et de traitement des dénonciations des cas de concurrence déloyale

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Paragraphe 1 : les lois régissant la concurrence, comme cadre législatif phare à
l'encadrement de l'exercice de la concurrence au Cameroun

Parmi les sources du droit d`un Etat, on compte les sources élaborées par cet Etat79. En fait il s`agit même de sources de première catégorie c`est-à-dire celles qui directement sont applicables du fait d`un ensemble de contingences propres à cet Etat80. Car même si l`on parle désormais d`un droit global, il apparaît que tout Etat dispose tout d`abord de son propre droit. L'exercice de la concurrence en droit camerounais s`adosse sur le droit constitutionnel et plus précisément sur le texte constitutionnel (A) et sur les normes infra constitutionnelles (B)

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