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Le service public de l'electricité en droit camerounais


par Philippe Gérald MBANG EVEZO'O
Université d'Ebolowa - Master Recherche en droit public 2023
  

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CONCLUSION CHAPITRE 1

Sans être exhaustive, cette étude sur L'organisation et le fonctionnement des organismes administratifs en charge de la régulation du service public de l'électricité de régulation en droit Camerounais peut permettre d`affirmer que le bilan de ces organismes est mitigé, malgré la volonté politique des pouvoirs publics dont témoigne la création même de ces structures. On peut soutenir, par ailleurs, qu`elles n`ont pas pris leur envol, de nombreux écueils entravant l`exercice de leurs missions. Toutes choses étant égales par ailleurs, l`avenir de la réforme engagée par l`Etat camerounais réside dans la résolution de ces défis, en vue de consolider les acquis pour aspirer à un avenir porteur d`espoir. Le même constat a également lieu d'être fait au regard de leur moyen de régulations ? telle est la question que nous allons tenter de répondre par la suite.

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CHAPITRE 2 :

LA COMPETENCE DES ORGANISMES DE REGULATION DU SERVICE
PUBLIC DE L'ELECTRICITE

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L`engagement à partir des années 1990 des Etats africains notamment francophones dans un processus de démocratisation de la vie politique, a permis la création de conditions propices à la conduite des affaires publiques et au développement des institutions républicaines272. Il en est ainsi de l`existence d`un cadre juridique et réglementaire, fondement indispensable d`un État de droit démocratique et moderne. La modernisation de l`administration est un pilier de la bonne gouvernance, donc un facteur déterminant de la mise en oeuvre réussie des programmes d`ajustements structurels.

Les besoins de l`État et des services publics en général, sont de plus croissants. Dans les secteurs marchands, les reformes se sont imposées notamment aux Etats africains comme une condition pour bénéficier de l`accompagnement des institutions de Bretton Woods et un gage d`une meilleure efficacité dans les réponses à apporter aux défis économiques et attentes des populations. Les réformes réglementaires induites ont consacré la libéralisation, la privation et la mise en oeuvre de la régulation.

De nouvelles structures autonomes avec d`importantes missions ont donc ainsi vu le jour pour une prise en charge harmonieuse de la gestion ou de la régulation des secteurs concernés. Il convient cependant de noter que tout comme sur les plans de l`organisation administrative, judiciaire et de la réglementation en général, dans les pays francophones d`Afrique, malgré les contextes et réalités différents, l`expérience française a largement inspiré la mise en place des autorités administratives indépendantes.

Les autorités administratives sont d`origine constitutionnelle ou législatives avec pour mission de réguler certains secteurs d`activités stratégiques. Elles ont la particularité d`être en même temps des autorités administratives et d`être indépendantes. Cette spécificité liée à leur nature a des incidences sur leur domaine de compétence. Elles jouissent en réalité d`une pluralité de compétences à la fois contentieuses (Section 1) et non contentieuses (Section 2)

272 oir, DECOOPMAN (N.), « A propos des autorités administratives indépendantes et de la déréglementation », CLAM (J.), MARTIN (G.) (dir.), Les transformation de la régulation juridique, LGDJ, « Droit et société, Recherches et travaux », vol. 5, 1998, p.249

SECTION 1 : LA COMPETENCE CONTENTIEUSE DES ORGANISMES DE REGULATION DU SERVICE PUBLIC DE L'ELECTRICTE

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A l`heure de la maturation du marché unique273, il ne fait que peu de doutes que l`attribution de pouvoirs importants aux autorités de régulation contribue à un accroissement de leur efficacité274. Ces pouvoirs sont nombreux et il est possible d`en distinguer cinq sortes. Il s`agit d`un pouvoir consultatif qui fait de l`autorité de régulation le spécialiste, l`expert du secteur, d`un pouvoir réglementaire, qui permet au régulateur de prescrire des règles générales à destination des opérateurs régulés, d`un pouvoir de décisions individuelles qui rend possible l`attribution d`agréments, de visas et de licences afin d`encadrer les acteurs et les produits présents sur les marchés, d`un pouvoir de surveillance qui autorise l`autorité de régulation à enquêter et à mener des investigations, et d`un pouvoir contentieux275, lequel permet de contraindre un acteur qui contrevient aux règles fixées par le régulateur lui-même ou par la loi

A l`échelle nationale, il est désormais admis que les autorités de régulation cumulent toutes ces attributions, à tel point que certains auteurs s`interrogent sur l`existence du quatrième pouvoir à côté des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire. Les pouvoir exercés se consolident un peu plus à chacune des interventions du législateur, et même si des doutes subsistent quant à l`exercice de certains d`entre eux, un socle commun de pouvoirs s`est constitué. C`est le cas notamment des compétences contentieuses des organismes de régulation. Il s`agira pour nous de statuer d`un côté sur l`étendue de ces compétences (Paragraphe 1) et sur l`étendue des sanctions (Paragraphe 2)

273 FRANCHINI (C.), « Les notions d`administration indirecte et de co-administration », in AUBY (J.B.) et DUTHEIL DE LA ROCHERE (J.) (dir.), Droit administratif européen, Bruylant, LGDJ, 2008, p. 249

274 EPRON (Q.), « Le statut des autorités de régulation et la séparation des pouvoirs », RFDA 2011, p. 1007. 838 Pour une définition de la fonction contentieuse dans le domaine de la régulation, voir : QUILICHINI (P.), « Réguler n`est pas juger, Réflexions sur la nature du pouvoir de sanction des autorités de régulation économique », AJDA, 2004 p. 1060

275 Pour une définition de la fonction contentieuse dans le domaine de la régulation, voir : QUILICHINI (P.), « Réguler n`est pas juger, Réflexions sur la nature du pouvoir de sanction des autorités de régulation économique », AJDA, 2004 p. 1060 : solution juridique d`une situation contentieuse, comme « l`activité qui consiste à dire le droit, en mettant fin à un litige »

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Paragraphe 1 : l'étendu de la compétence des organismes

L`objectif premier des organismes de régulation est de prévenir et de réprimer les pratiques qui peuvent avoir un impact considérable sur l`économie. A cet effet, ils oeuvrent au quotidien pour garantir le bon fonctionnement des activités et protéger ainsi les consommateurs comme les entreprises. Dans le cadre de l`exercice de leurs compétences en matière contentieuse, les autorités de régulation règlent conformément au droit en vigueur des différends juridiques qui sont soumis par les différents acteurs. Il s`agit en réalité des désaccords sur un point de droit ou de fait, une opposition de thèse juridique ou d`intérêts. Cette action se fait par des mécanismes de résolution extrajudiciaires des litiges (A), comme la médiation, l`arbitrage et le règlement des différends. Outre cet aspect, les autorités de régulation disposent aussi de véritables pouvoirs de sanction qui leurs sont reconnus (B).

A- La résolution extrajudiciaire des différends

On distingue traditionnellement trois mécanismes de résolution des litiges à savoir le règlement des différends (1), la médiation et l`arbitrage (2). Ils ont pour point commun de constituer des mécanismes subsidiaires de résolution des litiges et de s`appliquer à un même objet : un litige né d`un désaccord de volonté entre deux sujets de droit aux prétentions opposées. Les trois procédures diffèrent toutefois sur plusieurs points qu`il faut préciser pour lever toute ambigüité.

1- Le règlement des différends

L`attribution d`un pouvoir de règlement des différends constitue l`un des aspects les plus novateurs des autorités de régulation au Cameroun comparativement à l`administration classique voire aux autorités administratives indépendantes276. Il correspond à un glissement vers la fonction contentieuse des organes de régulation, les rapprochant de l`office du juge, tout en conservant un impératif de rapidité et

276 Voir, LE BIHAN-GRAF (C.) et CREUX (E.), « Le règlement des différends, instrument moteur de la régulation sectorielle », Energie - Environnement - Infrastructures n° 6, Juin 2016, étude 13.

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d`efficacité. Cela signifie qu`une telle procédure aboutit à une décision contraignante prise par le régulateur, et qui s`impose aux parties. Il ne s`agit donc pas d`un règlement amiable du différend.

En principe, le régulateur est amené à arbitrer le conflit et à faire respecter la loi à la demande de l`une des deux parties au litige qui se sent lésée. C'est l'esprit qui se degage dans la lecture de l'article 4 du decret n°2013/203 portant organisation et fonctionnement de l'ARSEL277. La spécificité du règlement de différends réside dans le champ de compétences de l`organe de régulation qui est strictement encadré par la loi. Pour cette raison, l`agence ne constitue jamais un « gendarme multifonctionnel des litiges nés sur ces marchés »278, et le juge de droit commun reste compétent pour les autres types de litiges279. Considérée comme une procédure originale adaptée aux particularités de la régulation280, la procédure de règlement des différends s`est essentiellement développée en filigrane de l`ouverture à la concurrence des services publics en réseaux. Tous les secteurs d`activité sont ainsi concernés conformément aux dispositions des différents textes qui régissent la régulation des marchés au Cameroun précédemment cités.

Ces différents textes ont l`avantage de préciser quelles conditions doivent être remplies pour recourir à la procédure de règlement des différends. Le litige doit intervenir entre le « gestionnaire » du réseau ou de l`infrastructure et un « utilisateur » du réseau ou de l`infrastructure. Le gestionnaire peut aussi bien être chargé de la gestion d`un réseau de transport, de distribution, que d`installations de stockage et d`infrastructures. Dans tous les cas, le litige doit naitre du souhait d`un utilisateur de bénéficier de l`accès à cette infrastructure, laquelle lui est refusée aux conditions souhaitées. On le voit, le différend

277 Selon l'alinéa 2 de cet article l'Agence peut être saisi comme instance d'arbitrage par tout opérateur, aux fins de règlement des différends entre operateurs

278 GUENAIRE (M.), « L`expérience du règlement des différends devant la Commission de régulation de l`énergie », in FRISON-ROCHE (Anne Marie.) (dir.), Les risques de régulation, op.cit, p. 191.

279 Voir, ROLIN (E.), « Les règlements de différends devant l`autorité de régulation des télécommunications », in FRISON-ROCHE (Anne Marie.) (dir.), Les régulations économiques, légitimité et efficacité, Droit et économie de la régulation, Vol.1, Presses de Sciences Po et Dalloz, Coll. Thèmes et commentaires, 2004, p. 153

280 RISON-ROCHE (Anne Marie.), « Régulation et règlement des différends : présentation du terme et synthèse du 10e forum de la régulation », LPA, n° 212, 22 octobre 2004, p. 6.

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a donc pour objet l`accès aux infrastructures, lequel constitue ici le principal « critère de compétence » 281 de l`Agence.

Dans les secteurs des services publics en réseaux, le recours à la procédure de règlement des différends est fortement lié à l`ouverture à la concurrence de ces secteurs. Il est intéressant de noter que le recours à une telle procédure a eu pour principal objectif de ne pas retarder l`ouverture à la concurrence par la multiplication de recours devant les tribunaux de la part des opérateurs historiques qui souhaitaient freiner l`entrée de nouveaux opérateurs sur les marchés, lesquels avaient besoin d`accéder aux réseaux et aux infrastructures. L`essentiel des recours ont en effet été formés par des opérateurs concurrents des anciens monopoles qui ne pouvaient pas accéder aux réseaux dans de bonnes conditions844. Cette spécificité explique pourquoi la décision de l`agence de régulation est contraignante et qu`une telle procédure n`existe pas à l`échelle nationale dans les secteurs financiers, puisqu`il n`existe plus en toile de fond un objectif similaire.

2- La médiation et l'arbitrage

Les procédures de médiation et d`arbitrage sont radicalement différentes de celle de règlement des différends. En effet, le recours à de telles procédures s`effectue sur le volontariat. L`autorité de régulation n`est plus saisie par l`une des deux parties mais d`un commun accord. Par ailleurs, le champ de compétences en la matière est différent de celui du règlement des différends, l`agence de régulation étant la plus souvent compétente pour traiter des litiges « entrant dans son champ d'intervention », c'est le cas avec l'ARSEL concernant la médiation. Cela signifie que e champ d`intervention de l`autorité est particulièrement élargi. Une distinction doit toutefois être opérée entre la médiation et l`arbitrage.

En effet, dans le cadre de la médiation, il ne s`agit pas d`une fonction contentieuse détenue par l`organe de régulation, puisque la décision finale ne revient pas au régulateur qui ne peut contraindre. Il s`agit donc d`un règlement amiable des différends. La médiation suppose donc que les pouvoirs du régulateur sont restreints. Au mieux,

281 PERROUD (T.), La fonction contentieuse des autorités de régulation en France et au Royaume-Uni, op.cit., p.

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l`autorité propose des solutions aux deux parties afin de trouver un accord282. En revanche, dans le cadre de l`arbitrage, les deux parties s`engagent librement à accepter le « verdict » de l`arbitre. L`autorité de régulation conserve ici le pouvoir de prendre la décision qui s`imposera en définitive aux deux parties.

Ces procédures de médiation et d`arbitrage restent essentiellement l`apanage des régulateurs du secteur financier. En revanche, on peut regretter que toutes les agences de régulation des secteurs des services publics ne permettent pas de recourir à des procédures de médiation. La mise à disposition de l`expertise juridique et économique de l`autorité permettrait sans doute de trouver un compromis sous l`oeil attentif du régulateur et d`éviter le recours au juge. Il est important de noter par ailleurs que toutes ces procédures menées dans le cadre des mécanismes de résolution des litiges doivent garantir, en application de sources internes et externes, le respect de certains impératifs propres aux procédures juridictionnelles, comme l`égalité des armes, le principe du contradictoire ou l`obligation de motivation de la décision. Ces obligations posent toutefois une difficulté en la matière puisque le règlement des litiges est une compétence qui doit, selon le souhait du législateur être exercée avec célérité. Les délais prévus sont donc courts, ce qui rend le respect de ces garanties parfois difficile

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