C. L'exploitation abusive de l'état de
dépendance économique
Est interdite l'exploitation abusive de l'état de
dépendance économique. Une entreprise est en état de
dépendance économique lorsqu'elle ne peut s'approvisionner, en
raison des caractéristiques des liens commerciaux, en produits
substituables dans les conditions normales d'acquisition auprès d'un
autre fournisseur.
Il est également en état de dépendance
économique, un fournisseur qui ne peut trouver un distributeur, en
raison des caractéristiques des liens commerciaux, dans les conditions
équivalentes38.
§ 2 : les pratiques de concurrence
déloyale
Le législateur congolais de 1950, définit la
concurrence déloyale comme tout acte contraire aux usages honnêtes
en matière commerciale ou industrielle, un commerçant, un
producteur, un industriel, ou un artisan porte au crédit d'un concurrent
ou lui enlève sa clientèle ou d'une manière
générale porte atteinte à sa capacité de
concurrence39. Il ressort de l'esprit du législateur que tout
acte contraire à la loi constitue une concurrence. Les actes
déloyaux en matière de concurrence sont prévus de part et
d'autre se complètent les uns les autres au regard de la classification
faite par l'article 2 de l'ordonnance législative relative à la
concurrence déloyale de 1950, ainsi que celle faite par la doctrine qui
par ailleurs est plus riche car il fait ressortir un débat.
Aux termes de cet article : « Sont
considérés comme actes contraires aux usages honnêtes en
matière commerciale ou industrielle ; le fait de :
? Créer la confusion ou tenter de créer la
confusion entre sa personne, son établissement, ou ses produits et la
personne, l'Etablissement ou les produits du concurrent ; Répandre des
imputations fausses sur la personne, l'entreprise, les marchandises, ou le
personnel d'un concurrent ;
? Donner les indications inexactes sur la personnalité
commerciale, sur son industrie, ou ses dessins, marques, brevets,
références, distinctions, sur la nature
37 VARIA et Al., in Revue internationale de droit
économique, Ed, Deboeck supérieur, 2020, P.176.
38 Art.33 de la loi Organique du 09 juillet 2018
39 Art 1 de l'ordonnance législative n°41/63 du
24/février 1950, portant concurrence déloyale, disponible sur
www.leganet.cd
40 Art 2 de l'ordonnance de 1950 relative
à la concurrence déloyale, disponible sur www.leganet.cd
41 LUKOMBE NGHENDA, Droit commercial. Faillites,
concordat et banqueroute, Kinshasa, PUDFC, 2001, p. 88.
16
de ses produits ou marchandises, sur les conditions de leur
fabrication, leur origine, leur provenance, leur qualité ;
? Apposer sur des produits naturels ou fabriqués
détenus ou transportés en vue de la vente ou mis en vente ou sur
les emballages de ces produits, une marque de fabrique ou de commerce, un nom,
un signe ou une indication quelconque de nature à faire croire que les
produits ont une origine ou une provenance autre que leur véritable
origine ou provenance ;
? Faire croire à une origine ou une provenance inexacte
desdits produits, soit par addition, retranchement ou altération
quelconque d'une marque, d'une dénomination ou d'une étiquette,
soit par des annexes écrits ou affiches, soit par la production des
factures des certificats d'origine ou de provenance inexacts, soit par tout
autre moyen ;
? Faire un usage non autorisé de modèles,
dessins, échantillons, combinaisons techniques, formules d'un
concurrent40, et, en général de toutes indications de
tous documents confiés en vue d'un travail, d'une étude, ou d'un
devis ;
? Faire un emploi non autorisé du matériel d'un
concurrent, de l'emballage, des récipients de ses produits, même
sans l'intention de s'en attribuer la propriété ni de
créer une confusion entre les personnes, les établissements, ou
les produits ; Utiliser des dénominations, marques, emblèmes
créant une confusion avec des services publics, des organismes publics,
ou tendant à faire croire à un mandat de l'autorité.
A. La confusion
Il y a confusion lorsque le concurrent tente de profiter du
succès de son rival en procédant à l'imitation des signes
distinctifs qui désignent celui-ci ou ses produits ou de manière
générale l'organisation de son entreprise. La confusion peut donc
résulter de la ressemblance, soit du nom, soit des emballages et
étiquettes, soit de la présentation des magasins, etc. Elle peut
être « phonétique, visuelle et linguistique
»41.
Pour Confusion résultant du nom, le droit congolais
protège aussi bien le nom de la société que son sigle
contre la confusion ou la tentative de confusion pour autant que ceux-ci
revêtent un caractère original. Est considéré comme
original, le nom qui n'est ni commun, ni usuel, ni banal, et qui n'est pas
encore tombé dans le domaine public.
Confusion résultant de l'emballage et
étiquettes existent lorsque le concurrent copie le conditionnement d'un
autre en reprenant les mêmes couleurs et les mêmes graphismes sur
ses emballages ou ses étiquettes.
B. La désorganisation de l'entreprise
rivale
La désorganisation de l'entreprise rivale consiste
à affaiblir son rival en portant atteinte à ses moyens de
production ou de commercialisation par des procédés commerciaux
illégitimes notamment : La divulgation de secret de fabrication ;
L'atteinte au savoir-faire ; Le débauchage du personnel ; Le
détournement des commandes ;
17
L'entrave à la publicité ; La pratique des prix
d'appel lorsque celui-ci s'accompagne de tromperie ou du dumping ; Le
couponnage électronique ; L'utilisation de la marque d'autrui à
titre de promotion ; La méconnaissance d'une convention
d'exclusivité42.
C. La vente à prime
Une vente à prime est le fait que l'acquéreur
d'un bien se verra offrir des cadeaux complémentaires pour le remercier
de son acte d'achat43. Il n'existe aucun problème lorsque le
bien donné gratuitement a un lien avec le produit acheté. Ce sera
le cas de l'octroi d'un stylo à l'achat des cahiers ; d'un tire-bouchon
à l'achat des bouteilles de vins ou de bières.
D. Les ventes en boule de neige
Les ventes en boule de neige, qui sont consacrées en
droit belge, consistent à offrir à un acheteur la gratuité
de son achat à condition qu'il place lui-même auprès des
tiers un certain nombre de nouvelles demandes. En autre offre des marchandises
à titre gratuit ou à un prix réduit sous condition, pour
l'acheteur, de recueillir des commandes semblables passées par de
nouveaux clients44. C'est une sorte de vente en chaîne
où seul le premier client trouve son compte. Ce serait le cas lorsqu'il
est proposé à un client d'une société de
télécommunication le bénéfice d'autant
d'unités s'il parvient à faire abonner autant de personnes
à son réseau.
Section II : l'atteinte à la
règlementation sur la concentration économique et les pratiques
restrictives de la concurrence
Dans cette section nous aborderons deux paragraphes à
savoir : l'atteinte à la
Règlementation sur la concentration économique
(§1), les pratiques restrictives de la concurrence (§2).
§ 1 : l'atteinte à la règlementation
sur la concentration économique
Il est de plus en plus fréquent d'entendre à la
presse des notions de rachats, de fusion, prise de contrôle, etc. de tel
groupe industriel sur telle autre entreprise. Il y a concentration lorsqu'au
moins deux entreprises jadis indépendantes font désormais l'objet
d'un contrôle commun. Le but visé est de créer en
définitive une seule entreprise. La concentration d'entreprise n'est pas
illicite lorsqu'elle vise à assurer l'intérêt
général et permet de renforcer la compétitivité
internationale des entreprises congolaises. Elle est considérée
comme illicite lorsqu'elle vise à entraver toute forme de concurrence au
détriment des consommateurs. La loi organique du 09 juillet 2018 est si
précise quant à la notion de la concentration économique.
A ses articles 48 à 50 disposent :
? La concentration économique résulte de tout acte
ou autre moyen, quelle qu'en soit la forme, qui confère seul ou
conjointement et compte tenu des circonstances de
42 Art 43 de la loi Organique du 09
juillet 2018
43 Art 5 point 19 de la loi Organique du
09 juillet 2018
44 Art 5 pont 17 de la loi Organique du
09 juillet 2018
18
fait ou de droit, la possibilité d'exercer un
contrôle ou une influence déterminante sur une ou plusieurs autres
entreprises notamment par45 :
· Le transfert de propriété ou de
jouissance sur tout ou partie de biens, droits et obligations d'une entreprise
;
· La création d'une entreprise commune ;
· Les droits ou contrats qui assurent une influence sur
la composition, les délibérations ou les décisions des
organes d'une entreprise ou d'un groupe d'entreprise.
? Les opérations de concentration économique
des entreprises et groupes d'entreprises par fusion, création
d'entité nouvelle ou par des contrats spécifiques sont licites
à l'exception de celles qui se rapportent aux pratiques
anticoncurrentielles46.
? Tout projet de concentration économique est soumis
à l'obligation de transmission préalable pour examen et avis
technique à la commission de concurrence lorsqu'il remplit l'un des
trois critères ci-après47 :
· Le chiffre d'affaires hors taxes réalisé
en République Démocratique du Congo par les personnes morales et
physiques impliquées dans le projet de concentration, est égal ou
supérieur au montant fixé par Décret du Premier Ministre
délibéré en Conseil des Ministres, sur proposition du
Ministre ayant l'Economie nationale dans ses attributions ;
· Les personnes morales et physiques impliquées
dans le projet de concentration détiennent ensemble au moins 25% de part
du marché national pour les produits ou services concernés ;
· L'organisation économique
générée par le projet de concentration économique
crée ou renforce une position dominante.
Le Ministre ayant l'Economie nationale dans ses attributions
en reçoit un exemplaire pour publication au journal officiel.
La commission de la Concurrence soumet au Ministre ayant
l'Economie nationale dans ses
attributions, pour autorisation éventuelle, l'avis
technique y relatif, endéans 45 jours à dater de la
réception complète du projet.
§ 2 : les pratiques restrictives de la
concurrence
Les pratiques restrictives de la concurrence sont
constituées notamment :
? De l'imposition d'un prix minimal de revente... ; ? Du refus de
vente entre professionnels ;
45 Art 48 de la loi Organique du 09
juillet 2018
46 Art 49 de la loi Organique du 09
juillet 2018
47 Art 50 de la loi Organique du 09
juillet 2018
19
> Des pratiques discriminatoires de vente.
A. De l'imposition d'un prix minimal de
revente
Il est interdit d'imposé un prix minimal lors de la
revente d'un bien sauf s'il s'agit du prix des journaux ou des
périodiques ainsi que des livres.
La liberté de fixation des prix de revente des biens
et services est garantie. À l'exception du domaine de l'édition
pour la vente des livres et de la presse écrite pour la vente des
journaux et périodiques, est nulle toute disposition qui impose un
caractère minimal au prix de revente d'un produit ou d'un bien, d'une
prestation de service ou à une marge commerciale48.
B. Du refus de vente entre professionnels
Il y a refus de vente lorsque le commerçant tente de
retarder la vente de ses produits en vue d'en créer une pénurie
et espérer revendre plus tard à un prix exorbitant. Ici, il
s'agit d'une pratique restrictive de la concurrence lorsqu'un commerçant
commet à l'égard d'un autre commerçant.
Il faut noter que sont constitutifs de refus de vente :
> Le refus explicite ou implicite de vente entre professionnel
;
> Le silence ;
> Le refus d'agrément en qualité de distributeur
des produits d'une marque ;
> La subordination de la satisfaction d'une demande aux
conditions inhabituelles.
Le refus de vente peut se justifier en cas : > L'interdiction
légale de vente ;
> La mauvaise foi du demandeur ; Le caractère
inhabituel de la demande ; > L'indisponibilité du produit ou du
service.
Par contre la mauvaise foi du demandeur est établie
notamment lorsque :
> Une précédente commande n'a pas
été payée conformément aux engagements ;
> Les marchandises auront été
écoulées dans les conditions nuisant au renom de la marque ;
> Il y a dénigrement systématique de la
marque, sous réserve des comparaisons naturelles effectuées dans
le cadre du conseil à la clientèle.
Alors que le fournisseur peut refuser d'approvisionner le
demandeur qui ne remplit pas les conditions pour être agrée ou qui
refuse de souscrire aux conditions que
48 Art 11 de la loi Organique du 09
juillet 2018
20
ce statut comporte, lorsque la demande est adressée
à un producteur ou un fabricant qui mis en place un réseau de
distribution sélective ou exclusive, sous réserve que le
réseau respecte les dispositions relatives aux prohibitions des
pratiques anticoncurrentielles.
C. La pratique discriminatoire de vente
Le Droit congolais est muet quant à la
définition de la pratique discriminatoire de vente ; il se borne
à énumérer de manière illustrative les
éléments contenants dans la pratique discriminatoire de vente, il
s'agit notamment de :
? Obtenir de lui des prix abusifs ;
? Abuser d'une relation de dépendance ;
? Obtenir des conditions dérogatoires de manière
illicite ;
? Rompre abusivement des relations commerciales établies
;
? Établir un réseau de distribution
sélective ou de distribution exclusive. (Art. 39 de la loi organique du
09 juillet 2018).
Alors qu'en Droit Français, la pratique discriminatoire
consiste à pratiquer à l'égard d'un partenaire
économique à obtenir de lui des prix, des délais de
paiement, des conditions de vente ou des modalités de vente ou d'achat
discriminatoires et non justifiés par des contrepartie réelles en
créant, de ce fait, pour ce partenaire, un désavantage ou un
avantage dans la concurrence.
Une pratique discriminatoire est caractérisée
par l'existence d'un traitement différencié en l'absence de
contrepartie. Les pratiques discriminatoires peuvent être
dénoncées à l'égard d'un fournisseur ou d'un
acheteur.
21
CHAPITRE II : DU REGLEMENT DU CONTENTIEUX
CONCURRENTIEL
Deux mécanismes sont prévus pour le
règlement du contentieux concurrentiel, d'une part nous avons le
règlement par voie administrative qui est assumé par la
commission de la concurrence (Section 1) et d'autre part, le règlement
par voie judiciaire (Section 2).
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